Statistique Violence des mineurs : une croissance majeure Un mis en cause sur cinq a moins de 18 ans : «Libération» révèle le rapport de l'Observatoire national de la délinquance, qui pointe une explosion des chiffres. ominique de Villepin l'a clamé: faire baisser les violences aux personnes est «sa première priorité pour 2005». Le ministre de l'Intérieur a du pain sur la planche : si les violences aux personnes ont baissé de 0,25 % pendant l'année 2004, elles ont connu une progression constante les années précédentes et demeurent à un niveau élevé. Globalement, le nombre de mis en cause (1) pour atteintes volontaires à l'intégrité physique est passé de 129.943 personnes en 1996 à 195.388 en 2003 et le nombre d'actes de violence est passé de 228.030 à 389.622 (sachant qu'une seule personne peut commettre plusieurs actes), soit une hausse de 70 %. Violences gratuites. Pour la première fois en outre, un outil statistique met en évidence l'implication des mineurs dans cette hausse des violences contre les personnes : entre 1996 et 2003, le nombre de moins de 18 ans mis en cause pour atteintes à l'intégrité physique a augmenté de 55 % alors que, pour les majeurs, la hausse s'élevait à 49 %, selon l'Observatoire national de la délinquance (OND). Dans ce tableau élaboré depuis 1996, et que s'est procuré Libération, «un mis en cause sur cinq est un mineur», note l'OND, qui souligne la part prépondérante des violences gratuites dans l'implication des moins de 18 ans. Installé en grande pompe par Nicolas Sarkozy en novembre 2003, l'OND est composé de 29 membres (directeurs généraux de la police et de la gendarmerie, parlementaires, chercheurs, représentants des banques et des transports) chargés de dépoussiérer l'«état 4 001», l'outil statistique utilisé par les services de police et de gendarmerie depuis 1972. Depuis plus de trente ans, l'«état 4 001» compile plus de cent catégories d'infractions différentes qui vont des vols à la roulotte aux infractions liées à la chasse et à la pêche pour obtenir un chiffre global qui ne veut pas dire grand-chose. «C'est comme si on additionnait des choux, des carottes et des navets», estime un statisticien à propos des quatre millions d'infractions contenues dans l'«état 4 001». «Que veut dire ce chiffre quand on sait que deux millions d'infractions sont des atteintes aux biens dont la moitié (un million) concerne l'automobile (vols à la roulotte, dégradations) ?» L'OND doit rendre un rapport complet sur le sujet au mois de mars. Mais il a déjà dévoilé sa nouvelle grille de lecture pour tenter de sortir de «l'usine à gaz» ou de la «tarte à la crème» (c'est au choix, selon les critiques) que sont les chiffres de la délinquance en France. L'Observatoire propose la création de quatre indicateurs regroupant des faits de même nature extraits du 4001 : «les atteintes aux biens», «les infractions révélées par les services de police et de gendarmerie», «les atteintes à l'intégrité physique» (violences contre les personnes) et les «infractions économiques et financières». Les statisticiens distinguent encore quatre catégories parmi les violences aux personnes : les violences physiques non crapuleuses (par exemple, les violences à dépositaire de l'autorité publique) ; les violences physiques crapuleuses (homicide pour vol), les violences sexuelles, et les menaces. «Harcèlement sexuel». L'OND s'est intéressé aux mineurs à travers ces quatre catégories, décortiquées entre 1996 et 2003 (voir graphiques ci-dessus). Sur le total des moins de 18 ans mis en cause, les chiffres augmentent très fortement pour les violences physiques non crapuleuses (les «violences gratuites», + 84 %). La hausse «est très largement perceptible pour les coups et blessures volontaires (+ 68%), les violences aux dépositaires de l'autorité (+ 83%) et les violences sexuelles (+ 68%), pour lesquelles près d'une personne mise en cause sur quatre est mineure», note l'OND. Entre1996 et 2003, le nombre de mis en cause mineurs pour viols sur moins de 18 ans a augmenté de 67 %, soit un accroissement de 500 individus. Selon l'OND, «le phénomène est encore plus ample pour les harcèlements sexuels et autres agressions sexuelles contre des mineurs : en sept ans, le nombre de mis en cause mineurs passe de 900 à 2000, ce qui correspond à une augmentation de 117 %, soit plus qu'un doublement.» «Il faut également noter qu'en matière de menaces pour extorsion de fonds, les mineurs représentent environ un mis en cause sur deux, explique encore l'Observatoire. En revanche, le nombre de mineurs mis en cause diminue fortement pour les vols violents avec arme blanche (-28 %) et les vols violents avec armes à feu (-45 %).» En fonction de l'âge. Les évolutions annuelles étudiées par les statisticiens varient selon l'âge des mis en cause. Ainsi, la hausse du nombre de mineurs impliqués est très sensible entre 1996 et 2000 et beaucoup moins élevée dans les années suivantes, alors que, chez les majeurs, l'augmentation est beaucoup plus régulière durant l'ensemble des sept années étudiées.