Changement Un militaire pourrait prendre la tête de la CIALe général Michael Hayden succéderait à Porter Goss, démissionnaire.Ce n'était sans doute pas le but recherché. En annonçant vendredi la démission du patron de la CIA, Porter Goss, et son remplacement lundi par le général Michael Hayden, George Bush a provoqué un grand déballage sur les dysfonctionnements de l'agence de renseignements et un affrontement au sein de son parti sur un risque de mainmise du Pentagone. «Il est la mauvaise personne, au mauvais endroit, au mauvais moment, a estimé dimanche sur Fox News le représentant républicain du Michigan Peter Hoekstra, président de la commission de la chambre sur le renseignement. Nous ne devrions pas laisser aujourd'hui un militaire diriger une agence civile.»«Transition». Aucune explication officielle n'a été donnée à la démission surprise de Porter Goss. Vendredi, Bush s'est contenté de constater qu'il avait assuré une «transition» à la tête de l'agence. Il sera resté en poste moins de deux ans. C'est «simplement l'un de ces mystères», s'est contenté de commenter l'intéressé.Lorsqu'il remplace George Tenet en septembre 2004, Goss hérite d'une situation dégradée. La CIA n'a pu prévoir les attentats du 11 septembre 2001. Elle a accrédité l'idée que l'Irak regorgeait d'armes de destruction massive. Suivant une recommandation de la commission bipartisane mise en place pour tirer les leçons du 11 septembre, le Congrès décide alors la création d'un poste de directeur du renseignement. C'est lui qui coordonnera l'activité des différentes agences et assurera le traditionnel briefing du président chaque matin, à la place du directeur de la CIA.Rapidement, les relations se détériorent entre John Negroponte, le premier à occuper ce poste, et Porter Goss, qui devient son subordonné. Ce dernier cherche à préserver les missions de la CIA, tandis que Negroponte veut transférer à d'autres services les activités d'analyse pour concentrer l'agence sur l'espionnage.Frustration. Dans le même temps, l'arrivée de Goss ne fait que détériorer un peu plus la situation au sein de l'agence. En imposant plusieurs proches à des postes haut placés, il provoque le départ de responsables expérimentés. Il échoue à remonter le moral des employés, qui vivent difficilement le changement de statut. Il met un soin particulier à tenter de débusquer ceux qui se sont rendus coupables de fuites, par exemple sur les prisons secrètes en Europe de l'Est. «Dans l'année et demi écoulée, plus de trois cents ans d'expérience ont été éliminés dans la frustration, a déclaré vendredi la représentante démocrate Jane Harman (Californie), membre de la commission du renseignement. L'agence est en chute libre.»Le départ de Goss intervient au moment où l'inspection générale de la CIA enquête sur Kyle Foggo, le numéro trois de l'agence qu'il a nommé. L'enquête cherche à établir sa participation à des soirées mêlant parties de poker et prostituées financées par des pots-de-vin sur des contrats d'armement.Autant dire que la tâche ne sera pas facile pour le successeur de Goss, d'autant qu'on peut ajouter au tableau la polémique sur les prisons secrètes en Europe de l'Est et la révélation de l'identité de l'une des agentes, Valerie Plame, qui fait l'objet d'une enquête au cours de laquelle Karl Rove, proche conseiller de Bush, a été entendu plusieurs fois.Encore faut-il que le Sénat accepte la nomination d'un militaire. Des démocrates veulent profiter de la confirmation de Michael Hayden pour raviver le débat sur la légalité des écoutes décidées par la Maison Blanche. Avant d'être le premier adjoint de Negroponte, Hayden était à la tête de la National Security Agency qui les a orchestrées. Il en est toujours un ardent défenseur.
