Mort de Peter Glotz

Mort Peter Glotz, le théoricien d'une social-démocratie rénovée Ancien secrétaire général du Parti social-démocrate allemand et ancien professeur de communication à l'université de Saint-Gall (Suisse), Peter Glotz est mort, jeudi 25 août à Zurich. Il était âgé de 66 ans. Ces dernières années, Peter Glotz avait renoué avec son histoire personnelle. Il était né le 6 mars 1939 en Bohème, d'un père allemand et d'une mère tchèque et avait dû fuir en 1945 le pays des Sudètes pour s'installer en Bavière. Cette expérience l'avait poussé à accepter la coprésidence de la fondation pour la création, à Berlin, d'un centre contre les expulsions, au grand dam de la plupart de ses amis sociaux-démocrates et face à l'hostilité des voisins de l'Allemagne qui voient dans cette entreprise la marque du "revanchisme". Rien n'était pourtant plus étranger à cet adversaire constant de tout nationalisme. Mais Peter Glotz était avant tout un non-conformiste qui n'hésitait pas à penser contre le courant. A plusieurs reprises au cours de sa carrière universitaire et politique (il fut pendant plus de vingt ans député au Bundestag où il représentait la Bavière), il eut l'occasionde le montrer. En tant que sénateur pour la science et la recherche de la ville de Berlin-Ouest, de 1977 à 1981, il fut un des premiers hommes politiques à renouer le dialogue rompu avec les étudiants depuis la révolte de 1968. Il créa le Collège scientifique où il contribue à faire connaître en Allemagne Jacques Derrida, Pierre Bourdieu ou encore André Gorz. Secrétaire général du Parti social-démocrate (SPD), de 1981 à 1987, sous la présidence de Willy Brandt, il s'efforça de moderniser l'organisation, de dépoussiérer la doctrine et de donner de nouvelles impulsions. Sans grand succès, puisque le parti perdait systématiquement les élections. Mais c'était l'occasion pour ce théoricien de s'interroger sur les échecs de la gauche quand la droite, notamment américaine sous la direction de Reagan, dominait la scène. Après la réunification allemande, il fut pendant quelques années recteur-fondateur de la nouvelle université d'Erfurt, où il développa particulièrement les départements de philosophie et de science politique. De 2000 à 2004, il fut professeur associé à l'Institut de gestion des médias et de la communication à l'université de Saint-Gall. En 2002, il fut nommé à la Convention pour la réforme de l'Union européenne comme représentant du gouvernement allemand. Au bout de quelques mois, il dut céder sa place au ministre des affaires étrangères, Joschka Fischer. Peter Glotz n'a cessé de plaider pour le renouveau de la social-démocratie qui ne se juge pas, disait-il, "en fonction des rembour sements des frais dentaires". Il admirait Tony Blair, en particulier pour avoir mis au pas les tendances d'extrême gauche au sein du Labour, alors que lui-même s'était affronté aux Jeunes socialistes quand il dirigeait le SPD. Interrogé en 2004 par Le Monde sur la crise de la social-démocratie européenne, Peter Glotz répondait : "Au pouvoir la gauche doit faire souvent les réformes que la droite n'a pas faites. Mais quand elle retourne dans l'opposition, elle a tendance à redevenir dogmatique... C'est une grande faiblesse. Que le SPD, dans l'opposition, ait qualifié le moindre changement dans l'Etat-providence, de redistribution du bas vers le haut, de crime contre l'Etat social, a créé par-là même le pathos avec lequel les partisans du SPD l'attaquent aujourd'hui, en l'accusant de trahison." Sa remarque ne valait pas seulement pour les socialistes allemands.