Changement "Le Monde" s'installe dans son nouvel immeuble Le journal a été réalisé pour la première fois, lundi 20  décembre, à son nouveau siège, 80, boulevard Auguste-Blanqui, dans le 13e arrondissement de Paris. De la façade, où se déploient deux colombes dessinées par Plantu, à la cafétéria, du hall d'entrée aux salles de rédaction, visite guidée. Il a l'air perdu, le sapin de Noël, avec ses pauvres guirlandes qui clignotent, posé dans un coin du hall - ruche de verre gigantesque encore encombrée de câbles et de cartons, où se croisent ouvriers, techniciens et premiers journalistes arrivant à "Blanqui". Ces derniers aussi ont l'air un peu perdu. Mais ils disent déjà "à Blanqui", comme hier on a dit "à Claude-Bernard", "à Falguière" et, bien sûr, berceau des origines, "aux Italiens". D'un Mondeà l'autre, le siège du quotidien fondé par Hubert Beuve-Méry est passé du quartier de l'Opéra, où il est né (1944), à celui de Montparnasse (1990), puis à celui des Gobelins (1995), avant de s'installer pour de bon, entre la Butte-aux-Cailles et le quartier chinois, au numéro 80 du boulevard Auguste-Blanqui, dans le 13e arrondissement de Paris. "ON S'Y PERD !" Pour de bon ? Ce sont les colombes de Plantu qui le disent, s'envolant pour toujours sur la façade de verre grisé, avec Le Mondeécrit dessus et, dessous, des phrases de Victor Hugo sur la liberté de la presse et l'importance vitale de l'écriture et de l'écrit. Plantu (et sa souris) changé en monument... "J'applaudis des deux mains !, s'enthousiasme la rédactrice Armelle Cressard, entrée au Monde en 1966. Plantu le méritait. Il est un des emblèmes du journal." Comme la plupart des journalistes qui ont commencé à sillonner les interminables couloirs - "On s'y perd ! C'est comme aux Italiens"- de cet étrange paquebot de verre et de béton, elle est frappée par le contraste entre les salles de travail de la rédaction - "Franchement, on est serrés. Sans compter que les bureaux sont nettement plus petits qu'à Claude-Bernard"- et les espaces collectifs, comme la salle de cantine, le jardin d'hiver ou la cafétéria, réalisés par l'épouse de Christian de Portzamparc, Elizabeth, architecte d'intérieur. S'agissant de la cantine, Armelle n'a qu'un mot : "Somptueuse." Quant au mur végétal du jardin d'hiver, il lui fait penser à "un hôtel de luxe en Turquie ou au Proche-Orient", en tout cas à un endroit "charmant". Lundi 20 décembre, avant que le jour se lève, les machines à café se mettront en route pour la première fois et à midi, n'en doutons pas, la "somptueuse" cantine sera prise d'assaut... "ÇA RESSUSCITE" Plantu devrait, lui aussi, inaugurer son nouveau bureau, installé au rez-de-chaussée - "à côté du service médical, ce qui ne me gêne pas, vu que je passe mon temps à soigner les hommes politiques", s'amuse le dessinateur. Lui-même n'en revient pas d'avoir ses colombes et sa petite souris gravées sur le fronton du Monde. L'idée des colombes est de lui : "Ce sont des messagers, ils vont d'un continent à l'autre. Ici, les ailes d'une colombe sont faites avec les pages du Monde - journal dont je suis fier." Mais pourquoi deux colombes ? "Au départ, il n'y en avait qu'une seule, allant de gauche à droite. Ce qui m'agaçait : on aurait dit qu'elle venait de l'Ouest, des Etats-Unis... Alors j'en ai dessiné deux." Les colombes ont quelque chose de "noble", ajoute-t-il. "Ça bouge, ça vole, ça ressuscite..." Comme la presse ? Plantu éclate de rire : "Comme la presse, oui, exactement !"