Annonce Le sort incertain de l'Opéra-Comique Qui va succéder à Jérôme Savary, Salle Favart, à la tête de l'Opéra-Comique ? Selon le communiqué ministériel du 29 juin, on devrait connaître avant la fin du mois de juillet le choix du ministre de la culture et de la communication, Renaud Donnedieu de Vabres. L'ex-directeur du Théâtre national de Chaillot, nommé le 28 octobre 1998, par Catherine Trautmann, à la tête de cette institution, avait pris ses fonctions le 1er octobre 2000. Il devrait quitter son poste de directeur délégué en juin 2007, à 65 ans. Renaud Donnedieu de Vabres vient de recevoir en tête à tête les quatre derniers candidats retenus par la commission de présélection. Parmi eux, deux artistes, le chef d'orchestre Marc Minkowski et Jérôme Deschamps, comédien, metteur en scène et directeur du Théâtre de Nîmes. Les deux autres ont davantage un profil de gestionnaire ; ils occupent des fonctions dans deux institutions musicales parisiennes : Christian Schirm est directeur de l'Atelier lyrique de l'Opéra national de Paris ; Jacques Hédoin est administrateur général du Théâtre du Châtelet. Contrairement au programme de "théâtre musical populaire" mis en oeuvre par Jérôme Savary en 2000, le nouveau projet devrait renouer avec l'histoire des genres auxquels la Salle Favart est associée depuis sa fondation. Si l'on en croit le cahier des charges imposé, la direction de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles (DMDTS), déboutée de ses recommandations en la matière en 1998, aurait cette fois réussi à imposer ses vues. DÉSENGAGEMENT DE L'ÉTAT Le ministère s'est aujourd'hui rangé du côté de ceux qui pensent que l'Opéra-Comique se doit de retrouver ses fondamentaux. Haut lieu de l'opéra-comique des XVIIIe et XIXe siècles, ce genre lyrique typiquement français qui mêle airs et dialogues parlés, Favart devrait donc remettre au goût du jour une catégorie largement tombée en désuétude et dont l'âge d'or, vers 1840, avait révélé sur scène les oeuvres de Grétry, Adam, Auber, Donizetti et Meyerbeer, avant de connaître les créations de la Carmen de Bizet (1875), des Contes d'Hoffmann d'Offenbach (1881), de Manon de Massenet (1884) ou même de Pelléas et Mélisande de Debussy (1902)... Par ailleurs, l'Opéra-Comique devrait accueillir la musique baroque. On se souvient encore du fameux Atys de Lully, en 1987, mis en scène par Jean-Marie Villégier et dirigé par William Christie, qui avait marqué d'une pierre blanche le renouveau de l'opéra baroque français. Enfin, l'Opéra-Comique devrait également faire une place non négligeable à la création contemporaine. Il ne s'agit pas pour autant de revenir au temps où Favart, rattachée au Palais Garnier, menait grand équipage, avec une troupe, un orchestre et une programmation propre (jusqu'en 1939, avant que les deux troupes ne finissent par fusionner, au point que l'on retrouvait parfois les mêmes artistes sur les scènes et dans les fosses des deux institutions). Jusqu'en 1988-1989, l'Opéra-Comique avait fonctionné, en dépit d'un déficit endémique, avec une programmation complémentaire de celle de Garnier, qui allait du répertoire ancien (Atys en 1987) aux oeuvres du XXe siècle (De la maison des morts, de Janacek, en 1988), en passant par le théâtre musical expérimental (Aperghis, Stockhausen, Kagel, Henry, Glass, Denisov...). Il devrait donc retrouver cet emploi. La politique de bouts de ficelle demandée à l'époque au "pompier sauveteur" Jérôme Savary n'a rien résolu des problèmes posés, hors ceux de la réalisation, courant 2004, des travaux de mise aux normes et de sécurité. Depuis la construction de l'Opéra Bastille, Favart souffre d'un fort désengagement de l'Etat. En décembre 1999, sa saison lyrique 1999-2000 a dû être annulée devant la gravité de la situation. Depuis, on l'a maintenue en état de marche sous perfusion, avec une subvention actuelle de 6,2 millions d'euros (contre 4,27 millions d'euros en 1999), mais hors d'état de produire ses propres spectacles, ce qui l'a contrainte aux coproductions, mécénat et locations de salles. L'Etat donnera-t-il cette fois à cet établissement passé théâtre national en novembre 2004 - au même titre que l'Opéra Bastille, la Comédie-Française, Chaillot ou l'Odéon - les moyens exigés par une programmation à la hauteur des enjeux définis ? Rien n'est moins sûr : on parle d'une subvention qui n'excéderait pas les 12 millions d'euros, ce qui est peu à côté des budgets du Châtelet et de l'Opéra national de Paris, doté, il est vrai, de deux salles. La décision devrait être prise après concertation entre l'Elysée et Matignon ; elle sera ensuite approuvée en conseil des ministres avant de faire l'objet d'un arrêté ministériel au Journal officiel.