Mort de Patrick Caulfield
Mort Patrick Caulfield, figure majeure du pop artLe peintre britannique Patrick Caulfield, figure majeure et très singulière du pop art, est mort des suites d'un cancer, jeudi 29 septembre, à Londres. Il était âgé de 69 ans.Né à Londres le 29 janvier 1936 dans une famille ouvrière, Patrick Caulfield ne peut se consacrer à des études artistiques qu'à partir de 1956, après avoir quitté l'école dès 15 ans, avoir connu l'usine et servi dans la Royal Air Force. Admis à la Chelsea School of Art, il se perfectionne dans les techniques graphiques avant d'aborder la peinture. En 1960, il est admis au Royal College of Arts : c'est un an tout juste après qu'y est entré le groupe que forment alors David Hockney, Allen Jones, Derek Boshier et d'autres jeunes artistes, que l'on n'appelle pas encore "pop", mais qui ont d'ores et déjà pris leurs distances par rapport à l'esthétique dominante, l'expressionnisme abstrait américain.Dès ses premières participations à des manifestations collectives en 1961 et 1962, Caulfield se place de leur côté : dans un style d'une apparente simplicité, peignant par aplats de couleurs opposées, il prend pour motifs tantôt des objets de la quotidienne banalité - une bague de fiançailles, un poêle, des pichets -, tantôt des chefs-d'oeuvre des musées, qu'il réinterprète en les épurant et en les attirant vers l'affiche ou la bande dessinée. C'est ce traitement qu'il fait subir dès 1963 à La Grèce expirant sur les ruines de Missolonghi, de Delacroix. Il est alors en phase tant avec ses contemporains américains - Roy Lichtenstein, Andy Warhol - qu'avec Martial Raysse en France et qu'avec ses ex-condisciples de la Royal Academy.Dans la décennie suivante, tout en construisant son oeuvre et en présentant ses premières expositions personnelles à Londres et à New York, Patrick Caulfield demeure fidèle aux principes qu'il s'est donnés à ses débuts. Les natures mortes aux objets ordinaires, les paysages urbains de cheminées et les intérieurs modernes sont réduits à des dispositifs linéaires où synthèse des formes et découpage sont décisifs. La couleur est traitée par zones monochromes séparées par des cernes noirs.Alors qu'il court ainsi le risque de s'enfermer dans une formule stylistique efficace, mais répétitive, Caulfield en sort au tournant des années 1970 en accroissant ses formats et, plus encore, en ouvrant la surface de la toile à des espaces de plus en plus profonds. Dès Intérieur d'un chalet suisse, il associe ironie et géométrie d'une manière très particulière, tout en affectant simultanément d'étendre la monochromie à la quasi-totalité de la surface. Paradise Bar (1974), Après le repas (1975) et Intérieur au tableau (1986) sont les chefs-d'oeuvre de ce deuxième Caulfield. Constructions très complexes d'angles et de plans, perspectives brisées ou relevées, introduction d'images photographiques ou de citations picturales explicites, collision d'éléments décoratifs et de plans abstraits : cette peinture savante ne se livre pas au premier regard.ART DE LA DISTANCEJusqu'à la fin, Caulfield est resté attaché à cet art de la distance, de l'incongruité, de l'équivoque aussi car on ne sait souvent à quelle réalité font référence ses compositions elliptiques. Dans les décennies 1980 et 1990, sans renoncer à tenir la chronique des moeurs contemporaines, il concentre son propos, stylisant froidement sans craindre de passer pour énigmatique. Les allusions au cubisme de Picasso et Gris confirment son goût pour la recherche et son mépris des solutions de facilité.Régulièrement exposé en Grande-Bretagne par la Waddington Gallery, montré à la Tate Gallery en 1981 et 1992, sollicité par Covent Garden en 1995 et pour plusieurs commandes, élu membre de la Royal Academy en 1993, Patrick Caulfield avait reçu en 1999 l'hommage d'une rétrospective à la Hayward Gallery. Cela semble aujourd'hui peu au regard de l'originalité et de l'intelligence de sa peinture.