Scandale Une journaliste du "New York Times" emprisonnée pour avoir refusé de révéler sa source une journaliste du New York Times, Judith Miller, a été emprisonnée, mercredi 6 juillet, pour ne pas avoir révélé ses sources à un grand jury qui enquête sur des fuites survenues au sein de l'administration Bush concernant le nom d'un agent secret de la CIA. Le juge Thomas Hogan a ordonné le placement immédiat en détention de Judith Miller et décrété qu'elle devrait rester derrière les barreaux jusqu'à ce qu'elle accepte de témoigner pour le reste du mandat du grand jury, soit jusqu'en octobre. Elle purgera sa peine dans une prison de la région de Washington, le juge ayant refusé qu'elle soit assignée à résidence ou internée dans un établissement de sécurité minimum du Connecticut. "Si on ne peut pas faire confiance aux journalistes pour qu'ils garantissent la confidentialité de leurs sources, alors les journalistes ne peuvent pas exercer leur métier. Il ne peut pas y avoir de presse libre", a déclaré Mme Miller au juge durant l'audience.  Le deuxième journaliste concerné par l'affaire, Matt Cooper, de l'hebdomadaire Time, condamné comme Mme Miller en première instance et en appel à dix-huit mois de prison pour outrage à magistrat, a pour sa part accepté de révéler sa source devant la chambre d'accusation, évitant ainsi la prison. Très défait à la sortie du tribunal, il a expliqué que sa source l'avait "personnellement, sans ambiguïté et sans y être forcé" délié de sa promesse de confidentialité. "C'est une triste journée, non seulement pour les journalistes, mais pour notre pays", a-t-il ajouté, se disant "de tout cœur avec Judy". UNE DÉCISION "CONSTERNANTE" Le directeur de la publication du New York Times, Bill Keller, a dénoncé une décision "consternante", craignant que ce précédent permette à l'avenir aux gouvernants d'"étouffer" des affaires. Le président du journal, Arthur Sulzberger, a espéré que cette affaire pousse le Congrès à voter une loi protégeant le secret professionnel des journalistes. La direction de Time, qui, en dépit des objections de Matt Cooper, avait livré ses carnets de notes à la justice il y a une semaine, a souligné que son reporter pourrait désormais témoigner "comme l'ont déjà fait d'autres journalistes dans cette affaire après y avoir été autorisés par leurs sources". La Cour suprême ayant refusé de se saisir de l'affaire la semaine dernière, le juge Thomas Hogan avait annoncé qu'il entendait sanctionner le refus des journalistes de se plier aux demandes du procureur indépendant Patrick Fitzgerald. Ce dernier cherche à établir qui a pris l'initiative de violer le secret de l'identité d'un agent de la CIA, Valerie Plame, mentionnée par l'éditorialiste conservateur Robert Novak dans un éditorial de juillet 2003. "Le temps est venu" de sanctionner les journalistes, avait dit le juge Hogan avant l'audience. "Si les gens pouvaient décider à quels ordres de la justice ils veulent obéir, ce serait l'anarchie." "Les journalistes ne sont pas habilités à promettre la confidentialité (à leurs sources) ; personne en Amérique n'a ce droit", avait fait valoir le procureur Patrick Fitzgerald dans un argumentaire judiciaire cité par plusieurs médias, mercredi. L'hebdomadaire Newsweek a affirmé cette semaine que les notes de Matt Cooper révélaient des contacts entre lui et le conseiller présidentiel Karl Rove, pouvant indiquer que le stratège politique du président George W. Bush serait à l'origine de la fuite. Cette indiscrétion était visiblement destinée à discréditer le mari de Mme Plame, l'ex-ambassadeur Joseph Wilson, qui avait publiquement accusé la Maison Blanche d'avoir manipulé les informations disponibles sur l'arsenal irakien.