Cérémonie Un "spectacle visuel" triomphe à la Nuit des Molières La Nuit des Molières, fête annuelle du théâtre à la télévision, a consacré, lundi soir 24 avril, pour sa 20e édition, la pièce sans dialogue La Symphonie du hanneton, du Suisse James Thiérrée, quatre fois primée lors d'une soirée anniversaire sans tensions avec les intermittents du spectacle. Sous la houlette de l'animatrice Karine Le Marchand et la présidence d'honneur du comédien et metteur en scène Jacques Weber, la cérémonie, diffusée en direct sur France 2, a enchaîné remise de trophées et séquences filmées, avec une grande part d'images d'archives souvent drôles, parfois émouvantes. La Symphonie du hanneton, premier spectacle de James Thiérrée – petit-fils de Charlie Chaplin, 31 ans – a reçu quatre Molières (spectacle de théâtre public, metteur en scène et révélation théâtrale pour le jeune homme, costumes pour sa mère, Victoria Thiérrée)."Ces Molières, c'est le triomphe du spectacle visuel. C'est la reconnaissance des arts du cirque qui se sont petit à petit intégrés au théâtre. Ce qui est formidable, c'est que normalement, Molière, ce sont les mots alors que dans mon spectacle, c'est le corps qui fait passer des idées sans les mots. J'ai grandi dans l'univers de la pantomime : être sur scène, c'est aussi naturel que boire ou manger, avec le corps comme objet ludique. Les gens ont envie de rêver : c'est peut-être aussi ce que les Molières ont voulu récompenser", a indiqué, en coulisses, James Thiérrée. DÉCEPTION POUR LES PLUS NOMINÉS Chez les femmes, le Molière de la révélation théâtrale a été remis à Marilou Berry, la fille de Josiane Balasko, pour Toc toc. Judith Magre s'est vu attribuer le troisième Molière de sa carrière en étant sacrée "meilleure comédienne" pour son rôle dans Histoires d'hommes. Jacques Sereys a été désigné meilleur comédien (Du côté de chez Proust) face à des monstres sacrés comme Michel Piccoli et Claude Rich. L'Académie des Molières (1 500 votants) a salué, dans des seconds rôles, Danièle Lebrun (Pygmalion) et Roger Dumas (Moins 2). Pourtant huit fois nommés, Moi aussi je suis Catherine Deneuve et La Sainte Catherine ne se sont vu distinguer qu'une fois chacune, respectivement dans les catégories "théâtre privé" et "auteur" (Stéphan Wojtowicz). La troisième pièce aux huit nominations, Le Roi Lear, devra, elle, se contenter de deux accessits ("décorateur-scénographe" avec Nicky Rieti et "lumières" pour André Diot). "PAS DE CULTURE SANS DROITS SOCIAUX" En recevant le Grand Prix spécial du jury "théâtre public en région" pour La Mort de Danton de Büchner (Théâtre national de Bretagne), l'acteur Nicolas Bouchaud s'est chargé de plaider la cause des intermittents, qui protestent depuis 2003 contre le protocole régissant leur régime d'assurance-chômage. "Nous savons depuis trois ans que ce protocole est inadapté à nos métiers, y compris dans sa version la plus récente", négociée le 18 avril, a souligné le comédien. Il a été longuement acclamé dans la salle, sous le regard attentif du ministre de la culture, Renaud Donnedieu de Vabres. Le porte-parole a souhaité que le "projet élaboré par le comité de suivi, signé par 476 députés de tous bords", soit examiné par le Parlement. La fédération CGT du spectacle avait appelé à des actions lors de la soirée. Les invités de la cérémonie avaient été accueillis par une cinquantaine d'intermittents, tenus à l'écart par un cordon de CRS. Ils ont fait résonner dans la rue le slogan "pas de culture sans droits sociaux".