Scandale Pétrole contre nourriture" : le Congrès américain réunit des éléments contre Charles Pasqua Une commission sénatoriale américaine enquêtant sur le programme onusien "Pétrole contre nourriture" a publié, jeudi 12 mai, des pièces à conviction contre l'ex-ministre français Charles Pasqua et le député britannique George Galloway, accusés d'avoir touché des pots-de-vin irakiens. "Ces preuves montrent que M. Pasqua a tenté de cacher ses activités pour 'raisons politiques' " et parce qu'il "craignait des scandales". Les enquêteurs de la commission sénatoriale américaine, qui travaillent sur ce scandale du programme onusien "Pétrole contre nourriture" ont réuni des documents irakiens portant le nom de l'ancien ministre français Charles Pasqua. Ceux-ci tendent en effet à prouver que ce dernier aurait bénéficié de pots-de-vin du régime de Saddam Hussein. L'ancien ministre de l'intérieur a "démenti" jeudi dans un communiqué avoir perçu des pots-de-vin irakiens dans les années 90. CRAINTE DE SCANDALES POLITIQUES Dans plusieurs de ces documents - dont des fac-similés en arabes ont été communiqués par mail, accompagnés de traductions en anglais - figure une lettre signée de Saddam Zeben Hassan, directeur de l'organisme de commercialisation du pétrole (SOMO) et adressée au ministre du pétrole, datée du 17 juin 1999. Ce courrier indique, selon sa traduction en anglais, que "le président (Saddam Hussein) a approuvé l'octroi de 3 millions de barils à la personnalité française (Charles Pasqua)". Cette lettre fait également état d'un désaccord entre Irakiens et Français sur les modalités d'octroi de ces bons d'achat, et un proche de M. Pasqua, Bernard Guillet, est cité comme faisant état d'une crainte de "scandales politiques". Parmi plusieurs documents à en-tête du bureau du ministre du pétrole, un tableau daté du 17 décembre 1999 indique que "4 millions de barils" de bons d'achat de pétrole irakien sont accordés à Charles Pasqua durant la phase 6 du programme "Pétrole contre nourriture" (deuxième semestre 1999), et 3 millions au-delà. Le nom de l'actuel sénateur des Hauts-de-Seine figure également sur un document daté de janvier 2000, faisant état des 3 millions de barils accordés durant la phase 7 du programme, tandis qu'un document daté du 21 septembre 2000, portant également la mention de M. Pasqua, fait état de l'octroi de 4 millions de baril durant la phase 8 de "Pétrole contre nourriture",. PLUSIEURS MILLIARDS DE DOLLARS DÉTOURNÉS Dans ce dossier, une autre personnalité du monde politique, anglaise celle-ci, est mise en cause. Le député dissident du Labour George Galloway, très opposé à la guerre en Irak de 2003 et réélu la semaine dernière, aurait quant à lui perçu quelque 20 millions de bons d'achat de barils de pétrole. Déjà attaqué dans cette affaire, il avait d'ailleurs remporté, en décembre 2004, un procès en diffamation contre le quotidien Daily Telegraph à ce sujet. M. Guillet, un proche de Charles Pasqua, a pour sa part été mis en examen, le 28 avril, par la justice française, dans le cadre de cette affaire. M. Pasqua a quant à lui nié toute implication. Plusieurs dizaines de pages de photocopies de documents et de transcriptions d'entretiens conduits par les employés de la commission avec des personnalités irakiennes viennent pourtant illustrer les accusations contre MM. Pasqua et Galloway, qui les ont démenties à plusieurs reprises. Par ailleurs, la sous-commission parlementaire qui vient de publier ces documents, présidée par le républicain Norm Coleman, réclame depuis fin novembre par la voix de son président, la démission du secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, pour n'avoir pas su gérer "Pétrole contre nourriture". Ce programme, entré en vigueur de décembre 1996 à novembre 2003 pour atténuer l'impact des sanctions internationales pour la population irakienne, aurait permis au régime de Saddam Hussein de détourner plusieurs milliards de dollars. Selon les critiques, Saddam Hussein avait en effet offert des bons d'achat de pétrole en pots-de-vin à des centaines de responsables de différents pays, notamment dans l'espoir d'obtenir la fin des sanctions contre son pays. L'ONU a de son côté chargé une commission d'enquête indépendante, présidée par Paul Volcker, de tirer au clair cette affaire.