Annonce L'état de santé d'Ariel Sharon inquiète les IsraéliensBien que bénigne, l'attaque cérébrale qu'a subie dimanche soir le Premier ministre israélien fait prendre conscience de la vulnérabilité d'un homme d'Etat perçu comme providentiel qui domine à lui seul la vie politique du pays• Il devrait quitter l'hôpital mardi •L'alerte fut chaude. Deux heures durant, dimanche soir, entre l'annonce de l'accident cérébral d'Ariel Sharon et le diagnostic rassurant des médecins de l'hôpital d'Hadassah, un vent de panique a glacé toute la classe politique israélienne. Accourus en masse au chevet du malade, les journalistes montraient des signes d'inquiétude dépassant de beaucoup le simple intérêt professionnel. «Jamais je n'aurais cru, il y a encore dix ans, que je me ferais un jour du souci pour la santé de Sharon», explique un photographe qui reproche toujours au vieux général de l'avoir envoyé combattre au Liban, «mais aujourd'hui, l'avenir d'Israël ne repose que sur lui. Depuis le désengagement de Gaza, il porte seul le pays sur ses épaules. Sa disparition serait une catastrophe.» Nombreux sont ces Israéliens qui s'accrochent au chef du gouvernement comme à leur seule planche de salut.Sur le même sujetSharon victime d'une légère attaque cérébraleAprès le début de l'intifada Al-Aqsa en septembre 2001, Ariel Sharon n'a eu de cesse de se poser en homme d'Etat providentiel. Rempart de la nation contre le terrorisme palestinien pour la droite, stratège pragmatique pour une gauche qui avait été incapable de démanteler la moindre colonie dans les territoires occupés malgré les accords d'Oslo, le Premier ministre paraît aux yeux de ses concitoyens comme un politicien capable de décider, chose fort rare. Son dernier coup de théâtre a été sa démission du Likoud, parti qu'il dirigeait pour fonder Kadima, un mouvement voulant charpenter le centre autour des élites du pays. Les sondages, jusqu'à ce week-end, indiquaient un accueil plus que favorable du public avec des intentions records de vote aux législatives anticipées du 28 mars. Mais les cadres de Kadima savent parfaitement combien la réussite de l'entreprise ne dépend en fait que d'un seul homme. Ariel Sharon a voulu ce bouleversement politique. Si son nouveau parti regroupe tout le gratin israélien, il n'en est pas moins bâti qu'autour d'un seul homme. Ariel Sharon fait fonction à la fois de chef, de locomotive et de programme. L'attaque cérébrale du Premier ministre a subitement permis aux Israéliens de réaliser l'ampleur de leur dépendance.Les communiqués rassurants du corps médical livrent peu d'informations cliniques, mais insistent sur l'humour retrouvé de leur patient qui plaisante durant les examens. Au passage, le docteur Boleslav Goldman, son médecin traitant, glisse que la convalescence pourrait durer «quelques jours». Rien de grave, donc, un léger contretemps dans le lancement de la campagne électorale. Les éditorialistes, toutefois, ne s'y sont pas trompés. Tous les quotidiens d'hier inséraient l'âge du capitaine comme une variable devenue fondamentale dans l'équation nationale.«L'exception de Sharon, sa domination complète sur la scène politique du pays, qui lui donnait un pouvoir sans précédent, va désormais rapidement devenir un problème central et controversé de la campagne à venir», prédit Yossi Verter dans Ha'aretz. Et son collègue, Aluf Benn, de renchérir : «Qu'importent les résultats des examens médicaux d'Ariel Sharon, sa santé sera maintenant l'un des éléments de la discussion publique. Le plus vieux Premier ministre à avoir jamais dirigé le pays demande aux électeurs de l'élire pour quatre nouvelles années. L'opinion va certainement s'interroger sur ses capacités à l'issue de son hospitalisation.»
