Annonce L'échinococcose ne cesse de s'étendre en FranceMÉDECINE Cette maladie parasitaire rare, mais mortelle, véhiculée par les renards et des petits rongeurs, touche 29 départements français. «A LA FOIS très rare et très grave» : en quelques mots, Solange Bresson-Hadni, professeur d'hépatologie au CHU de Besançon, résume le défi posé par l'échinococcose alvéolaire, une maladie parasitaire mortelle causée par un ver microscopique véhiculé par les renards et certains petits rongeurs.Depuis 1982, en effet, 364 cas humains ont été recensés en France, avec une incidence de 15 à 20 nouveaux cas chaque année. A première vue, pas de quoi fouetter un renard... Sauf que, en se concentrant dans le foie, les larves du ténia echinocoque forment, au bout de 5 à 15 ans, d'énormes tumeurs qui peuvent s'étendre à d'autres organes comme le diaphragme, le péricarde, voire le cerveau.Il y a trente ans, le taux de survie à cinq ans des malades traités n'était que de 30%. Aujourd'hui, grâce aux progrès réalisés dans le dépistage et la prise en charge des patients, le taux de survie s'approche de 90%.Seconde raison d'être vigilant : l'aire géographique du parasite, sans doute originaire de Sibérie, ne cesse de s'étendre, particulièrement en France. Les derniers chiffres présentés jeudi dernier à Arras (Pas-de-Calais), lors du conseil d'administration de l'Entente interdépartementale contre la rage et autres zoonoses (ERZ), qui réunit 41 départements métropolitains, révèlent que «le territoire contaminé est bien plus vaste que celui qui était connu ou suspecté initialement». Jusqu'à ces dernières années, l'échinococcose était circonscrite au Massif central et à la frange est du pays (Vosges, Jura, Savoie). Mais, aujourd'hui, sa présence est attestée dans au moins 29 départements. «En outre, nous constatons une augmentation de la proportion de renards contaminés au fil des ans», explique Benoît Combes, le directeur de l'ERZ. Ces résultats surprenants ont été obtenus à partir de l'analyse de plus de 6 000 crottes de renard collectées dans les départements adhérents à l'Entente depuis trois ans. C'est en effet par ce biais que les oeufs du parasite qui vit, à l'état adulte, dans l'intestin du canidé, se diffusent dans l'environnement. Par la suite, l'homme contracte la maladie en consommant des légumes, des baies ou de la terre souillés par des déjections de renards – mais aussi de chiens et de chats – eux-mêmes contaminés après avoir mangé des campagnols infestés de larves.Campagnes de vermifugeageLe deuxième fait saillant est l'augmentation significative des populations de renards urbains. «Rainman», comme le surnomment les Anglais, trouve dans nos cités et nos poubelles, à la fois le gîte et le couvert. Le tout à l'abri des chasseurs. Problème : quoique moins atteints que les renards des champs, ces renards des villes n'échappent pas à l'échinococcose. L'étude réalisée par l'ERZ et le laboratoire de biologie environnementale de l'université de Franche-Comté (UFC) à Annemasse (Haute-Savoie) et à Pontarlier (Doubs) a révélé, à partir de l'analyse d'intestins de renards, que ces derniers étaient, à 68% porteurs du parasite ! A Nancy et à Stuttgart (Allemagne), ce taux se situe entre 20 et 25%.Comme il n'est ni possible ni souhaitable d'éradiquer les renards de leurs nouvelles terres d'élection, l'ERZ envisage de lancer dès l'an prochain, à titre expérimental, des campagnes de vermifugeage destinées à stopper la progression du parasite en ville.Faut-il craindre, malgré tout, une recrudescence de la maladie en ville où la forte densité humaine multiplie les risques de contact avec le parasite ? Peut-on, par exemple, laisser ses enfants jouer dans un bac à sable où un renard a pu déposer ses excréments ? Si la vigilance s'impose, à commencer par le respect de certaines précautions, il n'y a cependant pas lieu de céder à la panique. «Dans 95% des cas, le malade type reste une personne qui vit à la campagne, dans une région fortement endémique, qui possède un chien ou un chat, qui se nourrit de son potager et qui va souvent à la chasse», notent Martine et Renaud Piarroux, chercheurs au laboratoire de parasitologie-mycologie au CHU de Besançon. Seule réserve : le temps d'incubation, très long, peut avoir un effet retard en dissimulant des cas qui ne se manifesteront que dans plusieurs années. En cas de doute, un dépistage sérologique (recherche d'anticorps dans le sang) ou un examen échographique du foie est de nature à lever les soupçons.
