Mort de Rong Yiren
Mort Rong Yiren, le "capitaliste rouge" chinoisPorte-drapeau du capitalisme en Chine après l'épisode maoïste, ancien vice-président de la République populaire, Rong Yiren est mort de maladie, mercredi 26 octobre, ont rapporté les médias officiels chinois. Il était âgé de 89 ans.Sans jamais détenir une réelle influence politique au sein du régime communiste - il n'a jamais appartenu au parti -, Rong Yiren, héritier d'une grande famille bourgeoise de Shanghaï, a probablement fait plus d'émules en Chine que la plupart des idéologues qui règnent à Pékin. La quasi-totalité des magnats nouveaux riches que compte la République populaire de nos jours peuvent se retrouver dans son parcours, tout en souplesse d'alliance avec le régime dans l'intérêt bien compris des affaires.Né en 1916 dans une famille de minotiers et tisseurs de la ville de Wuxi, éduqué au collège huppé et chrétien de St. John's University à Shanghaï, il était à la tête d'une partie du patrimoine industriel familial, essentiellement dans le textile, quand les communistes de Mao Zedong prirent le pouvoir en 1949.La famille suivit l'exode des capitalistes chinois en direction de Hongkong, mais laissa sur place le jeune Yiren pour tenter un compromis avec le nouveau régime, qui réclamait le soutien des représentants de la "bourgeoisie nationale" pour reconstruire le pays.Manoeuvre qui s'amorçait convenablement dans les années 1950, en dépit des crispations déjà sensibles à l'encontre des intellectuels "bourgeois" ou des communistes critiques envers Mao.Rong est confortablement dédommagé de la nationalisation des firmes de la famille, promu vice-ministre de l'industrie textile en 1957, et restera dans le paysage politique, sans exercer de fonctions déterminantes, jusqu'à ce que le Parti communiste s'embarque dans l'aventure sanglante de la révolution culturelle. Sans être trop malmené physiquement, à la différence de bien des hiérarques, Rong perd le confort de sa vie de membre de la nomenklatura et voit ses collections d'art détruites.UNE FORTUNE IMMENSEMao mort et le pays calmé, Deng Xiaoping fait de Rong Yiren un nouveau "rôle modèle" pour la Chine du futur en lui confiant une sorte de magistère du retour à l'économie de marché sous le masque de la dictature du prolétariat.Rong Yiren, désormais "capitaliste rouge n° 1", fonde la China International Trust and Investment Corporation (Citic), firme financière dont la tour, édifiée à partir de 1979 près du centre de Pékin, va devenir le passage obligé des capitaux étrangers invités à s'investir dans une "nouvelle Chine nouvelle" décidée à rompre avec son passé de tourments en épousant le flux mondial des affaires.La Citic prospère alors, devient un empire tentaculaire qui sera la première instance économique chinoise à acheter de la terre... chinoise, à Hongkong, pour convaincre les capitales occidentales de la sincérité des garanties de Pékin sur l'avenir de la colonie britannique après sa rétrocession.A Pékin, l'institution et son siège seront par ironie surnommés "le ministère du capitalisme" - ce qui explique peut-être quelques rafales de fusil automatique tirées sur sa façade par une unité de l'armée communiste durant la répression du soulèvement pacifique de Tiananmen en 1989. Rong, il est vrai, avait appelé la direction du parti à négocier avec les étudiants en grève de la faim qui réclamaient plus de transparence politique et qui critiquaient les premières dérives affairistes du régime qu'il incarnait lui-même.On ne lui en voulut pas trop en haut lieu. Le régime, n'ayant plus d'autre solution que de lancer le pays sur la voie d'un capitalisme débridé - sa survie en dépendant -, le promut au poste honorifique de vice-président de l'Etat. Il prit finalement sa retraite en 1998, non sans avoir assuré à son fils Larry Yung, depuis la filiale de la Citic à Hongkong, la direction d'une fortune immense.