Mort de Roland Lew

Mort Roland Lew, sinologue et politiste passionné Sinologue, spécialiste du mouvement ouvrier international, Roland Lew est mort, mercredi 30 mars, à l'hôpital Saint-Louis de Paris, d'un cancer de la moelle osseuse. Né le 28 octobre 1944 à Lausanne, il avait fait ses études à Bruxelles. Militant des jeunesses socialistes, il s'était rapproché des trotskistes dirigés par l'économiste Ernest Mandel ; il restera toujours proche de la IVe Internationale et collaborateur de ses revues. Il appartint durant de longues années au comité de rédaction de la revue L'Homme et la société, et collabora également au Monde diplomatique. Étudiant en psychologie, mais déjà très intéressé par la Chine, il changea d'orientation en déposant en 1973 un sujet de thèse à l'École des hautes études de Paris sur le communisme en Chine. Professeur de sciences politiques à l'Université libre de Bruxelles mais domicilié en région parisienne, il fut un "passeur" entre la Belgique et la France. Outre une multitude d'articles dans les revues engagées ou savantes, il collabora à un ouvrage collectif : La Société chinoise après Mao (Fayard, 1986) et publia L'Intellectuel, l'Etat et la révolution, essai sur le communisme chinois et le socialisme réel (L'Harmattan, 1997). Il fut connu d'un public plus large par son livre 1949. Mao prend le pouvoir (Bruxelles, Complexes ; 2e éd. 1999) et son "Que sais-je" sur La Chine populaire (PUF, 1999). Pour lui, la trajectoire chinoise reproduit par son mouvement propre, sans imposition extérieure, l'itinéraire soviétique. Trouver une autre orientation est la tâche envisagée puis abandonnée par Mao et ses héritiers. C'est cet abandon qui les conduit à réinsérer la Chine dans l'économie mondiale capitaliste. "Le projet d'autoémancipation sociale qui fut au coeur du projet marxien n'était pas au rendez-vous du XXe siècle chinois", écrit-il. Tenté par le comparatisme, il essayait ces dernières années de confronter le thème de l'autoémancipation dans l'Europe du XIXe siècle, dans la Russie du début du XXe siècle et bien sûr en Chine. Il avait été un des maîtres d'oeuvre du Siècle des communismes (Editions de l'Atelier, 2000, réédité en 2004 au Seuil), apportant à l'équipe, au-delà de ses compétences de spécialiste, son goût du travail en commun et de l'échange. Car c'était un politiste passionné, jovial, amical et exigeant. Outre ses activités au Centre Chine de l'EHESS, il animait depuis huit ans un séminaire sur les "Communismes" au Centre d'histoire sociale avec Bruno Groppo, Jacques Girault, Bernard Pudal et moi-même. Depuis un an, ses activités étaient réduites en raison des opérations lourdes qu'il avait subies. La dernière fut un échec qu'il savait fatal.