Mort de René Küss

Mort René Küss, pionnier de la greffe de rein Chirurgien urologique et l'un des pionniers mondiaux de la pratique de la greffe du rein, le professeur René Küss est mort à Paris, mardi 20 juin, à l'âge de 93 ans. Né le 3 mai 1913 à Paris, René Küss fait ses études au lycée Jeanson-de-Sailly puis à la faculté de médecine de Paris. Nommé chirurgien des hôpitaux de la capitale en 1950, il poursuit sa spécialisation en urologie. En 1964, il est nommé professeur à la faculté de médecine de Paris, puis professeur de clinique urologique du groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière. Le professeur Küss a consacré une large partie de sa carrière à la pratique de la greffe de rein chez l'homme. Ses travaux ont notamment porté sur la mise au point de la technique chirurgicale. Il a aussi été le premier à obtenir une survie prolongée chez un malade greffé avec un organe prélevé chez une personne non apparentée. Après de nombreuses expérimentations chez l'animal, il réalise en janvier 1951 cinq transplantations rénales, les reins provenant de personnes décédées ou non, le rein sain étant alors enlevé pour des raisons thérapeutiques. A l'époque l'immunologie est encore balbutiante et l'équipe chirurgicale n'obtient que des échecs avec rejets précoces. Les autres équipes parisiennes engagées dans cette aventure n'obtiennent pas de meilleurs résultats. A leur manière ces échecs confirment les observations faites par Alexis Carrel au début du siècle et qui lui valurent le prix Nobel de médecine et de physiologie. Ces premières tentatives permettent à René Küss de codifier une technique opératoire qui sera bientôt universellement adoptée. A la fin des années 1950, le recours à l'irradiation totale du receveur pour réduire la réaction immunitaire de son organisme permet à John Murray (Boston) de réaliser avec succès une greffe entre faux jumeaux. En janvier 1960, le professeur Küss choisit de créer une équipe de transplantation pluridisciplinaire composée de personnalités brillantes qui réalisera bientôt trois transplantations rénales dont l'une entre frère et soeur non jumeaux et les deux autres en dehors de tout lien de parenté. Les durées de survie dépassent alors trois mois, durant lesquels on observe le rétablissement de la fonction rénale. Ce résultat, que l'on pourrait aujourd'hui qualifier de modeste, ouvre en réalité la voie, grâce au recours à des médicaments immunosuppresseurs, à la pratique de la greffe de rein qui, avec la greffe cardiaque, constitue depuis plus d'un quart de siècle l'un des succès les plus éclatants de la chirurgie et de l'immunologie. René Küss a d'autre part travaillé au développement de différents domaines de sa discipline et notamment de la chirurgie plastique et réparatrice de l'appareil urinaire. Chirurgien remarquable, doté d'un grand sens de l'humour et de l'ironie, d'une profonde humanité, il manifestait aussi une grande indépendance d'esprit. Ce fut notamment le cas en 1996 lorsqu'il fut l'un des rares à s'élever contre une campagne visant à retirer le nom d'Alexis Carrel du fronton de la faculté de médecine de Lyon. Rappelant la somme des travaux médicaux et scientifiques de son prédécesseur, il dénonçait alors avec force la légèreté et le caractère arbitraire des accusations rétrospectives de collaboration visant le médecin français lauréat du prix Nobel 1912.