Annonce L'Indonésie subit une inquiétante poussée de grippe aviaireLes autorités sanitaires indonésiennes et internationales ne cachent pas leur inquiétude après l'identification, dimanche 21 mai, d'un nouveau cas de contamination humaine par le virus H5N1 de la grippe aviaire. Le malade est un éleveur de poulets vivant dans le nord de l'île de Sumatra. Il est le sixième membre de la même famille à avoir contracté le virus responsable de l'épizootie de grippe aviaire. Ce cas a été diagnostiqué après la mort, ces dernières semaines, des cinq personnes infectées. Les victimes, deux jeunes hommes, une femme et deux enfants âgés de 18 mois et 10 ans, étaient originaires de la même branche familiale, vivaient à proximité les uns des autres dans le district de Karo. On a d'autre part retrouvé la trace de l'infection par le virus aviaire chez des porcs élevés à proximité immédiate de ce foyer infectieux. Se pose donc la question d'une possible mutation virale qui aurait fait du H5N1 un agent pathogène capable de se transmettre d'homme à homme. La FAO est loin d'avoir reçu l'argent nécessaire pour lutter contre l'épizootie[-] fermerLes villages d'Indonésie - un des pays les plus peuplés du monde avec 220 millions d'habitants - constituent de multiples foyers épizootiques potentiels. Les routes du pays sont parcourues de millions de paysans allant vendre à la ville leurs gallinacés vivants accrochés tant bien que mal au porte-bagages de leur motocyclette.L'insouciance paraît de mise, même dans une ville comme Yogyakarta, ancienne capitale de l'île de Java et pépinière universitaire. Son célèbre marché aux oiseaux, en plein coeur de la cité historique, hanté par les pigeons et regorgeant de vecteurs potentiels de propagation du virus, n'est "absolument pas contrôlé" par les autorités sanitaires, reconnaissent ses boutiquiers. Des banlieues de l'immense métropole de Djakarta (plus de 20 millions d'habitants) ont d'ores et déjà été touchées par l'épizootie qui s'est propagée dans la grande majorité des provinces de l'archipel.Avec 32 victimes, l'Indonésie vient en deuxième position - derrière le Vietnam (42 décès) - pour le nombre des personnes ayant succombé à l'infection par le virus de la grippe aviaire, à l'origine de 123 morts à travers le monde. Pour l'heure, les autorités se veulent prudentes sinon rassurantes. Siti Fadilah Supari, ministre indonésien de la santé, a récemment assuré, sur la foi des premiers tests génétiques effectués sur les échantillons viraux, que la souche H5N1 présente dans le nord de Sumatra n'avait pas acquis les caractéristiques qui lui permettraient de se transmettre d'homme à homme.SONNETTE D'ALARME"Nous ne pouvons pas confirmer qu'une transmission humaine ait eu lieu, mais nous ne pouvons pas non plus l'écarter", a toutefois déclaré à la presse, lundi 22 mai, I Nyoman Kandun, membre du Centre de contrôle indonésien des maladies contagieuses, qui mène une enquête épidémiologique en collaboration avec des spécialistes de l'Organisation mondiale de la santé (OMS).Cependant, la sonnette d'alarme est tout de même officiellement tirée. La menace d'une crise évoluant de l'épizootie à la pandémie représente "un défi phénoménal" pour l'Indonésie, a ainsi publiquement reconnu, le 18 mai, le président indonésien, Susilo Bambang Yudhoyono, dans le cadre d'une réunion de l'Agence des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) à Djakarta. "La FAO ne doit avoir de cesse d'apporter son plein soutien financier et technique à la lutte contre la grippe aviaire", a-t-il ajouté. Une manière de reconnaître que l'Indonésie elle-même est bien mal armée pour mener ce combat sanitaire."La situation épidémiologique indonésienne constitue une véritable bombe à retardement, avertit pour sa part Bernard Vallat, directeur général de l'Organisation de la santé animale (OIE). Il s'agit ici de contrôler plus de 600 îles dans lesquelles existe en permanence une très grande promiscuité entre les volailles et les hommes. Longtemps, les autorités gouvernementales n'ont pas fait une priorité sanitaire de la lutte contre l'épizootie. Il semble que ce ne soit plus le cas aujourd'hui. En toute hypothèse, des sommes très importantes, de l'ordre de 100 millions de dollars, devront être rapidement mobilisées pour tenter d'obtenir l'éradication."Pour le directeur général de l'OIE, la découverte des traces de l'infection des porcs par le virus aviaire (situation tenue pour faciliter le réassortiment génétique des virus de la grippe) ne fournit pas la preuve de mutations ayant doté cet agent pathogène des capacités d'une transmission inter-humaine."Des anticorps antiviraux ont certes été trouvés chez ces animaux en bonne santé mais pas le virus lui-même, explique-t-il. Cela signifie qu'il y a bien eu contact avec le virus aviaire, mais que ces animaux ont réussi à s'en débarrasser." Seules des analyses de virologie moléculaire sur les souches indonésiennes et la comparaison des résultats avec les autres souches déjà isolées permettront de dire s'il faut ou non considérer comme prochaine l'émergence d'une pandémie.
