mort Serge Lancel, philologue, archéologue et historien, membre de l'Institut, est mort, dimanche 9 octobre, à Grenoble. Il était âgé de 77 ans. Avec lui disparaît un savant et un organisateur qui a consacré sa vie à une meilleure connaissance, dans le monde savant comme dans le grand public, de l'Afrique du Nord antique.Né le 5 septembre 1928 à Cuba, normalien, agrégé de grammaire, membre de l'Ecole française de Rome de 1953 à 1955, Serge Lancel enseigne d'abord à Alger, à la Sorbonne et à Tananarive (Madagascar) avant de revenir dans la capitale algérienne en 1963 comme maître de conférences à l'université. Il fouille, étudie la nécropole de Tipasa, et rend vie aux publications algériennes sur l'Antiquité en fondant le Bulletin d'archéologie algérienne.Nommé en 1965 à l'université Grenoble-III, Serge Lancel y achèvera sa carrière, menant de front enseignement du latin et tâches administratives, dont la direction des antiquités historiques de Rhône-Alpes. Il lance avec Jehan Desanges la précieuse Bibliographie analytique de l'Afrique antique, dont ils rédigent 19 fascicules.Lorsqu'en 1972 l'Unesco promeut la campagne internationale de sauvegarde de Carthage, Serge Lancel crée et dirige, jusqu'en 1982, sous l'égide de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, la Mission archéologique française de Carthage-Byrsa.Sur cette colline qui domine la célèbre cité antique, il conduit, en parfaite collaboration avec le conservateur tunisien du site, Abdelmajid Ennabli, des fouilles qui renouvellent profondément notre connaissance de Carthage antique et particulièrement punique.Il édite les deux premiers volumes de la collection "Byrsa", et conçoit une mise en valeur exemplaire des vestiges. Parallèlement, il poursuit l'étude du christianisme des premiers temps, publiant en quatre tomes les Actes de la Conférence de Carthage de 411, un affrontement entre près de six cents évêques catholiques et donatistes qui fut un moment fort de l'histoire de l'Eglise.Elu en 2001 membre de l'Institut (Académie des inscriptions et belles-lettres), Serge Lancel continue, une fois retraité, une activité inlassable de chercheur, d'écrivain et d'animateur. Il publie coup sur coup quatre ouvrages qui connaissent un vif succès, Carthage (Fayard, 1992), Hannibal (Fayard, 1995), Saint Augustin (Fayard 1999), L'Algérie antique (Ed. Mengès, 2003), alliant à une solide érudition la finesse et l'élégance qui le caractérisent.Serge Lancel est le cofondateur et le premier président de la Société d'étude du Maghreb préhistorique, antique et médiéval (Sempam), qu'il dirige avec son dynamisme de grand sportif. En février 2005 encore il organisait un congrès de cette société en Libye.Ses recherches, qui embrassent plus d'un millénaire d'histoire d'une vaste contrée et qui touchent aux disciplines les plus diverses, la passion avec laquelle il maintenait une tradition dans laquelle a souvent brillé la science française, font de Serge Lancel un des principaux acteurs - toujours en liaison confiante avec nos collègues d'outre-Méditerranée, dont certains avaient été ses élèves - de l'historiographie du Maghreb antique.
