Mort de Roger-Henri GuerrandL'historien Roger-Henri Guerrand
Mort Roger-Henri GuerrandL'historien Roger-Henri Guerrand, spécialiste de la vie quotidienne en milieu urbain, est mort à Rennes, mardi 10 octobre, à l'âge de 83 ans. Docteur en histoire, personnalité atypique dans le monde universitaire, il a publié trente-cinq ouvrages, une quarantaine de contributions dans des revues et catalogues d'expositions et plus d'une centaine d'articles.Né en 1923 à Sarrebruck, dans une famille catholique et militaire, Roger-Henri Guerrand garde paradoxalement de sa jeunesse une culture généreuse, une curiosité presque sans limites et un vif intérêt pour l'architecture, l'Art nouveau et Guimard en particulier (mais son premier ouvrage sur le métro parisien passera au pilon), doublé d'un vif agacement pour les convenances de l'Antiquité et, plus généralement, de tout ce qui à ses yeux pouvait sentir la naphtaline, l'hypocrisie, la pensée convenue.Membre de la jeunesse étudiante, étudiant en lettres, la guerre le laisse sans métier autre que celui de responsable du Comité parisien des oeuvres universitaires et de surveillant de lycée. Rompant avec les traditions familiales, Roger-Henri Guerrand s'engage pour "vingt ans d'enseignement dans des structures de formation professionnelle ou d'éducation populaire".Cela va lui laisser le temps de se passionner pour l'oeuvre de Paul-Henry Chombart de Lauwe, à commencer par Paris et l'agglomération parisienne, un ouvrage qui, dira-t-il à la revue Urbanisme, "rompait avec l'approche académique et abordait son sujet d'une manière transdisciplinaire".Roger-Henri Guerrand fera sienne la méthode en l'appliquant aux origines du logement social, d'abord dans une thèse (1966) qui deviendra bientôt un livre, Brève histoire du service social en France (Privat, 1976), puis dans Les Lieux, histoire des commodités (La Découverte, 1985), Cent ans d'habitat social : une utopie réaliste (Albin Michel, 1989), Le Confident des dames, le bidet du XVIIIe au XXe siècle (La Découverte, 1998).Si ni l'Université ni le CNRS ne veulent l'accueillir, Guerrand deviendra en revanche l'un des premiers enseignants de l'Unité pédagogique n° 8 (devenue Ecole d'architecture de Paris-Belleville), où il enseignera l'histoire de ce logement "populaire" ou "social", "que les anciens "chefs d'atelier", les Prix de Rome, ignoraient, eux qui ont construit les grands ensembles...".Resté professeur émérite à Paris-Belleville, Roger-Henri Guerrand avait obtenu en 1985 le Grand Prix national de la critique architecturale pour l'ensemble de son oeuvre. "Métropolitains", sur France Culture, lui avait consacré cinq émissions en 2002, abordant avec lui quelques-uns de ses thèmes de prédilection : l'architecture, la ville, l'hygiène et le corps, le sexe et la beauté.Roger-Henri Guerrand avait publié en 2005 A contre-voie. Mémoires de vie sociale (Infolio), où sa propre aventure rencontre avec constance son ironie et son érudition.