Annonce PSA-Peugeot-Citroën reçoit le premier label Egalité professionnelle L'entreprise avait conclu, le 4 novembre 2003, un accord avec six organisations syndicales pour développer et améliorer l'emploi féminin. Elle est la première à recevoir cette distinction créée par le ministère de la parité pour mettre en valeur des "pratiques exemplaires".Le premier label Egalité, qui récompense les efforts en matière d'égalité professionnelle, a été récemment décerné par le ministère de la parité et de l'égalité professionnelle à une entreprise centenaire que l'on associe plus aisément à l'histoire ouvrière qu'à la féminisation du monde du travail, PSA-Peugeot-Citroën. "Traditionnellement, l'industrie automobile est une industrie masculine, reconnaît le directeur des relations et des ressources humaines, Jean-Luc Vergne. Certains postes, notamment dans les fonderies ou dans les forges, sont pénibles, et le travail de nuit, qui est souvent la règle dans nos ateliers, a longtemps été interdit aux femmes. Aujourd'hui encore, le système éducatif n'oriente pas ou peu les filles vers les filières techniques ou les écoles d'ingénieurs."Parce que la mixité est censée "améliorer les échanges, les visions et la créativité", PSA-Peugeot-Citroën a signé, le 4 novembre 2003, un accord sur l'égalité professionnelle hommes-femmes avec six organisations syndicales : la CFDT, la CGC, la CFTC, la CGT, FO et GSEA. "Peugeot-Citroën automobiles reconnaît dans la mixité professionnelle une source de complémentarité, d'équilibre social et d'efficacité économique", proclame ce texte.En recrutant des femmes, l'entreprise cherche également à pallier le départ massif des baby-boomers : des générations entières d'ouvriers nés dans l'après-guerre quitteront PSA à partir de 2008, lorsqu'ils atteindront l'âge de la retraite.Féminisation des recrutements, efforts en faveur de l'égalité salariale ou équilibre des promotions : l'accord tente de transformer en profondeur une culture qui laissait jusqu'ici peu de place à la parité. En 2000, sur les 85 400 salariés du groupe, 13 300, soit 15,6 % seulement, étaient des femmes. "Avant la signature de cet accord, nous avions tous les ans, au comité d'entreprise, un rapport sur l'égalité hommes-femmes qui faisait apparaître des discriminations mais nous en restions au simple constat, se souvient Joël Moreau, membre du comité de groupe européen pour la CGT. Aujourd'hui, nous sommes passés à la pratique : nous tentons de gommer les inégalités."L'accord prévoit mille et un systèmes destinés à promouvoir les femmes. Pour le recrutement des cadres, techniciens, agents de maîtrise et agents administratifs et commerciaux, il impose par exemple que la part des femmes embauchées "reflète" leur part dans les candidatures.Pour les ouvrières, le casse-tête est plus complexe car certains postes, notamment dans les ateliers de ferrage et d'emboutissage, sont difficiles : il faut manier des charges lourdes ou tenir des heures durant dans des postures douloureuses, les bras levés ou le dos courbé. "Chaque établissement, indique donc l'accord de 2003, identifiera les postes et métiers encore mal adaptés au personnel féminin" afin de les transformer.Depuis, les 66 ergonomes du groupe tentent de diminuer le nombre de postes "lourds". "Sur les lignes de montage, nous avons installé pour la pose des roues, qui pèsent 20 à 25 kg, des manipulateurs, c'est-à-dire des appareils hydrauliques qui soulèvent les charges, explique M. Vergne, de la direction des relations et des ressources humaines. Nous essayons aussi de développer les "postes embarqués", qui permettent aux ouvriers de travailler sur un tapis roulant qui suit la voiture pendant le montage. Cela évite les piétinements épuisants. Du coup, ces postes peuvent être tenus par des femmes."De 1999 à 2004, la part des postes "lourds" a baissé, passant de 35 % à 19 %. Pendant la même période, celle des postes "légers", qui peuvent être occupés indifféremment par des hommes ou des femmes, a augmenté, passant de 26 % à 37 %. "Dans les ateliers, les postes ont été améliorés, surtout là où PSA-Peugeot-Citroën fabrique de nouveaux produits, reconnaît Vincent Botazzi, délégué syndical central de la CFDT. S'il se poursuit, cet effort est une bonne nouvelle pour les conditions de travail en général, pour les hommes comme pour les femmes. Les postes sont moins épuisants et l'outillage est mieux adapté. En revanche, les cadences se sont accélérées, provoquant une intensification des rythmes de travail, qui reste l'une de nos grandes préoccupations."La présence d'ouvrières dans les ateliers a également imposé des aménagements de locaux : à l'usine de Valenciennes, la surface des vestiaires féminins a été augmentée de 30 %. "Il y a beaucoup d'avancées mais ce ne sont encore que des balbutiements, affirme Joël Moreau pour la CGT. Sur les chaînes de montage, certaines charges, par exemple, restent difficiles à soulever. Ailleurs, ce sont les visseuses qui ne sont pas adaptées et qui donnent des tendinites au poignet. Il faut que les comités d'hygiène et de sécurité soient plus étroitement associés à l'amélioration des postes."La politique de féminisation menée par PSA-Peugeot-Citroën a porté ses fruits : sur la seule année 2004, le nombre de femmes a augmenté de près de 10 %, passant de 13 000 à 14 500. Cette progression a touché tous les métiers de l'entreprise, mais surtout les ouvriers : de 1999 à 2004, la part des femmes dans les recrutements en ateliers a quadruplé, passant de 7,3 % à près de... 30 %. Des univers jadis masculins, comme le métier de cariste ou la maintenance, se sont peu à peu féminisés : dans l'usine de Sochaux, à l'atelier de montage, les femmes représentaient en 2004 40 % des embauches de caristes.En matière de recrutements, l'équilibre hommes-femmes imposé par l'accord a été respecté uniquement pour les métiers techniques : dans ce secteur, l'entreprise a retenu 19 % de femmes dans les embauches pour 19 % de femmes dans les candidatures.Pour les promotions, un effort a également été réalisé, même s'il porte encore sur de très faibles effectifs : de 1999 à 2004, le nombre d'ouvrières promues employées, techniciennes ou agents de maîtrise (ETAM) a plus que doublé, passant de 23 à 53, tandis que le nombre d'ETAM devenues cadres passait de 24 à 56.Pour les salaires, l'accord prévoyait que "la répartition des augmentations individuelles" serait "équilibrée au sein de l'entreprise". Chez les cadres, un effort a été réalisé - 57 % des femmes cadres ont perçu une augmentation supérieure à la moyenne, contre 49 % des hommes -, mais les ouvrières, les employées, les techniciennes et les agents de maîtrise restent en retard : en 2004, 43 % d'entre elles ont été augmentées ou promues, contre 46 % des hommes. "Nous avons du mal à revenir sur le passé, résume Vincent Botazzi pour la CFDT. Il faudrait des mesures correctrices en faveur des femmes, mais aucune enveloppe n'a été prévue pour que les salaires des anciennes, celles qui ont plus de 50 ans, rattrapent enfin ceux des hommes."Cette politique de féminisation bute sur un problème de formation : peu de jeunes filles décident de s'engager dans des filières techniques. L'accord prévoyait donc de multiples passerelles avec l'éducation nationale, afin de "maintenir une bonne polyvalence permettant l'accès des femmes au plus grand nombre de postes, et en particulier à des postes qualifiants".A Mulhouse, Peugeot a ainsi recruté en 2004 16 apprentis, dont 7 femmes, pour leur apprendre des métiers du génie mécanique, de la productique et de l'informatique industrielle. A Trémery, le site a organisé avec l'éducation nationale des "journées métiers" afin d'orienter plus de filles vers les métiers de l'automobile.Anne CheminUne distinction pour l'"exemplarité"Créé en 2004 par Nicole Ameline, ministre de la parité et de l'égalité professionnelle, le label Egalité, dont PSA-Peugeot-Citroën est l'un des premiers lauréats, encourage "l'exemplarité des entreprises, associations et administrations qui se sont engagées résolument sur la voie de l'égalité professionnelle". Délivré pour trois ans, le label est décerné par un organisme de certification, l'AFAQ Afnor Certification, après avis d'une commission composée de cinq représentants de l'Etat, cinq des syndicats salariés et cinq des organisations patronales. Pour obtenir le label, les candidats doivent avoir sensibilisé les dirigeants et les salariés à la mixité et à l'égalité, signé un accord sur l'égalité professionnelle, établi des objectifs de progression sur l'emploi et la formation des femmes, et "mené une politique tendant à la mixité dans les instances de décision". Le label a pour ambition, selon Nicole Ameline, de "mettre en valeur des pratiques exemplaires".
