Mort du musicien américain d'origine mexicaine «Lalo» Guerrero

Mort Le musicien américain d'origine mexicaine «Lalo» Guerrero est mort à 88 ans. a musique chicana (mexicaine des Etats-Unis) a perdu son papa : Eduardo «Lalo» Guerrero s'est éteint jeudi à Palm Springs, Californie, à 88 ans. Né en 1916 à Tucson en Arizona d'une famille qui avait fui les troubles de la révolution mexicaine, il avait dès l'adolescence, dans le sillage de Guty Cárdenas (abattu en 1932 en pleine gloire dans un bar de Mexico), composé ses premiers boléros et rancheras (chansons de cow-boys). A 20 ans, Lalo traverse le Rio Grande pour tenter sa chance dans le pays de ses parents. «A l'époque, confiera-t-il des années plus tard, nous, les Mexicains des Etats-Unis, n'étions pas bien reçus au Mexique. On nous appelait "los pochos" [les blets, ndlr] et on se moquait de notre accent.» Avant de rentrer, il parvient à placer auprès d'un éditeur de musique de Mexico quelques chansons, dont une deviendra un classique : la Canción Mexicana, que chante Lucha Reyes (la Reine de la nuit du film d'Arturo Ripstein). Lors d'un voyage en train, il fait une rencontre capitale : un Chicano de Californie l'initie au mode de vie pachuco. Alors que la jeunesse américaine est mobilisée par la guerre, ces zazous portent, par provocation, des costumes extra-larges (zoot suit en anglais) et des chaînes de montre qui descendent jusqu'aux pieds. Ils ont aussi inventé un argot. «Par exemple, citait Lalo Guerrero, ils disaient dans une cantina: "Sers-moi des plaques et du ciment." Ça voulait dire: des tortillas avec de la purée de haricots.» Fasciné, Guerrero popularise ce langage dans plusieurs chansons. Qui, dans les années 70, inspireront la comédie musicale (puis le film) Zoot Suit, de Luis Valdés, futur réalisateur de la Bamba. Lalo Guerrero, autant musicien qu'humoriste, se spécialise, en espagnol ou dans un savoureux spanglish, dans les parodies de styles à la mode: il chante Marijuana Boogie et invente le personnage d'Elvis Pérez. Dans les années 60, il fait sien le combat des ouvriers agricoles sans papiers de Californie, réunis autour du syndicaliste César Chávez. Il devient progressivement le symbole des millions d'Américains d'origine mexicaine, et les marques de reconnaissance se multiplient : en 1995, Los Lobos enregistrent avec lui Papa's Dream, bel album de chansons pour enfants, et le président Clinton l'invite à la Maison Blanche. Les spectateurs parisiens ont eu le privilège de le voir le 8 février 1998 à la Cité de la musique : à 81 ans, jovial, il avait interprété quelques chansons légendaires de sa longue carrière.