Annonce Qui doit contrôler internet ? Depuis 1998, l'internet est contrôlé par un organisme américain, l'Icann. Certains, en particulier les Européens, aimeraient que cette fonction soit jouée par un organisme international. Ce débat sera au coeur du prochain Sommet mondial sur la société de l'information, qui s'ouvre mercredi à Tunis. Créé le 14 novembre 2005 Mis à jour le 14 novembre 2005 à 11h43 PUBLICITE Le Sommet mondial sur la société de l'information (SMSI), qui s'ouvre mercredi à Tunis, risque de donner lieu à un affrontement à propos du contrôle de l'internet, que les Etats-Unis refusent de partager avec le reste du monde. Les ambassadeurs de 170 pays étaient engagés depuis dimanche dans d'ultimes tractations autour de ce thème, sans garantie de pouvoir conclure leurs travaux avant le début mercredi du sommet, qui vise à résorber la fracture numérique entre pays riches et pays pauvres. L'Icann règne depuis 1998 Le contrôle de l'internet relève à ce jour d'une entité américaine privée, l'Icann, qui attribue les noms de domaine tels que .com ou .fr. Une majorité de pays, dont l'Union européenne, cherche à mettre en place une supervision internationale de l'Icann, qui est actuellement chapeautée par l'administration américaine. "L'Internet Corporation for Assigned Names and Numbers", dont le siège se trouve en Californie, a été désignée pour cette mission en 1998 après un appel d'offre du gouvernement des Etats-Unis, berceau de l'internet. Ses opposants redoutent que l'organisme puisse par exemple être en mesure de bloquer les adresses d'un pays entier pour des raisons économiques, militaires ou politiques. Washington fait valoir qu'un changement du statu quo pourrait donner un droit de regard sur le fonctionnement du réseau des réseaux à des pays qui répriment la liberté d'expression sur le net. Le mauvais exemple de Yahoo! Tout en jugeant critiquable la mainmise américaine, Reporters sans frontières (RSF) estime aussi que la situation actuelle est préférable à un transfert des prérogatives de l'Icann à l'Onu, où "les pays les plus répressifs de la planète" ont autant de poids que les Etats démocratiques. "Souhaite-t-on vraiment que les pays qui censurent le net et emprisonnent les internautes se mettent à réguler la circulation de l'information sur le réseau ?" s'insurge l'association de défense des journalistes. Ces craintes sont rejetées par les Européens, qui soulignent que le système actuel n'empêche pas des opérateurs privés de "collaborer" avec des régimes répressifs. En Chine, le portail américain Yahoo a ainsi récemment communiqué aux autorités les coordonnées d'un cyber-dissident, rappelle un diplomate. Les détracteurs de l'Icann ajoutent que cet organisme, proche des milieux d'affaires, pourrait être en butte à des conflits d'intérêt lorsqu'il s'agit de choisir certaines technologies, et donc certaines entreprises, nécessaires pour le fonctionnement du net. Le risque d'une balkanisation Outre les Etats-Unis qui ne veulent rien changer, sept propositions sont sur la table à Tunis, dont une de l'Iran, soutenu par plusieurs grands pays en développement, qui souhaite la mise en place d'un organisme onusien pour superviser l'Icann. L'UE a déposé une formule de compromis visant à supprimer le contrôle politique de l'administration américaine sur l'Icann et à le remplacer, après une période de transition, par un organe inter-gouvernemental purement technique et séparé du cadre de l'Onu. Bruxelles suggère aussi de créer un "forum" permanent pour discuter du contrôle de l'internet, avec la participation du secteur privé et des associations. Faute d'accord à Tunis, certains pays ou régions du monde pourraient être tentés de créer leur propre réseau concurrent, au risque de déboucher sur une "balkanisation" de l'internet, redoutent des experts, qui rappellent que tout l'intérêt de la toile réside dans son universalité.