Inauguration Le président ukrainien a inauguré un canal controversé dans le delta du Danube Les travaux du canal, qui ont débuté en mai, menacent la réserve naturelle du delta du Danube, partagée entre la Roumanie et l'Ukraine, qui abrite quelque 90 espèces de poissons et 300 espèces d'oiseaux, dont certaines sont rares.Le président ukrainien, Leonid Koutchma, a inauguré jeudi 26 août, malgré les critiques occidentales, un canal contesté qui traverse une réserve protégée dans le delta du Danube et permet à l'Ukraine d'avoir un accès navigable à la mer Noire à partir de ce fleuve. "J'ordonne de restaurer la navigation dans la partie ukrainienne du delta du Danube", a déclaré M. Koutchma à bord d'un navire dans l'estuaire de Bystre, par lequel passe cette voie fluviale.Il a estimé que les accusations concernant le danger de ce projet pour l'environnement "n'avaient pas de caractère écologique, mais uniquement politique et économique" et affirmé que "toutes les exigences écologiques internationales (avaient) été respectées" lors de la construction.Ce canal traverse sur plusieurs kilomètres la réserve naturelle du delta du Danube, inscrite depuis 1991 au patrimoine mondial de l'Unesco (Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture) et partagée entre l'Ukraine et la Roumanie.Les travaux dans cette zone sensible, qui compte plus de 300 espèces d'oiseaux, dont certaines sont rares ou menacées, ont attiré les foudres de l'Union européenne, des Etats-Unis et du Fonds mondial pour la nature (WWF), ayant à plusieurs reprises appelé à stopper ce projet et à conduire une étude indépendante de son impact écologique. Des écologistes ukrainiens de l'organisation non gouvernementale Ecocentre ont affirmé qu'au moins deux colonies d'oiseaux rares avaient été détruites par le chantier."POLITIQUE DU FAIT ACCOMPLI"Le président roumain, Ion Iliescu, a de son côté dénoncé jeudi la "politique du fait accompli" menée selon lui par Kiev dans cette affaire, estimant qu'elle n'"allait pas dans le sens des relations de bon voisinage entre la Roumanie et l'Ukraine et était contraire aux normes du droit international".Mais Kiev est resté sourd aux critiques, accusant pour sa part Bucarest de gonfler le problème par peur de perdre son "monopole sur le transport entre le Danube et la mer Noire".Les travaux sur le chantier ont été lancés en mai dernier. Au cours de leur première tranche, estimée à 14,4 millions de dollars (11,9 millions d'euros) et qui vient d'être achevée, les ouvriers ont creusé une conduite de 3,3 kilomètres entre l'estuaire de Bystre et la mer Noire. La deuxième étape, qui doit s'étaler jusqu'à 2005, consistera à approfondir de 7 mètres à plus de 8 mètres la totalité du canal, long de 170 kilomètres.En mettant en service sa propre voie fluviale, Kiev espère y attirer à terme jusqu'à 60 % du trafic de marchandises par le Danube, contre 1 % à 2 % actuellement, le restant passant via la Roumanie, a expliqué Olexandre Agueïev, porte-parole de la société d'Etat Delta-Lotsman, chargée de ce projet.Cette hausse devrait, selon les estimations gouvernementales, rapporter à l'Ukraine plus de 7 millions de dollars (5,8 millions d'euros) annuellement, alors que les navires ukrainiens payaient jusqu'à présent près de 1 million de dollars (0,83 million d'euros) par an pour leur passage par les canaux roumains, ajoute M. Agueïev.Pour arriver à son but, Kiev propose le prix modeste, qui devrait être de 30 cents américains par m3 (24,8 centimes d'euros) de navire, selon M. Agueïev, contre 75 cents par m3 (62 centimes d'euros) en Roumanie, selon la presse ukrainienne.L'Ukraine compte par ailleurs sur ce projet pour créer 4 000 emplois dans la région pauvre d'Odessa (sud du pays) et relancer le travail de ses ports sur le Danube et ses usines de construction navale. "La reprise de la navigation (dans la partie ukrainienne) du Danube a une importance extraordinaire pour la réalisation du potentiel de l'Ukraine en tant que pays de transit", a conclu M. Koutchma lors de l'inauguration.
