Exposition Londres célèbre la peintre mexicaine Frida Kahlo LONDRES (AFP) - La Tate Modern, le musée d'art moderne de Londres, s'apprête à célébrer l'artiste peintre mexicaine Frida Kahlo (1907-54), figure culte qui a inspiré Hollywood, lors d'une rare rétrospective de ses oeuvres qui s'ouvre jeudi. "Beaucoup de gens connaissent sa vie mais peu connaissent ses tableaux. Elle a fait l'objet de très peu d'expositions solo, et jamais sur une telle échelle en Europe", explique Emma Dexter, commissaire de l'exposition, qui dure jusqu'au 9 octobre. Celle-ci s'annonce comme l'exposition de l'année à Londres, assurée d'attirer une foule de visiteurs en raison de la personnalité de Frida Kahlo, rendue célèbre par le film "Frida" (2002) où elle est incarnée par Salma Hayek, et de son art immédiatement accessible. L'artiste n'a guère été épargnée par la vie: elle contracte la polio à l'âge de 6 ans et en garde une jambe plus courte que l'autre. A 18 ans, elle est victime d'un accident de bus, a la colonne vertébrale brisée en trois points et de nombreuses fractures au bassin et aux jambes. La comédienne mexicaine Salma Hayek interprète une scène du film "Frida" © AFP/Archives Elle luttera désormais toute sa vie contre une longue détérioration de son corps. Allongée pendant sa convalescence, elle commence à peindre. Elle entame en 1928 une relation avec l'artiste mexicain le plus connu de son temps, Diego Rivera, peintre de fresques murales, marxiste, de vingt ans plus âgé qu'elle. Ils se marient en 1929, "l'union entre un éléphant et une colombe", selon ses parents qui la désapprouvent. Ses tableaux, la plupart du temps autobiographiques, montrent que Diego Rivera est au centre de son monde, même si elle souffre de ses infidélités, y compris avec sa soeur. Elle-même a une liaison en 1937 avec Léon Troski, exilé au Mexique. Après son divorce en 1939, elle se peint le coeur brisé. Diego et Frida se remarient toutefois l'année suivante. Ses oeuvres montrent aussi la jeune femme, née d'un père allemand et d'une mère mexicaine, tiraillée entre les cultures coloniale et indigène, habillée dans ses autoportraits tantôt en robe occidentale, tantôt en costume folklorique. "Autoportrait avec un singe" de Frida Kahlo © AFP John D McHugh Elle contribue ainsi au mouvement de renaissance culturelle, de recherche des racines d'avant la colonisation qui accompagne la révolution mexicaine (1910-20). Et laisse poindre dans certains tableaux une discrète critique des Etats-Unis et des inégalités sociales. Une grande partie de l'exposition consiste en autoportraits qu'elle a peints inlassablement, faisant d'elle-même une sorte d'icone: elle s'y présente généralement dans la même posture, le visage légèrement de côté, les sourcils noirs se rejoignant, les lèvres serrées, surmontées par l'ombre d'une moustache. Son oeuvre confine parfois au surréalisme, et elle a été parrainée par Marcel Duchamp et André Breton. Mais elle est aussi influencée par l'imagerie catholique, l'art aztèque et les images populaires mexicaines. Presque 51 ans après sa mort, elle est devenue un objet de culte internationalement connu. La Tate vend dans ses boutiques des accessoires inspirés de son style vestimentaire très reconnaissable, coloré, fleuri, folklorique, en accord avec la mode actuelle. "Son oeuvre a un aspect universel et contemporain. Elle parle aux gens aujourd'hui, surtout aux femmes, par son aspect féministe, ses références à la violence conjugale, à la politique", explique Tanya Barson, l'autre commissaire de l'exposition. Sur un total de 150 tableaux qui lui sont attribués, la Tate a rassemblé 87 oeuvres, dont 62 huiles. Alors que Londres s'apprête à plonger cet été dans la Fridamania, la Tate accompagne l'exposition de documentaires et longs-métrages faits sur l'artiste, ainsi que d'oeuvres majeures du cinéma mexicain.