Premier/e Scrutin historique en Arabie saoudite Pour la première fois de son histoire, l'Arabie saoudite, monarchie absolue et ultra-conservatrice, organise jeudi 10 février des municipales. L'élection a débuté jeudi matin à Riyad et dans sa province. Les affaires locales sont l'objet principal de débat dans ces élections, où les femmes, plus de la moitié de la population, n'ont pas le droit de vote. Ce premier scrutin, qui a débuté jeudi 10 février à 8 h (6 h à Paris) à Riyad et dans sa province, intervient sur fond d'une vague de violences perpétrées par des partisans présumés du réseau terroriste Al-Qaida d'Oussama Ben Laden, déchu de sa nationalité saoudienne, qui a revendiqué les attentats du 11 septembre. "C'est une journée spéciale pour moi", a dit l'actuel maire de Riyad, le prince Abdel Aziz ben Ayyaf Al Moqrin, après avoir déposé son bulletin dans l'urne, dans un bureau de vote de l'est de la capitale, installé dans un centre baptisé du nom du prince Salmane ben Abdel Aziz, gouverneur de Riyad. "Je suis content et heureux. Je suis staisfait du processus" d'ouverture engagé dans le royaume, a-t-il encore dit, ajoutant: "C'est la première fois. J'espère que le Conseil (municipal) apportera son assistance au maire".I nterrogé sur l'exclusion des femmes du scrutin, le prince Abdel Aziz s'est prononcé pour leur participation dans de futures élections. "Elles doivent voter (...). Nous allons recommander que les femmes votent la prochaine fois", a-t-il dit. "Le gouvernement d'Arabie saoudite [pouvait] montrer son leadership dans la région en accroissant le rôle de son peuple dans la définition de son avenir", a affirmé mercredi dernier le président américain, George W. Bush, dans son discours sur l'état de l'Union. Les pressions américaines depuis le 11-Septembre, encourageant l'Arabie saoudite à s'engager dans la voie des réformes, ont beaucoup joué dans la décision d'organiser ces élections. Mais le riche royaume pétrolier, qui détient le quart des réserves mondiales prouvées de brut, souligne que les réformes devraient émaner de l'intérieur du pays, non taillées sur le modèle occidental et à l'abri d'ingérence étrangère. "LES PAYS AMIS SE CONSEILLENT MUTUELLEMENT" Ainsi, le ministre saoudien des affaires étrangères, Saoud Al-Fayçal, a minimisé la déclaration de M. Bush. "Les pays amis se conseillent mutuellement. Lorsque nous conseillons aux Etats-Unis de changer leur politique étrangère au Moyen-Orient, cela affectera-t-il nos relations ?" a-t-il dit samedi. "Je ne pense pas qu'il [Bush] ait dit quelque chose qui [...] blesse. Il a formulé des espoirs et des aspirations, et nous faisons de même", a-t-il ajouté. Un membre du Majlis Al-Choura, un conseil consultatif désigné, Abdel Aziz Al-Fayez, a souligné que les Saoudiens ne s'en remettaient qu'à eux-mêmes. "Les élections municipales [...] prouvent que le royaume est sur la voie des réformes qu'il s'est assignées. Mais cela [ce processus de réformes] ne peut pas être déterminé par les présidents d'autres Etats, même s'ils sont des amis et même si nous sommes fiers de leur amitié", a-t-il déclaré. Cependant, les candidats et les électeurs à Riyad semblent être préoccupés des affaires locales beaucoup plus que par un quelconque autre débat, comme en témoigne la campagne électorale de 12 jours qui précède le scrutin. Au total, 1 818 candidats sont en lice, dont 646 pour les sept sièges de Riyad, chaque siège correspondant à une circonscription. Le reste des candidats sont en compétition pour les sièges des 37 autres conseils municipaux de la province de Riyad. Les candidats ont été autorisés à faire des annonces dans la presse écrite et à établir des centres de campagne électorale dans des lieux privés. Mais la radio-télévision leur est interdite, tout comme les établissements publics et les mosquées. "O frères, votez. Participez à la prise des décisions pour réaliser vos démarches quotidiennes rapidement", dit un candidat dans un encart publicitaire paru dans la presse. Il affirme avoir "participé au développement de l'économie nationale", citant notamment la création d'un groupe de sociétés immobilières et de location de voitures. PEU D'INSCRITS Mais tous les Saoudiens en âge de voter ne participent pas au scrutin. Dans la province de Riyad, seuls quelque 148 000 hommes - sur un total d'électeurs potentiels d'un peu plus de 400 000 selon les estimations - se sont inscrits sur les listes électorales. Les élections ont lieu en trois phases : le jeudi 10 février pour Riyad et sa province, où elles doivent s'achever à 17 heures (15 heures à Paris), le 3 mars dans les provinces de l'est et du sud-ouest, et enfin le 21 avril dans les provinces du nord et de l'ouest, où se trouvent La Mecque et Médine, les deux villes qui abritent les lieux saints de l'islam. Les femmes, qui représentent plus de 50 % de la population, sont interdites du scrutin en dépit des termes de la loi, qui stipule que tous les citoyens ayant 21 ans révolus - à l'exception des militaires - ont le droit de vote.