Concert Rock. L'allumé Anton Newcombe, révélé par le documentaire «Dig !», ce soir à la Cigale. Brian Jonestown Massacre, au taquet Brian Jonestown Massacre en concert (complet) ce soir à Paris, la Cigale, 120, bd Rochechouart, Paris XVIIIe, avec Seb Martel et Art Brut. «J e vois les choses différemment des autres, je crée mon propre univers. Donc, en ce sens, je suis divin. J'ai ma propre réalité et, lorsqu'elle s'oppose à celle des autres, alors je m'accommode des conséquences. Je suis un individu à part entière, et si quelqu'un m'emmerde je réagis. J'ai 38 ans et rien n'a pu me vaincre jusqu'à présent. Sinon, vous seriez en train de parler avec un mort.» Attablé dans un pauvre troquet de la banlieue parisienne, Anton Newcombe, le leader messianique du groupe américain Brian Jonestown Massacre, figure centrale perturbée du documentaire acclamé Dig !, sorti en France l'an dernier, détaille sa philosophie en alternant gorgées de vin et de bière. A ses côtés gît son groupe, visiblement épuisé. Personne n'a envie de se prêter au jeu de l'interview, en particulier Newcombe, qui prévient d'emblée : «On ne veut pas faire ça. C'est pénible, et ça ne sert à rien : je n'ai rien à vendre.» Ce qui ne l'empêchera pas de parler non-stop pendant près d'une heure. Parfois, on a du mal à comprendre ce qu'il dit. En réponse à une simple question sur le répertoire actuel du groupe, il se met à citer avec entrain d'obscurs passages de contes d'Andersen. Guérilla. Anton Newcombe se considère à l'évidence comme un illuminé et fait montre d'une assurance captivante pour l'observateur. Grand et musclé, beau malgré une barbe grise de trois jours, il porte un couvre-chef à la Sherlock Holmes (un cadeau de Will Sargeant, d'Echo & The Bunnymen) et s'empresse de relever son sweater afin d'exhiber les tatouages ornant son torse des insignes des mafias japonaise, russe et italienne. A l'instar de ces organisations criminelles, il semble fier de son statut d'outsider hors la loi. Lui et ses potes se définissent souvent comme des rockeurs en guérilla. «Nous sommes des révolutionnaires, précise-t-il, parce que nous jouons partout de par le monde sans support médiatique, quel qu'il soit. Nous n'avons même pas de roadies. Je ne fais pas de la musique pour me taper des filles, mais pour exprimer mes sentiments, même s'ils sont dingues.» Anton Newcombe déteste tout un tas de trucs. «Je hais la culture urbaine contemporaine», déclare-t-il. Comme le rap ? Non, tout. Y compris Neil Young («Comment ose-t-il critiquer l'Amérique, ce putain de Canadien ?») et surtout Dig !, le film remarquable qui, racontant l'ascension des Dandy Warhols et, en parallèle, la galère du Brian Jonestown Massacre, l'a pourtant catapulté du statut de figure culte mineure à celui de vedette à la Pete Doherty. Dans Dig !, on le voit à la fin des années 90 se battre sur scène avec les membres de son groupe et subir, à force d'abus de drogue, une impressionnante désagrégration de l'ego qui le rend fou et l'envoie finalement en prison. Selon Newcombe, tout cela est «exagéré». Toutefois, il ajoute immédiatement : «Je n'ai pas visionné le film en entier. Seulement quelques passages chez un avocat.» Il ne voit néanmoins aucun problème à palper l'argent relatif au film (et à ses ventes en DVD), dont il déclare d'ailleurs fièrement détenir 25 % des droits. Esprit dérangé. Huit albums de BJM datant des années 90 viennent d'être réédités à l'occasion de la tournée européenne du groupe. Methedrine est le meilleur un superbe mélange de rock psyché-transe à la Pretty Things circa SF Sorrow et de noise années 80 façon My Bloody Valentine. La double compilation Tepid Peppermint Wonderland s'avère également judicieuse, en ce qu'elle expose le spectre complet de l'esprit créatif, dérangé mais prolifique, de Newcombe. Dig ! était diffusé mercredi dernier sur Canal +. Au grand dam de Newcombe, qui prévient quiconque viendra ce soir dans l'idée de provoquer un esclandre, comme dans le film : «Si quelqu'un décide de me balancer des trucs, on sera dix sur scène plus la sécurité armés de pieds de micro et de guitares. Ce sera comme essayer de déclencher une baston avec des Hells Angels.»