Annonce Par ses aveux à la justice belge, Michel Fourniret vient de détrôner Marc Dutroux. Écroué depuis un an dans le sud du royaume pour «rapts d'enfants», le forestier français, âgé de 62 ans, a reconnu pour la première fois hier, l'enlèvement et le meurtre de six jeunes filles. Dutroux, le «monstre de Charleroi», a été condamné à perpétuité par les assises d'Arlon pour quatre meurtres de fillettes. Le voilà dépassé, sur l'échelle criminelle, par le «pervers des Ardennes». Les révélations sur cette affaire, qui replonge la Belgique dans les affres de pédophilie, ne font que commencer. A en croire le procureur général de Liège, Anne Thily, le forestier français aurait tué, au total, «une dizaine de personnes», dont «cinq jeunes filles françaises» et plusieurs adultes. Ces crimes ont été commis en France et en Belgique entre 1989 et 2002. Plusieurs victimes auraient été enterrées près du château de Sautou, dans les Ardennes françaises, où des fouilles macabres commenceront dès ce matin, sous la responsabilité du parquet de Reims. Muet depuis un an de détention, Michel Fourniret est passé aux aveux après les accusations de son épouse, la semaine dernière, devant les enquêteurs belges. Impressionnée, a-t-elle dit, par la peine de trente ans infligée la semaine dernière à Michelle Martin, la femme de Dutroux, Monique Olivier s'est décidée à parler. Elle a accusé son mari d'avoir enlevé et tué neuf jeunes filles en France et en Belgique. Aussitôt incarcérée pour «non assistance à personne en danger», la femme du forestier a donné des informations très précises sur procès-verbal. Parmi les nombreuses victimes attribuées à son mari, dont le parquet de Liège refusait hier de confirmer les identités, figureraient deux jeunes Françaises, Céline Saison (18 ans) et Manyana Thumpong (13 ans), disparues à Charleville et à Sedan, en 2000 et 2001. Leurs corps avaient été retrouvés plusieurs mois plus tard, dans les Ardennes belges. Une autre Française, Estelle Mouzin (9 ans), disparue à Guermantes, dans la région parisienne, le 9 janvier 2003, figurerait aussi parmi les victimes. Le «pervers des Ardennes» serait l'auteur du meurtre de la petite Elisabeth Brichet, une fillette belge de 12 ans, disparue en 1989, près de Namur. Dans sa logorrhée, froide et sans remords, Michel Fourniret a avoué l'avoir «enlevée», «violée», et «finalement étranglée». Mobilisant toutes les polices du royaume, la disparition d'Élisabeth Brichet avait été attribuée un temps à Marc Dutroux, qui avait l'habitude de rôder dans la région en quête de ses jeunes proies. En 1989, à l'époque de la disparition d'Élisabeth Brichet en Belgique, Michel Fourniret était censé être en prison en France, après sa condamnation, en 1987, par la cour d'assises de l'Essonne, à sept ans de détention, pour viols, attentats à la pudeur, et violences avec armes. Multirécidiviste, l'accusé avait été libéré très vite après son procès, ayant déjà passé la moitié de sa peine en détention provisoire. Pour se faire oublier de la justice française, il s'était installé en 1992, à Sart-Custinne, un petit village des Ardennes belges. Il continuait à assouvir ses pulsions de part et d'autre de la frontière, prétextant des visites à sa famille. En 2003, Michel Fourniret avait été embauché par la commune comme surveillant du réfectoire de l'école du village. La municipalité de Sart-Custinne, effondrée par cette affaire, se plaint aujourd'hui de ne pas avoir été informée du casier judiciaire chargé de son employé. Il aura fallu attendre dix ans de crimes impunis pour que le forestier soit surpris en flagrant délit, après un dernier enlèvement, tenté non loin de sa tanière, à Ciney, en juin 2003. Appliquant la méthode de Marc Dutroux, Michel Fourniret a forcé une fillette de 13 ans à entrer dans sa camionnette. Il lui a attaché les mains et les pieds, mais la petite victime, Marie Asumption, a réussi à se défaire de ses liens et à s'échapper. Reconnu par l'enfant au volant de sa camionnette, le pédophile a aussitôt été interpellé et écroué. A son domicile, les enquêteurs avaient découvert trois armes à feu, dont un 357 magnum, volé à un poste frontière de la police belge. A l'époque, les fouilles de sa maison de Sart-Custinne n'avaient rien donné. Elles seront sans doute plus fructueuses, aujourd'hui, lorsque les enquêteurs français commenceront à creuser dans les bois qui entourent le château de Sautou, dans les Ardennes françaises.