Fin "NYPD Blue" laisse la place à des séries plus mordantes Après douze saisons, le feuilleton-culte de la 20th Century Fox s'arrêtera en 2005. Comme "Six Feet Under" et "Les Soprano".Los angeles de notre envoyé spécialBriques rouges, taxis jaunes... on se croirait à New York. Seuls les palmiers qui se profilent à l'horizon rappellent que l'on ne se promène pas dans une rue de Brooklyn. Pourtant, tout y est : les murs en brique rouge, les bouches d'incendie, la fumée qui s'échappe des égouts, les poubelles en fer défoncées et les taxis jaunes. C'est dans ce décor grandeur nature construit dans les studios de la 20th Century Fox en plein cœur de Los Angeles que se tourne la douzième et ultime saison de la série "New York Police Department Blue" ("NYPD Blue"), qui, depuis 1992, connaît un succès planétaire.A quelques pas de ce décor, qui a déjà été utilisé dans les années 1970 pour le tournage du film Hello Dolly,un immense studio abrite le faux commissariat plutôt glauque des flics de la brigade du 15e precinct de New York. Au milieu des bureaux en fer trônent des avis de recherche "Wanted for questionning" et, sur les murs, quelques affiches "If you suspect terrorism, call the NYPD" rappellent que les attentats du 11 septembre 2001 ont changé la vie quotidienne des habitants de Big Apple."Depuis douze ans, c'est un peu notre résidence secondaire", confie dans un sourire l'acteur Dennis Franz, alias l'inspecteur Andy Sipowicz, personnage central de "NYPD Blue" depuis les débuts de la série. Grande gueule, alcoolique, brutal, généreux mais aussi un peu raciste, l'inspecteur Sipowicz est un flic atypique qui, année après année, n'a jamais réussi à trouver la rédemption. Pour ce rôle, Dennis Franz a reçu un Emmy Award de l'interprétation, l'équivalent des Oscars de la télévision. Nominée 82 fois, la série a récolté pas moins de 19 prix en douze ans.Grâce à "NYPD Blue", Steven Bochco, créateur et producteur de la série, est devenu un des nababs d'Hollywood. "Le succès de la série aux Etats-Unis et à travers le monde m'a permis de bénéficier d'une totale liberté pour travailler", dit-il. Politiquement incorrect, pessimiste et sans tabous, "NYPD Blue" décrypte à travers les vies tourmentées de ses personnages quelques réalités dérangeantes de la société américaine. Violence, corruption, sexe et alcoolisme sont au menu de chacun des épisodes, souvent tournés caméra à l'épaule, avec un montage rapide. "Il y a douze ans, la série était en rupture avec tout ce qui se faisait avant, ajoute le producteur. A travers nos intrigues, nous avons essayé de montrer que la réalité américaine n'est pas aussi lisse que l'on pense. Chaque personnage a sa part d'ombre, ce qui le rend attachant, mais la base de notre succès est d'abord de proposer une bonne histoire à chaque épisode. Tout est dans l'écriture."À L'AFFÛT DES NOUVEAUTÉSLa chaîne américaine ABC ne s'y est pas trompée en programmant "NYPD Blue" sur son antenne dès 1993. "Ils ont pris un sérieux risque, mais il a été payant", constate M. Bochko. Avec 20 670 000 téléspectateurs en moyenne chaque semaine en seconde partie de soirée, ABC arrive cette année en tête des audiences sur cette case devant CBS et NBC. Le système de syndication permet à la série d'être diffusée sur de nombreuses "petites" chaînes câblées ou locales. Selon une étude de la Fox, alors qu'elle en est à sa onzième saison, "NYPD Blue" voit son total de téléspectateurs augmenter de 10 % depuis septembre. La série capte, en grande majorité, les 25-54 ans, le public favori des publicitaires.Ce succès a servi de rampe de lancement à de nombreuses series dramas qui, elles aussi, sont désormais vues dans le monde entier. Avec ce nouveau "business", la machine Hollywood s'est mise à tourner à plein régime et exploite un filon quasiment inépuisable, qui rapporte des millions de dollars aux producteurs (Fox, Warner, Paramount, MGM...) et aux networks, les grandes chaînes de télévision américaines.Cette nouvelle industrie doit beaucoup à la chaîne cryptée HBO (27 millions d'abonnés), qui, depuis une dizaine d'années, a produit et diffusé la plupart des feuilletons cultes. Aujourd'hui, les chaînes du monde entier s'arrachent ces séries, dont chaque épisode peut se payer autour de 100 000 euros. En France, c'est la chaîne câblée Jimmy qui a lancé le mouvement. Elle a été la première à diffuser, entre autres, "NYPD Blue", "Les Soprano" (les tribulations d'une famille mafieuse), ou "Six Feet Under" (la vie d'une famille de croque-morts). Autant de succès qui ont fait la notoriété de la chaîne. TF1, France 2, France 3, Canal+, M6 et les chaînes du câble ont suivi et restent toujours à l'affût des nouveautés.Ainsi, la Une a récupéré "CSI" (rebaptisée "Les experts"), qui raconte les aventures de la police scientifique de Las Vegas. Tournée à Los Angeles, cette série fait un carton d'audience chaque semaine sur CBS et captive chaque dimanche près de 3,6 millions de téléspectateurs sur TF1. France 2 fait aussi un tabac avec "FBI : portés disparus" et "New York 911", Canal+ avec "24 heures chrono" et "Angels in America", M6 avec "NCIS : enquêtes spéciales" et "Alias". De son côté, Paris Première diffuse depuis septembre "Nip/Tuck", une série de la nouvelle génération, très crue et violente, mettant en scène deux chirurgiens esthétiques. "NYPD Blue", qui jusqu'à maintenant n'avait été diffusée que sur le câble, est désormais visible sur France 3 chaque vendredi soir.PLUTÔT "AMORALES"Après avoir ratissé large en s'adressant à un public généraliste, les producteurs de ces dramasont choisi de capter un public plus urbain en resserrant leurs cibles sur des histoires plus "branchées" et plutôt "amorales". C'est le cas avec "Les Soprano", "Sex in the city", "Six Feet Under" ou "The Shield". "Les networks américains se sont rendu compte que les séries généralistes avaient fait leur temps et ont demandé aux producteurs de prendre plus de risques dans l'écriture et les sujets, sans pour autant tomber dans le racolage", constate Alain Carazé, un des spécialistes des séries en France.Mi-novembre, Alan Ball, créateur et producteur de "Six Feet Under", a annoncé qu'il arrêtait la série à la fin 2005. Un mauvais coup pour HBO, qui, après la fin de "Sex in the city", s'apprête aussi à dire adieu aux "Soprano" en 2006. "Ces séries étaient notre porte-étendard, mais nous avons bien d'autres flèches à notre arc", a déclaré Carolyn Strauss, présidente de la chaîne. Parmi celles-ci, elle annonce l'arrivée prochaine d'une série réalisée par l'acteur George Clooney.Daniel PsennyL'inspecteur Sipowicz sur France 3 et JimmyLa douzième et dernière saison de "NYPD Blue" sera proposée sur la chaîne thématique Jimmy en 2005. "C'est une série qui a révolutionné le genre et qui, comme aux Etats-Unis, a connu un grand succès sur notre chaîne. Elle fait partie de notre vitrine", explique Sylvie de la Rochefoucault, directrice de Jimmy.Pour ceux qui n'ont pas le câble et qui souhaitent découvrir la vie mouvementée de l'inspecteur Sipowicz et de ses collègues lâchés dans les rues de New York, France 3 diffuse depuis septembre, le vendredi soir en troisième partie de soirée, les saisons 10 et 11, à raison de deux épisodes chaque semaine. A partir du 25 février 2005, la chaîne publique proposera les saisons 7, 8 et 9, soit 66 épisodes sur trois ans. Selon France 3, cette nouvelle case nocturne consacrée aux séries policières rassemble une moyenne de 900 000 téléspectateurs par épisode et lui permet de réaliser une part d'audience autour de 15 %. Comme aux Etats-Unis, la diffusion de "NYPD Blue" touche un public jeune et les fameuses ménagères de moins de 50 ans.
