Annonce RELIGION Cet événement exceptionnel s'inscrit dans la dynamique de renouveau des grands pèlerinages populaires Le Puy-en-Velay donne le coup d'envoi des célébrations du Jubilé 2005 Ce jeudi saint, qui commémore le dernier repas du Christ avec les disciples, l'église catholique du Puy-en-Velay (Haute-Loire) ouvre solennellement une période de Jubilé qui s'étendra jusqu'au 15 août. Ce pèlerinage, auquel devraient participer des centaines de milliers de fidèles, connaîtra un point d'orgue à la fin juillet, lors des fêtes de Saint-Jacques-de-Compostelle. Dans la ville du Puy, il y a des lentilles, de la dentelle et des coquilles Saint-Jacques, route de Compostelle oblige. Des amateurs de la Renaissance viennent aussi chaque année, en septembre, élire «le roi de l'oiseau» au milieu de festivités costumées. Mais en matière de spécialités locales, la capitale de la Haute-Loire possède aussi son Jubilé, beaucoup plus rare. Le calendrier et les catholiques ne le proposent que deux ou trois fois par siècle, lorsque le vendredi saint coïncide avec la fête de l'Annonciation. C'est le cas cette année, bien que pour des raisons liturgiques (afin de les célébrer chacune), cette deuxième fête ait été repoussée au 4 avril. Il faudra ensuite attendre 2016, puis 2157. Autant dire que cette date du 25 mars, qui associe l'annonce de la naissance du Christ et sa mort, est célébrée avec un soin particulier. Le dernier Jubilé du Puy-en-Velay remonte à 1932. À l'époque, il était connu sous le nom de «grand pardon». Plus de 300 000 personnes avaient escaladé les rues escarpées de la vieille ville du XVIe siècle pour rejoindre la cathédrale. Le pèlerinage ne durait alors qu'une quinzaine de jours. Cette année, l'évêque du lieu, Mgr Henri Brincard, a décidé de prendre le temps jusqu'en août. Des centaines de bénévoles se relaieront pour accueillir les fidèles tout au long des 145 jours. L'évêque pressent que cet événement sera un succès car il se situe dans la dynamique du renouveau des pèlerinages populaires traditionnels, mais aussi parce que la «ville sanctuaire» du Puy est déjà une destination très fréquentée. Elle a accueilli 700 000 visiteurs en 2004. Le sanctuaire marial a aussi connu son essor grâce aux pèlerins de Saint-Jacques. Au cours de l'histoire, il est devenu un point de départ de la route et un point de passage si l'on part de Genève. Chaque année depuis dix ans, le nombre de marcheurs augmente dans des proportions exceptionnelles. De quelques centaines, ils étaient près de 30 000 l'an dernier, dont plus de 7 000 ont assisté à la messe «d'envoi» en pèlerinage célébrée à 7 heures à la cathédrale, du 1er avril au 1er octobre. Auguste Rivet, secrétaire général du centre culturel départemental, avait une dizaine d'années lors du dernier Jubilé, en 1932. Il évoque les arcs de triomphe dans les rues et l'enthousiasme populaire. Comme historien, il a appris que cette année-là avait aussi été celle «d'une détente dans les relations entre l'Église et l'État». Deux autres jubilés avaient eu lieu auparavant au XXe siècle : en 1910 et 1921. «Le Jubilé de 1910 a eu lieu quatre ans après les inventaires des biens de l'Église, marqués par des émeutes contre ceux qui voulaient porter une main profane sur les tabernacles.» Lors du Jubilé, la procession ne fut pas autorisée. «En 1921, poursuit M. Rivet, la situation reste tendue mais les commerçants observent que le tourisme se développe. Une procession prend le départ.» Cent ans après la loi de séparation de l'Église et de l'État, le Jubilé reste un sujet délicat. La mairie socialiste se contente de le tolérer, parce qu'elle le considère comme une «possibilité de développement touristique». Ce soir, comme chaque jeudi saint, la confrérie des «pénitents blancs» arpentera les rues à la lumière des flambeaux, derrière la Vierge Noire, suivie de milliers de personnes.
