Déclaration M. Chirac assure que "l'antisémitisme n'a pas sa place en France" En inaugurant, mardi 25 janvier à Paris, le Mémorial de la Shoah, le chef de l'Etat devait rappeler aux Français leur devoir de mémoire à l'égard du martyre du peuple juif. Il invitait les enseignants à faire en sorte que leurs élèves "comprennent et n'oublient jamais"."Souviens-toi. N'oublie pas. Zakhor, Al Tichkah." C'est par cet impératif, "placé au cœur du judaïsme", que Jacques Chirac devait marquer, mardi 25 janvier, l'inauguration du Mémorial de la Shoah, dans le quartier du Marais, à Paris, avant de participer, jeudi, à la commémoration du 60e anniversaire de la libération du camp d'Auschwitz-Birkenau, en Pologne. Après une visite du Musée du mémorial et un moment de recueillement devant le Mur des noms, inauguré dimanche, portant le patronyme et la date de naissance des 76 000 déportés juifs de France, M. Chirac devait inviter "la France à se souvenir de ceux que Malraux appelait "nos frères dans l'ordre de la nuit"".A ses côtés devaient être présents le président de l'Assemblée nationale, Jean-Louis Debré, plusieurs ministres, le maire de Paris, Bertrand Delanoë, des élus, des représentants des autorités religieuses et ses "chers" : Simone Veil, présidente de la Fondation pour la mémoire de la Shoah, Eric de Rothschild, président du Mémorial, Roger Cukierman, président du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF).L'histoire des déportés juifs, la mémoire, longtemps occultée, qui s'y attache, est avant tout une histoire d'hommes, de femmes, d'enfants. M. Chirac devait leur rendre hommage, s'attachant à distinguer quelques destins, qui permirent de faire vivre leur souvenir et de révéler ce que fut l'horreur des camps.Parmi eux, Isaac Schneersohn, héros et historien, qui se jura de "prendre des notes au cœur de l'apocalypse", afin que le monde sache. Créateur, en avril 1943, à Grenoble, du Centre de documentation juive contemporaine, il accomplit ainsi "un acte d'une authentique résistance", devait souligner le chef de l'Etat. Mot choisi, pour cet " homme debout, au cœur des ténèbres".A tous ceux qui suivirent ce précurseur, le président devait "témoigner solennellement et fraternellement -sa- reconnaissance". Ainsi Eric de Rothschild, à qui le Mémorial "doit tout simplement d'exister", Simone Veil, "inspiratrice de ce projet", Ady Steg, dont " l'exigence intellectuelle et morale" confère au Mémorial "prestige et rayonnement". Serge Klarsfeld, président de l'association des Fils et Filles des déportés juifs de France, et Richard Prasquier, président du Comité français pour Yad Vashem, devaient aussi être remerciés pour leur "généreuse abnégation".Se souvenir, transmettre. Le chef de l'Etat devait aussi adresser un message à l'école, comptant "sur tous les professeurs de France" pour amener leurs élèves au Mémorial, afin qu'ils "voient, comprennent et n'oublient jamais". Et se rendent compte qu'aucun propos antisémite n'est "excusable", ni "insignifiant". M. Chirac ne devait cependant pas évoquer le cas des deux élèves de Seine-Saint-Denis qui ont manifesté leur antisémitisme lors de leur voyage à Auschwitz (Le Monde daté 23-24 janvier)."PLUS JAMAIS ÇA"Il ne devait pas non plus mentionner le président du FN, Jean-Marie Le Pen, qui a jugé dans Rivarol (Le Monde du 13 janvier) que "l'occupation allemande n'avait pas été particulièrement inhumaine". Mais il devait dénoncer "le négationnisme, ce crime contre la vérité".M. Chirac, qui a été critiqué pour la discrétion de sa réaction devant cette nouvelle déclaration de son rival au second tour de l'élection présidentielle de 2002, ne devait pas lui consacrer plus de quelques phrases. "Pour une raison simple, expliquent ses conseillers, quand il y a une action en justice, il n'y a pas de commentaire public."Le garde des sceaux, Dominique Perben, a annoncé, le 12 janvier, avoir "demandé au procureur de la République d'ouvrir une enquête préliminaire" afin de voir s'il y avait matière à poursuivre Jean-Marie Le Pen pour ses déclarations. S'avançant peut-être, M. Perben a soutenu que le président du FN aurait à s'expliquer "devant le tribunal correctionnel".Le chef de l'Etat devait conclure son allocution sur des considérations de politique internationale. La blessure de la Shoah, " la mémoire blessée" du peuple juif au cours des siècles, "suffirait à elle seule à justifier, si besoin était, la nécessité d'un Etat dont l'existence garantisse le "plus jamais ça"", devait-il déclarer.Souvent en désaccord avec la communauté juive sur sa politique pro-arabe, M. Chirac devait évoquer Israël, "dont la France est l'amie et qui aspire légitimement, comme les Palestiniens et tous les peuples de la région, à vivre en paix et en sécurité, dans des frontières sûres, acceptées et reconnues par tous".En cette année de commémoration de la libération des camps nazis, qui est aussi celle du référendum sur l'Europe, M. Chirac devait enfin décliner l'un des thèmes de sa campagne en faveur du "oui": la volonté de bâtir "une Europe rassemblée, un monde de paix, un avenir de justice et de liberté".
