Annonce Sogerma: Villepin se pose en sauveur Après sa visite aux ouvriers menacés, le Premier ministre appelle à sauvegarder l'activité industrielle du site aéronautique de Mérignac. Presque trop content, Dominique de Villepin. En effectuant hier une visite surprise de quelques heures à l'usine de Mérignac (Gironde) de la Sogerma, dont la fermeture a été annoncée le 12 mai par la direction d'EADS, le Premier ministre a trouvé une belle occasion d'essayer de tourner la page Clearstream. Histoire de démontrer qu'il se préoccupe avant tout du problème numéro 1 des Français : l'emploi. Sur le même sujet Une petite crise pour sauver la mise de Matignon Larme Social. A savoir Une entreprise laissée à la dérive par l'Etat «Froid et chaud». Depuis l'annonce de la fermeture du site spécialisé dans la maintenance aéronautique, qui emploie plus de 1 100 personnes, les déclarations, les revirements et les rencontres politiques s'enchaînent en accéléré. Dès sa descente d'avion, sur le tarmac, face aux hangars de l'usine de maintenance, le Premier ministre a voulu affirmer sa détermination : «J'ai un objectif : obtenir qu'une activité industrielle se poursuive par le groupe EADS ici, à Mérignac, et que le plus grand nombre d'emplois soient préservés. L'industrie aéronautique est installée à Mérignac depuis des générations, il est donc important que cette activité continue.» L'Etat est aujourd'hui actionnaire du groupe à hauteur de 15 %. Convoqués la veille par Noël Forgeard, à Paris, les représentants de l'intersyndicale s'étaient pourtant heurtés à une fin de non-recevoir. Au cours de deux heures et demie d'entrevue, le coprésident d'EADS leur avait réaffirmé sa volonté d'arrêter les activités de la filiale mérignacaise de maintenance. «Hier, le froid. Aujourd'hui, ça sent plutôt le chaud» : Bernard Tachoires, représentant FO, accueille avec flegme et réserve la succession des événements. «On sent bien que le gouvernement se lance dans un bras de fer avec EADS, poursuit le syndicaliste, mais, ce que l'on souhaite, c'est un projet fort et concret. Là, il n'y a rien de gagné, on attend la réaction de l'industriel.» «Aspirations». En cours de journée, le groupe EADS indiquait de son côté qu'il allait étudier la réindustrialisation partielle du site «visant un noyau de 300 emplois». Une mesure loin d'être suffisante, pour les syndicats. «Cela ne l'est pas non plus pour moi, réagissait en fin de journée Dominique de Villepin. Je souhaite pouvoir trouver des solutions qui soient plus à la mesure des aspirations des salariés.» Des groupes de travail vont être constitués dans ce sens pour étudier toutes les possibilités. «Je retiens que, oui, il y a un avenir pour ce site industriel, estime le chef du gouvernement. Il y a un savoir-faire, une technologie, une compétence, qui méritent d'être défendus.» Même si Bernard Tachoires juge «réconfortante» l'attitude du Premier ministre, il n'est cependant pas dupe. «Des hommes politiques de haut rang, de droite, de gauche, on en a reçu quelques-uns. Quel que soit leur bord, ils ont tout intérêt à se saisir d'un problème industriel. Et puis, la politique, elle se fait sur l'ours ; pourquoi elle ne se ferait pas sur nous ? On voulait un débat national, on l'a. Pour nous tout est bon.» En dix jours, les salariés ont vu se précipiter à leur chevet Hollande, puis Fabius, puis Emmanuelli, puis Mamère, entre autres. Ils ont aussi été reçus en fin de semaine par le ministre de la Cohésion sociale, Jean-Louis Borloo, qui a demandé dans la foulée un moratoire et un réexamen de la fermeture. A cette occasion, Noël Forgeard faisait même un premier signe, annonçant vouloir «reprendre les concertations et se donner du temps». Position sur laquelle il est très nettement revenu lundi. Date butoir. Désormais, les salariés souhaitent aller vite. Alain Rousset, président PS de la région Aquitaine, invité à participer aux discussions, estimait lui aussi que la fin du mois de juin pouvait être une date butoir. «J'ai l'impression qu'EADS joue la montre. On va laisser partir du monde, s'effilocher les choses, et après on dira qu'on ne peut plus sauver l'entreprise.» Déjà, les syndicats estiment que le personnel est entré dans une période d'hésitation. Les gens préparent leur CV et songent à leur avenir. Une manifestation est prévue aujourd'hui devant le siège d'EADS France, puis devant l'Assemblée Nationale, à Paris.