Démission Le ministre de l'économie brésilien, Antonio Palocci, est contraint à la démissionAntonio Palocci n'est plus ministre de l'économie du Brésil. Après plusieurs journées d'incertitudes liées à un scandale de corruption, et les répercussions négatives à la Bourse de Sao Paulo, le ministre a démissionné, lundi 27 mars, peu avant que soit désigné son successeur, l'ancien ministre de la planification, qui présidait la Banque nationale de développement économique et social (BNDES), Guido Mantega.Dans sa dernière intervention publique, Antonio Palocci avait admis qu'"il vivait dans l'enfer de Dante, alors que l'économie était au ciel", accusant l'opposition de "confondre critiques et offenses, enquête et persécution". Mais son maintien au gouvernement, longtemps défendu par le président Luiz Inacio Lula da Silva, ne pouvait se prolonger après les dernières révélations le concernant.Les premières accusations de corruption avaient surgi en août, et, depuis huit mois, le responsable des finances brésilien passait une partie de son temps à démentir les témoignages le visant. Il aura passé cinquante heures dans des commissions d'enquête du Congrès, pour se défendre d'avoir entretenu des relations privilégiées avec d'anciens collaborateurs de la mairie de Ribeirao Preto (Etat de Sao Paulo), qu'il avait dirigée.Et pour nier que des sommes envoyées de l'étranger aient alimenté les caisses du Parti des travailleurs (PT, gauche au pouvoir). "Ni de Cuba, ni d'Angola, ni des Forces armées révolutionnaires de Colombie [FARC]", avait affirmé Antonio Palocci, chef de la campagne présidentielle victorieuse de M.Lula en 2002.Et puis, les accusations ont repris. Récemment, quand le jeune gardien d'une maison de Brasilia louée par les lobbyistes a raconté que le ministre, surnommé "le chef", se rendait à la résidence, où auraient été répartis des pots-de-vin, Antonio Palocci a préféré le silence. Sa situation s'est aggravée lorsque le compte bancaire du gardien, détenu dans une banque d'Etat, a été publié dans la presse, laissant croire que l'opposition aurait pu récompenser des révélations gênantes. Lundi soir, le président de la banque Caixa Economica Federal, Jorge Mattoso, a été inculpé de violation du secret professionnel.Le Parti des travailleurs affaibli Malgré ce contexte de suspicions, les hommages à l'"architecte du redressement économique" du Brésil se sont multipliés. Le sénateur social-démocrate Artur Virgilio (PSDB, opposition), qui avait exigé sa démission il y a dix jours, a salué "l'un des meilleurs ministres de l'économie du Brésil". "Ce fut un grand ministre, qui a imposé autorité et fermeté pour obtenir des résultats extrêmement positifs pour le pays", a déclaré le vice-président de la fédération des industries de l'Etat de Rio de Janeiro (Firjan), Carlos Gross. L'ancien militant trotskiste avait le soutien des milieux d'affaires.Les plus dures critiques venaient, paradoxalement, de son camp, le PT et la gauche dénonçant la rigueur fiscale et budgétaire imposée par Antonio Palocci. La nomination de Guido Mantega, un proche conseiller de M. Lula, qui l'accompagne depuis sa première candidature, en 1989, a suscité des doutes. M. Mantega critiquait aussi les choix d'Antonio Palocci, mais, dans sa première intervention comme ministre, il a assuré que "la politique économique ne changera pas, car elle n'est pas d'un ministre, mais du président Lula, garant d'une politique qui a obtenu les meilleurs résultats depuis vingt ans".Homme au ton toujours très posé, Antonio Palocci était le dernier des proches collaborateurs de M. Lula à son arrivée au pouvoir. Après avoir dû se défaire de José Dirceu, responsable des articulations politiques, et de Luiz Gushiken, chargé de la communication officielle, le président brésilien se sépare de son maître à penser économique. L'heure est délicate, à six mois du scrutin où il devrait être candidat à sa réélection.Les démissions provoquées par les affaires surgies depuis juin 2005 ont affaibli le parti du président, le PT, et son entourage. Journaliste politique du quotidien Estado de Sao Paulo, Lucia Hippolito se demande "quel programme Lula, aujourd'hui solitaire, présentera pour un éventuel second mandat".
