Annonce UE Réunion des ministres de la Justice et de l'Intérieur, hier à Bruxelles Paris, Berlin et Madrid lancent un casier judiciaire commun Les nombreux crimes de Michel Fourniret, le pervers des Ardennes, auront eu le mérite d'activer la coopération judiciaire européenne. A la demande de la Belgique, où résidait le tueur en série français, le projet de casier judiciaire européen est réapparu sur la table des ministres européens de la Justice et de l'Intérieur, réunis, hier, à Bruxelles. A cette occasion, la France, l'Allemagne et l'Espagne ont annoncé la mise en commun, courant 2005, de leurs casiers judiciaires nationaux. La Belgique, comme tout autre Etat membre, a été invitée à se joindre à l'initiative. Encore faut-il qu'elle parvienne à adapter son système informatique à temps pour rejoindre le groupe pionnier. «Nos voisins peuvent s'associer à notre démarche», a confirmé, hier, le garde des Sceaux Dominique Perben, «mais il faut aller vite, ne pas être freiné par des problèmes techniques et ils sont nombreux». Le projet d'interconnexion des casiers judiciaires a été lancé par la France et l'Allemagne, en janvier 2003, lors du sommet de l'Elysée. Il a été élargi à l'Espagne à la fin 2003. «L'idée est de rendre nos casiers respectifs consultables par les juges des trois pays sans passer par la procédure lourde des commissions rogatoires, qui exige des demandes écrites envoyées par la poste», a expliqué, hier, le ministre espagnol de la Justice, Juan-Fernando Lopez-Aguilar. «Il est très important, pour lutter contre la récidive, de connaître le passé du délinquant où qu'il ait séjourné en Europe», a ajouté Dominique Perben. Grâce à cette réforme, qui complète l'introduction du mandat d'arrêt européen, les magistrats allemands ou espagnols par exemple pourront adresser par courrier électronique leur demande de renseignements auprès du casier judiciaire national français, basé à Nantes. «Nous espérons que les échanges d'informations, jusqu'ici peu nombreux, vont augmenter», a déclaré le ministre allemand Brigitte Zypries. Sur les 8 millions de requêtes adressées l'an dernier au fichier central allemand, seules 3 800 venaient de l'étranger. Découragés par la lenteur de la procédure, les juges européens hésitent, au cours de leurs enquêtes, à se renseigner sur le passé judiciaire des délinquants dans d'autres pays. Dans l'affaire Fourniret, par exemple, c'est le criminel lui-même qui a prévenu les autorités belges de l'existence de son casier en France. Les enquêteurs wallons ont alors demandé, par écrit, à la France, un bilan de ses condamnations de Fourniret. En retour, ils n'ont obtenu qu'un casier expurgé, les peines les plus anciennes pour agressions sexuelles ayant été effacées conformément à la législation française. C'est là que réside la principale faiblesse de l'initiative lancée par la France, l'Allemagne et l'Espagne. Si elle permettra un échange plus rapide des informations, l'instauration d'un casier judiciaire ne fera pas disparaître les différences de législations, chaque pays ayant ses règles propres pour l'effacement des peines. L'expérience franco-germano-espagnole n'en constitue pas moins un pas de plus vers la création d'un espace judiciaire commun. Elle intervient le jour où la Commission européenne lance, de son côté, un projet similaire, mais plus ambitieux, visant, à terme, à mettre en place un casier judiciaire commun aux vingt-cinq Etats membres. Consciente des obstacles liés à une communautarisation des casiers, Bruxelles propose une mise en réseau informatique des registres nationaux. Cette réforme qui semble simple sur le papier s'avère très compliquée à mettre en place. Techniquement, elle exige une compatibilité des systèmes informatiques des différents pays, ce qui nécessite des mois de travail en amont. Décidées à franchir le pas, Paris Berlin et Madrid tablent sur une année de préparatifs avant de rendre leur système opérationnel.