Scandale Le mystère des cobayes humains inquiète outre-Manche Deux des six personnes ayant participé à l'essai clinique d'un médicament sont toujours en réanimation. par Armelle THORAVAL L'enquête prendra «des semaines, peut-être davantage car le mystère reste total sur ce qui s'est passé». Au sein de la MRHA, l'agence britannique de régulation des médicaments et des produits de santé, la stupéfaction reste totale après le cauchemar enduré par six jeunes hommes, à la suite de l'essai clinique d'un médicament le TGN 1412, un anticorps monoclonal destiné à soigner la polyarthrite rhumatoïde, la sclérose en plaques et la leucémie. L'essai rémunéré 2 000 livres (environ 2 880 euros) a été effectué sur huit cobayes, deux d'entre eux recevant un placebo. Très vite, les six autres se sont plaints de maux de tête, de dos, ont vu leur visage, leurs corps gonfler, sous le regard effrayé des deux autres hommes, indemnes. Une réaction anti-inflammatoire exceptionnelle. ll «ressemblait à Elephant Man», expliquait la compagne de l'un d'entre eux, un barman de 28 ans. Chances de survie. L'état de quatre d'entre eux, placés en unité de soins intensifs au Northwick Park Hospital, s'est amélioré au fil de la semaine, trois d'entre eux n'étant plus sous assistance respiratoire. Mais Ganesh Suntharalingham, patron de l'unité de réanimation, soulignait dimanche que les deux autres malades restaient dans un état critique, et se refusait à tout pronostic sur leurs chances de survie. Le test avait été confié à Parexel, spécialiste américain des essais médicaux, par le laboratoire allemand TeGenero. Malgré ce fiasco, Thomas Hanke, inventeur du TGN 1412 et responsable scientifique du laboratoire, a défendu les conditions dans lesquelles s'est effectué ce test. Il est «trop tôt pour dire s'il faut changer les règles qui régissent les essais cliniques» en Grande-Bretagne, explique-t-on à la MRHA, «ce genre d'essais sur des gens en bonne santé n'est pas rare». TeGenero indique avoir testé son produit sur des lapins et des singes, sans conséquences majeures. Essai multiple. Ce désastre a rouvert le débat sur l'encadrement des essais thérapeutiques. Faut-il interdire tout essai multiple pour ne tester les molécules que sur une personne, avec des intervalles suffisants pour évaluer les réactions du premier cobaye ? Ou bien trouver un moyen de limiter l'essai à une partie du corps isolée, en employant des dosages très faibles ? Ou rechercher des malades ayant déjà subi plusieurs traitements, et prêts à prendre le risque?