Élection Les Adjars aux urnes pour leurs premières élections libres Les habitants de l'ex-région géorgienne rebelle d'Adjarie se rendaient aux urnes dimanche pour élire leurs nouvelles autorités locales lors des premières élections libres depuis des décennies, organisées après le renversement du potentat Aslan Abachidzé en mai. L'ex-bureaucrate soviétique a régné plus de dix ans sur cette région relativement prospère du bord de la mer Noire en réprimant toute opposition et en manipulant les élections, avant d'être contraint à l'exil par un soulèvement populaire début mai à l'issue d'un bras de fer avec le nouveau président géorgien Mikhaïl Saakachvili. Ces élections devraient aider Mikhaïl Saakachvili à resserrer son pouvoir sur l'Adjarie, une province de 400 000 habitants qui échappait auparavant à tout contrôle central. L'Adjarie est une région stratégique pour le pays car elle compte à Batoumi un important terminal pétrolier, par lequel transitent chaque année neuf millions de tonnes de pétrole vers les marchés mondiaux. En rétablissant le contrôle sur l'Adjarie, M. Saakachvili envoie également un signal fort aux deux autres régions sécessionnistes du pays, l'Ossétie du sud et l'Abkhazie, signifiant qu'il ne tolérera pas la désintégration de cette ancienne république soviétique. Les électeurs de la région doivent choisir ce dimanche un nouveau Conseil suprême de 30 membres, qui doit élire à son tour le numéro un régional. La même assemblée devra aussi approuver - ou rejeter - la nomination d'un représentant du président géorgien dans la région. Les électeurs devraient apporter massivement leurs suffrages aux partisans de Mikhaïl Saakachvili, un réformateur de 36 ans formé en France et aux Etats-Unis, qui a pris la présidence de la Géorgie après la "révolution de la rose". La victoire attendue de la formation Saakachvili-Adjarie victorieuse, soutenue par le président géorgien, lui donnera le droit de placer à la tête de la région deux de ses lieutenants : Koba Khabazi et Levan Varchalomidzé. Mais sur les boulevards bordés de palmiers de Batoumi, port important et capitale de la région, les électeurs appréciaient surtout de pouvoir participer à leurs premières élections libres après avoir été privés de démocratie pendant près d'un siècle, sous l'Union soviétique puis sous la férule d'Aslan Abachidzé. "La situation était très difficile ici", explique Soso Gagabadzé, un policier en retraite en sirotant un café sur le perron de sa maison. Le régime d'Abachidzé "nommait qui il voulait et faisait élire qui il voulait", raconte-t-il. "Maintenant c'est bien. Nous sommes contents que des élections soient organisées et qu'elles soient libres", déclare le policier. Dans un discours télévisé, le président géorgien a encouragé les Adjars a faire usage de leur droit de vote. "C'est la première fois que le peuple adjar a cette opportunité", a-t-il rappelé. Les 220 000 électeurs d'Adjarie ont jusqu'à 17 heures (heure française) dimanche pour aller aux urnes dans l'un des 301 bureaux de vote de la région, sous le contrôle de 111 observateurs internationaux du Conseil de l'Europe et de l'Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE), qui donneront leur verdict lundi sur le déroulement des élections. Lors des précédentes élections organisées sous Abachidzé, les membres des partis d'opposition étaient battus par la police quand ils essayaient de tenir des meetings et les urnes étaient souvent confisquées pour truquer les élections en faveur du potentat local. A présent, les rues de Batoumi sont placardées d'affiches des dix partis candidats et la télévision locale, autrefois organe de propagande d'Abachidzé, donne la parole à toutes les tendances.