Législation Une loi pénalisant l'adultère en Turquie ? Le Parlement turc entame l'examen d'un projet de loi qui sanctionnerait d'un an de prison les relations extra-conjugales. Ce texte intervient alors que la Commission européenne doit rendre le 6 octobre son rapport sur l'ouverture des négociations sur l'adhésion de la Turquie à l'UE. Afin d'accroître ses chances d'adhérer à l'Union européenne, la Turquie a lancé ces dernières semaines une grande refonte de son code pénal. Inspiré de celui de l'Italie fasciste, il date de 1926. Les nouvelles dispositions doivent notamment réprimer la torture et élargir les libertés individuelles. Mais elles ont en grande partie été éclipsées par l'un des articles du projet de loi, qui pourrait avoir des conséquences dévastatrices s'il était adopté. Il sanctionne en effet l'adultère, qui, désormais considéré comme un délit, serait passible d'une amende et surtout d'un an de prison. La disposition s'appliquerait aussi bien aux hommes qu'aux femmes, alors que l'ancienne loi sur l'adultère, abolie en 1996, ne visait que les femmes.   Selon ses partisans, et notamment le Premier ministre, l'islamiste modéré Recep Tayyip Erdogan, cette pénalisation de l'adultère a pour objet de "protéger l'union de la famille". "Il y a une demande de la société en ce sens" ajoute le ministre de la Justice, Cemic Cicek. Le son de cloche est évidemment différent du côté des laïcs et des associations de défense du droit des femmes. "C'est un retour en arrière. Cette disposition existe uniquement dans les pays où s'exerce la charia" fait remarquer l'avocate Senel Sahiran. "L'Etat n'a rien à voir dans ma chambre à coucher" lancent également les détracteurs.   "Obstacle"    Intervenant dans le contexte de l'éventuelle adhésion de la Turquie à l'UE, cette disposition sur les relations extra-conjugales tombe au plus mauvais moment. La Commission européenne doit ainsi rendre son rapport sur l'ouverture des négociations le 6 octobre. Lors de sa visite dans le pays, la semaine dernière, le commissaire à l'élargissement, Günter Verheugen, expliquait  que le texte risquait "d'induire en confusion les gens et porterait atteinte à la perception qu'on a dans l'Union de l'effort de réformes en Turquie. Il pourrait être mal compris ou compris comme une concession qui est faite en Turquie aux franges les plus conservatrices de la société".   La pénalisation de l'adultère pourrait-elle alors devenir un "obstacle" au chemin turc vers l'UE ? Le ministre belge des Affaires étrangères, Karel De Gucht, l'affirme. Nul doute en tout cas que les débats du Parlement turc, qui doivent durer environ une semaine, seront scrutés avec intérêt par les dirigeants européens. Le 17 décembre, lors du sommet de Bruxelles, ils décideront d'ouvrir ou non les négociations avec la Turquie.