Mort de Sybille Bedford

Mort Sybille Bedford, romancière, biographe et journaliste littéraire britannique La romancière, biographe et journaliste littéraire britannique Sybille Bedford est morte à Londres, vendredi 17 février. Elle était âgée de 94 ans. Née à Charlotenbourg (Berlin), le 16 mars 1911, d'un aristocrate allemand, Maximilien von Schoenebeck et d'une anglo-italienne, Elizabeth Bernard, Sybille Bedford raconte qu'à l'école on l'avait surnommée "la baronne Billi". Ce "prénom de garçon" n'était pas pour déplaire à cette amazone dont on se rappelle les audacieuses tribulations au Mexique : Visite à Don Otavio. Tribulations d'une romancière anglaise au Mexique, son premier livre paru en Grande-Bretagne en 1953, et traduit en français aux éditions Phébus, avec une préface de Bruce Chatwin. Sybille Bedford avait 42 ans à la sortie de ce premier livre. Pourtant, elle disait avoir toujours écrit "dans sa tête". A la mort soudaine de son père - elle n'a alors que 7 ans -, elle vit quelque temps en Italie avec sa mère et son beau-père, puis quatorze ans à Sanary-sur-Mer, dans le Var. Dans Puzzle (Le Promeneur, 1991), elle raconte cette éducation "peu sentimentale" entre les deux guerres, zigzaguant d'un pays à l'autre de l'Europe et privilégiant toujours la dimension romanesque du réel. "Abandonnée" par une mère de plus en plus dépendante de l'alcool et de la morphine, elle reviendra plus tard sur les relations mère-fille ainsi que sur son absence d'éducation au sein d'une famille bohème et excentrique, dans Une favorite des dieux et Une erreur de compas (10/18). C'est sa rencontre avec Aldous Huxley - dont elle publiera d'ailleurs une biographie en deux volumes, en 1973 et 1974 - qui va décider de son avenir. La rencontre a lieu à Sanary où, après 1933, de nombreux écrivains tels Bertolt Brecht et Thomas Mann, ont trouvé refuge. Encouragée par l'auteur du Meilleur des mondes et par sa femme Maria, Sybille Bedford commence à écrire. Après avoir écarté l'allemand (trop rigide) et hésité avec le français (elle a une fascination pour Stendhal), la jeune fille choisit de s'exprimer en anglais. A 16 ans, elle a déjà des essais, des critiques et trois romans (jamais publiés) à son actif. En 1940, alors qu'elle doit quitter la France pour avoir signé des articles antifascistes, elle rejoint Huxley en Californie. C'est lui qui la mariera à un de ses amis et citoyens britanniques, Walter Bedford - une union qui ne durera que peu de temps mais lui permettra d'acquérir, pendant la guerre, la citoyenneté britannique. Amateur de raffinement, de voyages et de bons vins, Sybille Bedford était aussi passionnée par le fonctionnement de la justice. "J'ai, depuis l'âge de 14 ans, une curiosité étrange pour les procès, confiait-elle au Monde en 1991. J'observe les cours de justice de façon intimiste. Je suis attentive aux tremblements de mains, de paupières, aux lapsus." A côté de son travail de romancière, la chronique judiciaire l'amusait comme une seconde nature. Elle avait ainsi rendu compte du cas du docteur Adams (1959), de l'obscénité supposée de Lady Chatterley (1961), du procès allemand du "personnel" d'Auschwitz (1963-1965) ou encore du procès de Jack Ruby, l'exécuteur de Lee Harvey Oswald (1964). Son multilinguisme lui avait également permis de rédiger un essai comparatif sur l'application des lois en Angleterre, en Allemagne, en France, en Suisse et en Autriche. Les éditions Christian Bourgois publieront prochainement les Mémoires de Sybille Bedford, parus l'an dernier en Grande-Bretagne, sous le titre Quicksands : A Memoir.