Fin Médicament : Cette molécule augmenterait le risque cardiaque lors d'une utilisation à long terme Anti-inflammatoires : retrait mondial du Vioxx Le laboratoire pharmaceutique Merck a décidé de retirer volontairement de la vente un de ses médicaments anti-inflammatoires vedettes : Vioxx. Cette décision a été prise après les résultats intermédiaires d'une étude montrant que le Vioxx augmente le risque d'accidents cardiaques par rapport à un placebo (c'est-à-dire un produit dénué d'efficacité). Cet anti-inflammatoire non-stéroïdien représentait 2,55 milliards de dollars de chiffres d'affaires pour le laboratoire américain. Deux millions de personnes dans le monde consomment ce médicament. En France, plus de 500 000 personnes ont bénéficié d'un tel traitement depuis sa mise sur le marché en 2001. En 2002, sur 37 millions d'ordonnances d'anti-inflammatoires, 7,8% concernaient le Vioxx. L'histoire des nouveaux anti-inflammatoires, présentés comme une révolution lors de leur lancement, est assez édifiante. «Elle illustre la nécessité d'évaluer les médicaments de manière approfondie après leur mise sur le marché, notamment lorsqu'ils sont destinés à des prescriptions larges», déclare le professeur Lucien Abenhaim, expert en pharmaco-épidémiologie, ex-directeur général de la santé, qui le premier, en 2002 avait demandé une réévaluation de ces produits à l'échelle européenne. En 1999 aux États-Unis, et quelques mois plus tard en France et en Europe, sont lancés deux nouveaux anti-inflammatoires, Vioxx et Celebrex, avec une campagne marketing particulièrement agressive. Ces deux médicaments très attendus étaient, disait-on, dénués de toxicité sur l'estomac et tout aussi efficaces que les autres. Or, le grand problème des anti-inflammatoires classiques est qu'ils majorent de manière non négligeable le risque d'ulcères, de perforation et d'hémorragie digestive. Après une intense publicité, partout dans le monde, des millions de personnes en quelques mois ont reçu ces nouveaux médicaments beaucoup plus onéreux que les anciens, pour traiter l'arthrose, les rhumatismes inflammatoires, les douleurs dans le dos... Très vite une suspicion s'installe parmi les experts les plus indépendants. Le Celebrex pourrait ne pas tenir ses promesses et entraîner ni plus ni moins de complications digestives que les anti-inflammatoires les plus anciens : son prix excessivement élevé n'apparaît alors plus du tout justifié. Quant aux Vioxx, les premiers essais mettent en évidence déjà, un risque cardio-vasculaire plus élevé. L'étude Vigor, en 2000 en particulier montre que les patients sous Vioxx ont un risque de 0,4% d'avoir un infarctus contre 0,1% avec le naproxène (un anti-inflammatoire classique). La toute nouvelle étude qui a contribué au retrait mondial du Vioxx porte sur près de 2 000 personnes atteintes de polypes intestinaux traitées pendant trois ans par Vioxx comparées à 1 300 sous placebo. Les résultats soulignent qu'avec Vioxx, le risque d'accident cardiaque est deux fois plus important qu'avec le placebo, l'augmentation du risque n'apparaissant qu'au-delà de 18 mois de traitement continu. L'Agence du médicament recommande aux patients traités par Vioxx de consulter leur médecin, sans urgence, parce que «les risques de complications restent faibles et n'apparaissent qu'à long terme». L'affaire Vioxx intervient un mois après la publication d'une étude portant cette fois sur l'efficacité d'un autre médicament vedette de Merck : Zocor. Ce produit contre le cholestérol – comme les autres sans doute – ne semble pas produire de meilleurs résultats que ceux dérivés d'un régime alimentaire pauvre en cholestérol. L'étude portant sur 4 500 patients avait été financée par Merck pour établir l'efficacité de ce remède dont les ventes ont atteint 2,7 milliards de dollars au cours des six premiers mois de l'année 2004. Hier à la mi-séance, Merck perdait plus du quart de sa capitalisation sur le New York Stock Exchange.