Mort de Michel Gresset
Mort Michel Gresset, traducteurLe traducteur Michel Gresset, grand connaisseur des lettres américaines, est mort mardi 31 mai à Paris. Il était âgé de 68 ans.Né le 18 novembre 1936, digne héritier de Maurice-Edgar Coindreau, qu'il considérait comme un de ses "pères", Michel Gresset a été depuis le début de sa carrière un ambassadeur et un infatigable passeur de la littérature américaine du XXe siècle. Major de l'agrégation d'anglais en 1959, il passe le concours de traducteur de l'ONU, mais choisit une carrière universitaire, à Dijon d'abord, puis comme maître-assistant à la Sorbonne. Il entreprend une thèse sur William Faulkner, découvre à cette occasion toute la littérature du Sud et commence à prendre goût à la traduction littéraire.La passion de la traduction ne l'a jamais quitté et il n'a cessé de réfléchir à ses exigences et à ses finalités. A ses yeux, la rencontre et la recréation sont les deux pôles qui bornent l'espace de la"bonne" traduction, mais il n'en est pas de définitive : chaque génération de traducteurs se doit de redéchiffrer et d'interpréter à neuf les grands textes.L'oeuvre de traducteur de Michel Gresset est considérable. Pour l'impeccable premier volume des Œuvres romanesques de Faulkner, paru dans la Pléiade en 1977, il avait non seulement revu les traductions de Sartoris, Le Bruit et la Fureur, Sanctuaire et Tandis que j'agonise, mais traduit les premières versions de Sartoris et de Sanctuaire. Sont venues s'ajouter au fil des années, toujours fidèles et élégantes, les traductions de nombre d'autres textes de Faulkner.Et c'est également Michel Gresset qui, par ses essais, ses préfaces et ses traductions, a fait découvrir au public français ces autres grands conteurs du Sud que sont Eudora Welty, Flannery O'Connor, Shelby Foote, Reynolds Price, Fred Chappell et Heather Ross Miller. Son amour de la traduction, Michel Gresset eut à coeur de le transmettre en présidant l'Association des traducteurs littéraires de France, en créant le prix Maurice-Edgar Coindreau, qui récompense chaque année le meilleur livre américain en traduction française et en s'engageant, dès sa création en 1983 auprès de l'association Atlas qui organise chaque année les assises de la traduction littéraire à Arles.Mais autant que le regard du traducteur, compte le regard du critique. Chez Michel Gresset, ils se confondent. C'est le même regard, chaque fois, un regard de lecteur scrupuleusement attentif au texte, à son esprit comme à sa lettre, et il n'est sans doute pas fortuit que dans Faulkner ou la fascination (Klincksieck, 1982), il ait cherché à élaborer une "poétique du regard". Prolongeant les réflexions de Sartre, de Malraux et de Jean-Jacques Mayoux, Michel Gresset s'est attaché à comprendre la singularité d'un immense écrivain, et il a été l'un des premiers à l'aborder avec toutes les ressources de la critique moderne, de la phénoménologie à la psychanalyse.Les études faulknériennes doivent beaucoup à Michel Gresset. En mai 1980, alors qu'il enseignait à l'Institut Charles-V (Paris-VII), il organisa le premier colloque international consacré à Faulkner. Il récidiva dès 1982, et dans les années qui suivirent, d'autres colloques réunirent des universitaires européens et américains à Salamanque, Bonn, Rome, Vienne et Venise. Personne n'a plus que lui contribué au rayonnement de ce que Joseph Blotner, le meilleur biographe de Faulkner, a appelé "l'école faulknérienne française".