Annonce Michel Roussin mis en cause au procès des marchés publics d'Ile-de-France Lors de la dixième audience du procès des marchés publics d'Ile-de-France, deux chefs d'entreprise ont directement mis en cause, mardi 12 avril, Michel Roussin, qui fut le bras droit de Jacques Chirac à Matignon et à la Mairie de Paris. C'est la première fois depuis l'ouverture du procès, le 21 mars, que M. Roussin, jugé pour "complicité et recel de corruption", est mis en cause. Jean-Pierre Génin, PDG de la société Chagnaud de 1991 à 2000, a raconté que l'ancien chef de cabinet de Jacques Chirac l'avait convoqué en 1991 dans son bureau de l'Hôtel de Ville de Paris pour lui réclamer 500 000 francs en contrepartie de l'attribution du marché de la construction d'un lycée. "Il m'a dit que ça pouvait éventuellement être payé en espèces", a précisé le chef d'entreprise à la barre. Devant son refus de payer, Michel Roussin a tenté de négocier, a-t-il rapporté. "M. Roussin a réduit à 300  000 francs, puis à 200 000 francs, mais j'ai encore refusé. Nous nous sommes séparés et je ne l'ai jamais revu." Jean-Pierre Génin a précisé que l'entretien à l'Hôtel de Ville de Paris faisait suite à une première demande faite au téléphone par Louise-Yvonne Casetta, l'"intendante" du RPR, demande qu'il avait déjà repoussée. Selon lui, Michel Roussin a fait explicitement le lien entre cette demande de financement et l'attribution à son entreprise du marché de construction du lycée de Limours (Essonne), qui n'était pas encore officielle. "Vous avez eu le lycée de Limours, vous devez 500 000 francs", aurait dit le bras droit de Jacques Chirac. Louise-Yvonne Casetta, présente lors de cet entretien, l'aurait menacé de mesures de rétorsion. "Ce n'était pas une menace excessive, mais c'était clair, il fallait payer", a assuré Jean-Pierre Génin. C'est ensuite Jean-Pierre Thomas, trésorier du Parti républicain, membre à l'époque de la majorité de droite au conseil régional d'Ile-de-France, qui l'aurait fait venir dans ses locaux pour réitérer la demande de financement. Jean-Pierre Thomas aurait proposé que l'entreprise verse les 500 000 francs soit sous forme de don "légal", soit en espèces, soit sous forme de publicités dans des revues. Le nouveau refus de Jean-Pierre Génin a été suivi de l'envoi répété de factures au siège de sa société, a raconté le chef d'entreprise. "UN RACKET INSUPPORTABLE" Lors de la même audience, mardi, son prédécesseur à la tête de la société Chagnaud, Philippe Fleury, a également mis en cause Michel Roussin. Ce dernier lui aurait demandé à la fin des années 1980 d'embaucher un conseiller municipal RPR de Paris, Patrick Segal, au titre du financement des partis politiques. Michel Roussin aurait par ailleurs donné son accord pour imputer sur le financement politique une somme de 400 000 francs versée à un bureau d'études et reversée en fait, selon les enquêteurs, à un élu de droite de Rosny (Seine-Saint-Denis). "J'ai eu plusieurs rencontres avec M. Roussin, je l'ai vu trois ou quatre fois en 1988, 1989, 1990. Chaque fois que j'avais un problème, j'allais le voir et j'essayais d'obtenir de sa part qu'il réduise le montant des dons aux partis politiques", a dit Philippe Fleury. Selon lui, Michel Roussin était non seulement au courant du système . 2 % des montants de chaque marché de construction d'un lycée par le Conseil régional d'Ile-de-France étaient demandés aux entreprises pour le financement des partis . mais il en coordonnait l'organisation. "J'ai été victime d'un racket insupportable, je n'ai corrompu personne. Je suis une victime d'un système", a dit Philippe Fleury. Michel Roussin a été chef de cabinet de Jacques Chirac à la Ville de Paris (1984-1986) puis à Matignon (1986-1988), puis son directeur de cabinet à la Ville (1989-1993). Interrogé en fin d'audience, il a jugé "surréalistes" les accusations portées contre lui. Il a affirmé qu'il ne se rappelait pas avoir jamais rencontré Jean-Pierre Génin. Concernant Philippe Fleury, il a reconnu l'avoir rencontré mais uniquement dans le cadre de ses fonctions habituelles. "Le directeur de cabinet est un homme qui est à l'écoute des uns et des autres, qui reçoit des gens de la société civile, chefs d'entreprises, élus, hommes de culture, qui évoquent leurs problèmes", a-t-il déclaré. Le président Jean-Louis Kantor a renoncé à l'interroger plus longuement, en invoquant le calendrier préétabli du procès.