Procès Le premier procès du disque français Ce mercredi, "Alexis" sera le premier internaute poursuivi par les maisons de disques à comparaître pour contrefaçon. Il risque jusqu'à trois ans de prison et 300.000 euros d'amende. Fin septembre, on découvrait Alexis. Sous ce prénom se cachait un enseignant de 28 ans, première victime connue de la vague de répression des maisons de disques à l'égard des internautes qui téléchargent sur les réseaux p2p. Le 18 août, la gendarmerie effectuait une perquisition dans son appartement et repartait avec son ordinateur et des centaines de CD gravés. Quelques jours plus tard, il était convoqué au tribunal, accusé de contrefaçon. Flou juridiqueAlexis sera ce mercredi en banlieue parisienne, premier internaute jugé pour avoir échangé de la musique sur internet. Il risque jusqu'à trois ans de prison et 300.000 euros d'amende. En tout, cinquante poursuites ont ensuite été lancées suite aux plaintes de l'industrie du disque. Certains des internautes ont fait entendre leur voix. Alexis préfère garder l'anonymat, explique maître Murielle Cahen, son avocate. A la veille du procès, cette dernière dénonce le flou juridique qui entoure, en France, le téléchargement : "il faudrait un texte de loi pour régler le problème. C'est ce qu'ils ont fait en Espagne, avec un texte qui assimile le téléchargement sur les réseaux peer-to-peer à de la copie privée s'il n'y a pas revente. En France, la loi reste trop floue"."Pas ouvertement mis à disposition"Les quelques décisions de justice qui ont déjà été prises n'éclairent pas plus : fin octobre, le tribunal de Rodez avait ainsi relaxé un étudiant qui avait téléchargé ou gravé 488 films, estimant qu'il les avait réservés à un usage privé. Mais début décembre, le tribunal correctionnel de Blois a pour sa part condamné deux trentenaires à deux mois de prison avec sursis et 20 000 euros de dommages pour avoir gravé et s'être échangé quelques 200 disques de musique, films et logiciels."On ne dispose pour l'instant que de décision en première instance, explique maître Cahen. On pourrait attendre une décision en cassation, mais elle pourrait très bien arriver dans quatre-cinq ans, une éternité en matière d'internet". Pour elle, Alexis devrait bénéficier de la même clémence que l'étudiant de Rodez : "il ne mettait pas ouvertement à disposition". L'enseignant se servait de Direct Connect, "un logiciel sur lequel il faut montrer patte blanche", c'est-à-dire proposer des fichiers à échanger pour pouvoir télécharger.EmbarrasMalgré tout, Alexis risque gros. Au moment de l'annonce des poursuites, Marc Guez, à la Société Civile des Producteurs Phonographiques, se montrait embarrassé face à une décision de justice qui risquait d'être trop lourde : "nous n'avons pas intérêt à ce que les internautes soient trop lourdement punis", expliquait-il alors (voir notre article). Depuis, aucune nouvelle poursuite n'a été lancée, et l'industrie du disque préfère pousser les FAI à déconnecter les téléchargeurs. Aucune des parties civiles n'a désiré s'exprimer avant le procès d'Alexis.Le SNEP "assume""Nous assumons l'action répressive que nous menons mais nous n'avons jamais considéré que c'était une fin en soi. C'est indissociable de l'essentiel: porter une parole forte de respect des métiers de la création et gagner le pari des plates-formes musicales légales", a affirmé mardi Hervé Rony, directeur général du Syndicat national de l'édition phonographique. "La répression est un moyen de faire prendre conscience d'un état de fait. Mais nous n'avons pas d'états d'âme par rapport à des gens qui ont 2.000 fichiers (illégaux) chez eux et ont un niveau de vie correct", a-t-il ajouté.
