Annonce Première condamnation en justice pour Google NewsLe tribunal de première instance de Bruxelles a rendu, le 5 septembre, une ordonnance exigeant le retrait des articles des journaux belges francophones (Le Soir, La Libre Belgique, La Dernière Heure, etc.) du site Internet Google News Belgique. Cette revue de presse en temps réel devait ainsi être expurgée, dès lundi 18 septembre, de tout lien vers les sites Internet des journaux en question, regroupés au sein de l'association Journaux francophones belges (JFB), et représentés par la société de gestion des droits d'auteurs Copiepresse. A défaut, Google s'expose à une pénalité de 1 million d'euros par jour. La société américaine devait publier le texte intégral du jugement sur son site belge (google. be), sous peine d'une astreinte supplémentaire quotidienne de 500 000 euros.Lundi 18 septembre, la majorité des titres concernés avaient disparu du site, mais le texte du jugement n'avait pas été publié. Google a annoncé son intention de faire appel du jugement.Deux arguments fondent ce dernier, analyse Cédric Manara, professeur de droit à l'Edhec : "D'abord, Google copie le contenu des articles sur ses serveurs pour les analyser, les indexer et en extraire du sens et cette copie ne bénéficie pas de l'exception pour copie privée, explique-t-il. Ensuite, le fait qu'il y ait une extraction systématique de toutes les informations qui se trouvent sur les sites de presse est une infraction au droit des bases de données - puisque les sites de presse peuvent être juridiquement qualifiés comme tels."L'action en justice a été introduite en mars, mais "ce n'est que le 15 septembre que Google nous a contactés par l'intermédiaire d'un avocat, qui tenait à éviter, nous disait-il, toute publicité autour de cette affaire", souligne Margaret Boribon, secrétaire générale de JFB. Selon Rachel Whetstone, porte-parole de Google pour l'Europe, la société américaine n'a pas reçu l'assignation en justice, seulement le jugement.Comme ceux des Pays-Bas, les journaux belges flamands, à une exception près, s'étaient contentés de demander à Google de cesser de les référencer sur son site, ce que la société avait fait sans rechigner. "Pour ne plus être présent dans Google News, il suffit de nous le notifier", confirme Mme Whetstone. Ce faisant, le journal se prive d'un outil très efficace de notoriété et de recrutement de lecteurs potentiels.DROITS D'AUTEURUne sorte de chantage que rejette JFB : "En agissant de la sorte, on admet en fait le raisonnement de Google, souligne Mme Boribon. Si l'on n'est pas d'accord avec ses pratiques, on doit le dire. Or elles sont contraires aux dispositions belges et européennes sur la protection des contenus, qui imposent le paiement de droits d'auteur lors de toute reprise d'articles."Google réfute cette lecture des faits. "Le jugement précise que nous spolions une part des ressources publicitaires de ces journaux, mais cela est inexact puisqu'il n'y a pas de publicité sur Google News, dit Mme Whetstone. La seule chose que nous faisons, c'est organiser l'information et susciter énormément de trafic vers les sites ; or la publicité qui est diffusée par ces sites est fonction de leur audience !"La décision belge va-t-elle faire des émules ? L'Association flamande de la presse quotidienne (VDP) pourrait à son tour passer à l'offensive. Et l'Association des éditeurs européens de journaux (ENPA), réunie lundi 18 septembre à Oslo, examinait avec attention le jugement. Certains de ses membres n'excluent pas de saisir à leur tour la justice dans leur pays."Les droits belge et français sont très proches sur ces questions puisqu'ils ont été harmonisés par plusieurs directives européennes, précise M. Manara. Les fondements utilisés par le juge dans cette affaire pourraient être valables dans le droit français." Une démarche concertée est cependant jugée peu probable par Philippe Jannet, président du Geste (Groupement des éditeurs de services en ligne). Si les sites de presse qui ont une forte audience voient dans Google un concurrent, les autres en font un moyen de conquérir de nouveaux internautes.
