Annonce Lucien Léger, 41 ans de prison, va dire au revoir à ses barreauxLe plus ancien prisonnier de France, surnommé l'Etrangleur, sera libéré le 3 octobre. Quarante et un ans en prison, treize demandes de libération infructueuses... Et, cette fois, la libération. Lucien Léger, 68 ans, qu'on appelait «le plus ancien prisonnier de France», et peut-être d'Europe, sera libéré le 3 octobre. Ainsi l'a décidé hier la cour d'appel de Douai (Nord), confirmant le jugement du tribunal d'application des peines d'Arras, rendu le 1er juillet. Mais le ministère public, opposé à cette libération, avait fait appel. Tout comme le procureur général de Douai, qui s'est montré très défavorable à la demande de Léger.Emprisonné durant l'été 1964, Lucien Léger, surnommé alors «l'Etrangleur», avait été condamné deux ans plus tard par la cour d'assises de Versailles à la réclusion criminelle à perpétuité pour le meurtre de Luc Taron. Ce garçon de 11 ans avait été enlevé le 27 mai 1964, avant d'être retrouvé mort à Verrières-le-Buisson (Essonne).Incarcéré au centre de détention de Bapaume (Pas-de-Calais), Lucien Léger était «libérable» depuis 1979. Ses demandes d'élargissement avaient toujours été retoquées, en raison notamment des expertises psychiatriques, dont certaines le qualifiaient de dangereux, mais aussi pour des raisons politiques. Jusqu'à la loi dite «Guigou», sur la présomption d'innocence, en 2000, le garde des Sceaux décidait des libérations des longues peines. Depuis, ce sont des juges qui statuent après l'étude d'un dossier social et médical. «Les expertises psychiatriques et psychologiques étaient très contradictoires, et, surtout, l'administration pénitentiaire et les juges d'application des peines ont pris une position favorable», indique Jean-Jacques de Félice, son avocat. Autre élément, officieux : le père de Luc Taron est aujourd'hui décédé.Il reste à gérer cette sortie. En quarante et un ans, il n'a bénéficié que d'une permission, pour l'enterrement d'un membre de sa famille. Entre deux gendarmes, il s'est rendu dans un cimetière, a été démenotté quelques minutes, avant d'être réincarcéré. «Il va falloir le protéger, il va probablement être très sollicité par les médias. Il faut veiller au phénomène de décompensation, même s'il s'est psychologiquement préparé à cette libération», estime son avocat. Au-delà du cas Léger, de Félice voit dans cette libération «un message d'espoir». «Vivre sans espoir, c'est impossible, surtout lorsqu'on est condamné à perpétuité. Ce jugement est un grand moment, mais ce n'est qu'une étape dans la réflexion sur les peines de longue durée.» Depuis 2000, chaque année, une vingtaine de détenus condamnés à perpétuité sont sortis de prison, après une durée moyenne d'incarcération de vingt ans.Lucien Léger, qui a suivi en détention des études de droit et de philosophie, était considéré comme une sorte de travailleur social. «En prison, il s'est investi auprès des plus défavorisés», affirme son avocat. Léger, qui sera soumis à contrôle judiciaire, a formulé le projet d'être bénévole à la Croix-Rouge.
