Anniversaire : Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band le huitième album des Beatles fête ses 40 ans
Anniversaire Sgt Pepper's Lonely Hearts Club Band" : 40 ans et toujours aussi acideMeilleur album de tous les temps, selon Rolling Stone, disque à emmener sur une île déserte, sujet de dissertation sans fin, Sgt Pepper's lonely hearts club band est sorti il y a tout juste quarante ans, le 1er juin 1967. Il y a un avant et un après-Sgt Pepper. Avant, les chansons des Beatles ont 2 de QI et 17 de tension. Elles racontent l'histoire d'un garçon qui veut tenir la main d'une fille ("I wanna hold your hand"), d'un garçon qui s'est pris une veste avec une fille ("I'm a loser"), d'un garçon qui ne veut pas foutre en l'air la soirée ("I don't want to spoil the party")... le tout en deux minutes trente chrono. Enthousiasmant, mais banal à pleurer. Dans les moments de lucidité, John Lennon appelle à l'aide ("Help !"), étouffé par la schizophrénie de sa vie de star, en tournée continuelle, massacrant sur scène des chansons que le groupe n'entend même plus, trompant allègrement sa femme.Les Beatles au Shea Stadium en août 1965Fatigués par leur vie d'amuseurs publics, sur scène, dans leurs films, les Beatles veulent évoluer. Ils mettent graduellement la barre plus haut avec Rubber Soul et Revolver. Les thèmes évoluent : plus introspectifs, ils s'adressent à la génération des baby-boomers en Angleterre, aux Etats-Unis et ailleurs. Avec Sgt Pepper, ils dynamitent les codes de la culture pop. Ils avaient déjà des cheveux longs, des petites lunettes carrées. Ils ont désormais la moustache en bataille, ont dévalisé un vestiaire de l'Armée du salut et un atelier de tuning, pour en piquer les couleurs flashy. Ils ne roulent plus qu'à la fumette, ils carburent au LSD (les initiales de "Lucy in the sky with diamonds"), comme tous leurs collègues de la scène pop rock au tournant de 1966-1967.Tout l'album est le reflet de cette culture LSD. On en voyait les prémisses à la fin de Revolver ("Tomorrow never knows"), on en a la confirmation avec le double single – "Strawberry fields forever" et "Penny lane" – issu des séances d'enregistrement de Sgt Pepper. Les films promotionnels qui les accompagnent donnent encore le tournis et indiquent que leur disque à venir partira vraiment dans toutes le directions. Comme leurs commensaux d'ailleurs. Les Beach Boys, Bob Dylan, les Who, les Stones ou Zappa ont déjà mesuré les limites du 33-tours traditionnel et expérimentent dans leur coin."Strawberry fields forever"Lassés de jouer aux Beatles traditionnels, les quatre lascars prennent leur temps pour enregistrer, expérimenter. Ils s'effacent derrière un orchestre imaginaire, l'album n'est plus composé d'une suite de chansons posées au petit bonheur la chance les unes derrière les autres. Elles sont liées, racontent l'histoire de ce groupe, de 4 000 trous à Blackburn, dans le Lancashire, d'un cottage sur l'île de Wight, au son d'une clarinette, d'une cavalcade, d'une guitare qui couine, avec un bon coup d'écho. La pochette, signée Peter Blake, sera le reflet de ce feu d'artifice créatif, avec sa soixantaine de personnages, son plan de marijuana. Manquent juste à l'appel Gandhi et Hitler, recalés par la maison de disque.La création de la pochette de Sgt Pepper par Peter BlakeAujourd'hui, à quarante ans de distance, Peter Blake semble paradoxalement trop riche, comme un gros bout de nougat (de Sault) avec ses amandes et son miel qui collent aux dents. "A day in the life"Prises séparément, les chansons tiennent modérément la route, à part l'inoxydable "A day in the life". Il n'y a aucune machine à tube. Et il faut dire aussi que la notion de concept album a beaucoup vieilli. Aujourd'hui, plus personne n'enregistre de concept album. Autant de raisons qui font qu'on peut se dispenser de l'écouter régulièrement. En 1974, le New Musical Express (NME), en faisait encore son disque numéro 1 de tous les temps. Et patatras, en 1985, le même NME publie un autre classement. La vague punk est passée par là. Sgt Pepper est remplacé par Pet sounds (Beach Boys), What's goin' on (Marvin Gaye), Astral Week (Van Morrison). Aujourd'hui, à ce classement, on adjoindrait volontiers OK Computer ou Doolittle (Pixies). Qu'importe, Rolling Stone le place toujours au sommet du rock, BBC Radio 2 aussi. Et parmi les disques de Beatles, on lui préfère souvent Revolver, The Beatles (l'album blanc) ou Abbey Road, voire Rubber Soul. Pourtant, en creusant bien, on peut le redécouvrir, sur les sites de P2P, en partant à la recherche des séances d'enregistrement. Un voyage dans le temps qui vaut vraiment le détour.