Mort de Michel Castaing
Mort Michel Castaing, ancien journaliste au "Monde"Michel Castaing, ancien journaliste au Monde, est mort vendredi 30 décembre 2005 à Provins (Seine-et-Marne). Il était âgé de 62 ans.Né le 13 juillet 1943 à Nemours (Seine-et-Marne), il a très vite partagé deux passions : le sport et l'écriture. L'élève du Lycée Thibaut-de-Champagne de Provins découvre le latin et le charme des études littéraires, sans délaisser le football. Mais le joueur doit vite se rendre à l'évidence : ce n'est pas sur les stades qu'il connaîtra le succès.Une banale querelle, une réaction d'orgueil du lycéen au caractère déjà affirmé l'entraînent à démissionner de son équipe locale. C'est à ce moment qu'il a eu envie de raconter les moments intenses vécus sur le terrain, l'envie de rendre compte par des mots des joies et des revers partagés par deux équipes. En écoutant les retransmissions de matches à la radio, il explique à son frère que c'est ce métier de commentateur qu'il veut exercer plus tard.DU TOUR DE FRANCE AUX JOLe bachelier est donc motivé lorsqu'il prépare le concours d'entrée au Centre de formation des journalistes (CFJ), à Paris. Le diplômé de la promotion 1967 est sur le point de signer un contrat à La Croix lorsque Le Monde lui propose un stage. Michel hésite à peine entre la sécurité et l'incertitude d'un statut provisoire. Il hésite d'autant moins que le quotidien de la rue des Italiens lui propose de rejoindre le service des sports.Pendant huit ans, la plume alerte de Michel va conter aux lecteurs des histoires, à l'époque encore riches, du Tour de France, suivre l'évolution du football vers le professionnalisme, décrire les grands moments des Jeux olympiques d'hiver de Sapporo en 1972.Curieux, il sait faire parler les sportifs, d'un naturel peu bavard, pour aider à comprendre les enjeux des disciplines. Erudit, il sait replacer chaque résultat à sa juste dimension et ne se laisse jamais impressionner par ces commentateurs qui ont charmé son enfance. Passionné, il est capable de s'enthousiasmer, une fois la machine à écrire retournée, pour quelques clubs du championnat de France de football.Mais la place restreinte accordée aux dieux des stades par le quotidien du soir brime le rédacteur. Le besoin d'écrire pousse Michel à rejoindre le service des informations générales. C'est l'époque de l'affaire de Bruay-en-Artois puis de la catastrophe de Liévin où le reporter fait la connaissance du "petit juge" Henri Pascal. Inondations, procès, petits faits divers de la vie quotidienne, la plume de Michel n'a besoin que d'un coin de table pour griffonner un texte qui, via les sténos, deviendra un article éclairant sur la société française de la fin des années 1970.A l'époque, l'angoisse de Michel n'est pas dans le choix des mots ou dans l'attaque du papier, toutes techniques journalistiques qu'il maîtrise parfaitement, mais dans le voyage. Michel a le plus grand mal à prendre l'avion. Combien de fois est-il arrivé au journal au petit matin en disant : "Je n'ai pas pu aller à l'aéroport" ?Michel, rétif aux voyages au long cours, Michel, épris de justice et d'équité, toujours inquiet des coupes dans ses papiers, aborde difficilement les années 1980. Ses colères précèdent ses déprimes et cet homme entier qui veut toujours aller au bout des choses cherche les moyens d'oublier une certaine solitude. Plus souvent, il vient la nuit occuper son bureau à la recherche de mots justes, d'inspiration.Parfois, il prend conscience des dangers de sa situation et, avec l'aide de quelques amis du journal, essaie de s'en guérir. Il s'éloigne de la rédaction avant de retrouver de nouveau le plaisir de raconter de longs récits pour les suppléments "Le Monde sans visa" ou "Heures locales". Au milieu des années 1990, il rejoint le service société pour parler des plus démunis. Exclusion, occupation d'immeubles, Restos du coeur et, toujours, l'abbé Pierre sont le quotidien de Michel. " Il y a quelque chose d'anormal dans le royaume de France, quand il faut l'éclat d'un vieux prêtre pour faire trembler et agir son gouvernement", écrivait-il en 1994.Michel a quitté le journal en juillet 1996. De retour à Provins, il avait travaillé à la biographie d'un ancien résistant de la ville avant de participer au journal des anciens du lycée Thibaut-de-Champagne. Depuis le mois de mai 2005, trois vilaines tumeurs l'avaient éloigné de ces activités.(Etre complexe à la sensibilité exacerbée, Michel Castaing ne laissait personne indifférent. Au nom de la collectivité professionnelle à laquelle il a appartenu, je présente mes condoléances à sa famille et à ses proches.)