Manifestation Urgentistes : le constat de crise est unanimement partagé La permanence des soins donne lieu à un constat de crise partagé par l'ensemble du milieu médical, où, par-delà des intérêts souvent divergents, la nécessité d'un rapprochement entre médecins de ville et hospitaliers semble gagner du terrain, sur fond de grève des urgences. Au deuxième jour de la grève "générale et illimitée" contre l'engorgement dans les services d'urgences, la mobilisation s'est amplifiée, mardi 5 avril, selon Patrick Pelloux, le président de l'Association des médecins urgentistes hospitaliers de France (Amuhf), qui l'a estimée "à 90 %". Celui-ci a précisé que "le mouvement continuait mercredi plus que jamais". La grève a été suivie par "74 % des personnels dans les centres hospitalo-universitaires (CHU) et 92 % dans les centres hospitaliers (CH), en hausse par rapport au premier jour de grève", a indiqué la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (DHOS), des chiffres en hausse par rapport à ceux communiqués lundi. RÉUNION D'ÉTATS GÉNÉRAUX L'Amuhf, qui dénonce la saturation des services d'urgences dans les hôpitaux, l'insuffisance de moyens financiers et la fermeture de lits, a réclamé la tenue d'états généraux "le plus larges possible" sur l'organisation des soins en France. Pour contraindre le gouvernement à ouvrir de nouvelles négociations, l'association a appelé à une extension de la grève aux services paramédicaux des hôpitaux. Si ce mouvement de grève ne devait avoir aucune incidence pour les patients en raison des réquisitions de médecins, qui se contentent d'arborer un brassard "en grève", il a toutefois amené nombre d'acteurs de la santé à dresser le constat d'une crise de l'organisation des soins sur le territoire. La charge la plus virulente est venue du président de l'Union nationale des caisses d'assurance-maladie (Uncam) : Michel Régereau (CFDT) a relevé, dans Le Parisien, que le système de garde des médecins libéraux, "qui repose sur le volontariat, fonctionne mal". MENACE D'UN " SOULÈVEMENT DU MONDE LIBÉRAL " Ces propos ont valu au président de l'assurance-maladie une réaction indignée des syndicats de médecins libéraux, qui ont exigé - par la voix du premier d'entre eux, la CSMF - "un démenti" et menacé d'un "soulèvement du monde libéral" en cas de remise en cause du principe du volontariat. Le Parti socialiste, quant à lui, estime que "la grève des mouvements urgentistes traduit l'ampleur du malaise de l'hôpital public et l'échec de la politique gouvernementale en matière d'organisation des soins", dans un communiqué publié mardi à l'issue du bureau national. Le PS "appelle à la mise en place d'une véritable coordination entre médecine de ville et hôpital" et demande "une réorganisation structurelle des relations entre médecine libérale et hôpital public ". Il "souligne la nécessité d'agir rapidement, sauf à prendre le risque d'avoir à réagir dans l'urgence à une nouvelle catastrophe sanitaire". Le syndicat des médecins libéraux a relevé, de son côté, que la permanence des soins (gardes, astreintes) "est une activité qui s'ajoute à leurs 55 ou 58 heures de travail hebdomadaire". "BILAN DANS SIX MOIS" Pour autant, urgentistes et médecins de ville ont cessé de se renvoyer la responsabilité de la saturation des urgences et partagent le diagnostic de dysfonctionnements du système de soins. Mais, faute d'offrir des solutions communes, ils se tournent désormais vers le ministre de la santé, Philippe Douste-Blazy, qui a, en retour, "lancé un appel au rassemblement du corps médical". Sans inviter les partenaires sociaux autour de la table des négociations, M. Douste-Blazy a annoncé, à l'Assemblée nationale, la parution d'ici à la fin de semaine d'un décret sur l'organisation de la permanence des soins en médecine libérale, très attendu par la profession médicale après quelque deux années de négociation. "Chaque kilomètre carré du territoire doit bénéficier d'une garde médicale", a fait valoir M. Douste-Blazy, ajoutant qu'il ferait "un bilan dans six mois" et prendrait ses "responsabilités", sans préciser s'il pourrait alors remettre en cause le principe du volontariat suivi par les généralistes et spécialistes pour assurer les gardes de nuit ou du week-end. Pour désengorger les urgences et apaiser la colère des hospitaliers, le gouvernement semble aujourd'hui miser sur les effets du décret, qui prévoit un redécoupage des secteurs de garde et une régulation coordonnée avec les SAMU. Ce décret doit être complété par la négociation sur la revalorisation de la rémunération des gardes et astreintes assurées par les médecins libéraux, laquelle pourrait aboutir le jeudi 14 avril.