Annonce Le Maroc a commencé à expulser des milliers de ressortissants subsahariens Plus d'un millier de migrants sénégalais et maliens devaient être rapatriés, lundi 10 octobre, par avion dans leurs pays respectifs à partir d'Oujda, au nord-est du Maroc, alors qu'un cortège de vingt-huit bus se dirigeait vers la frontière mauritanienne, au sud. Trois vols de la compagnie Royal Air Maroc rapatrieront des émigrants sénégalais vers Dakar et trois autres ramèneront vers Bamako des Maliens durant les prochaines 48 heures, a indiqué lundi à Oujda une source de sécurité marocaine. "Les rotations commenceront dans la matinée à partir de l'aéroport d'Oujda", a précisé le ministère marocain de l'intérieur. Quelque 1 200 Sénéglais et Maliens ayant quitté leurs pays il y a plusieurs mois, voire plusieurs années, pour fuir la misère, ont ainsi été transférés en bus dimanche et lundi vers cette ville proche de la frontière algérienne. Beaucoup d'entre eux avaient été récupérés, samedi, dans le désert où, ont-ils déclaré, ils avaient été expulsés par les autorités marocaines, sans eau ni nourriture. Des centaines d'autres immigrants africains ont dû prendre place dans vingt-huit bus qui se dirigeaient, lundi, vers le Sahara, ont indiqué des ONG, où ils risquent d'être abandonnés. Les services de sécurité marocains ont indiqué qu'un cortège de six bus transportant chacun une cinquantaine d'immigrants africains se dirigeait vers le sud-ouest du pays, escorté par des gendarmes. "Ce cortège a traversé lundi matin la ville de Guelmim et se déplaçait vers une zone au sud de Tan Tan [à la porte du Sahara occidental]", a précisé cette source. Pour Kofi Annan, les flux migratoires sont "une nécessité" Le secrétaire général de l'ONU a préconisé, lundi, une gestion "juste et équitable" des migrations, estimant qu'il était "futile" de vouloir bloquer les mouvements transfrontaliers de population. Interrogé lors d'une conférence de presse sur le drame des migrants qui tentent de gagner l'Espagne par le Maroc, M. Annan a estimé que "ce problème nécessite une coopération internationale". "Ce qu'il faut, a-t-il préconisé, c'est gérer ce processus de manière juste et équitable dans l'intérêt de tous (et) en respectant les droits des migrants". "Quand on regarde le continent européen et sa démographie, il apparaît clairement que la migration va être une nécessité (car) plusieurs pays européens ne peuvent pas soutenir leur niveau actuel de développement économique sans immigration.", a-t-il expliqué. [-] fermer DÉPLACÉS AU SAHARA OCCIDENTAL Selon Médecins sans frontières (MSF), les autorités marocaines déplaçaient en bus près de 1 400 immigrants africains, lundi matin, dans le sud-est désertique du Maroc, "vers une destination inconnue". "Il y a 24 heures, on a fait une distribution de vivres à deux camps avant le départ, et une autre au troisième camp multinational. Mais quand on est revenus (dimanche) à 4 heures du matin, le groupe multinational avait disparu, tous les gens étaient partis, c'était un vraie pagaille, il paraît qu'ils sont partis menottés, tous ces gens-là sont les plus vulnérables", a expliqué Javier Gabaldon, chef de la mission MSF. Selon lui, "se trouvent à bord une dizaine de femmes (deux enceintes) et un enfant. Ce sont les plus vulnérables parce qu'ils viennent du désert. Mais il n'y a pas de gros problèmes parce qu'on a sorti tous les blessés", a ajouté Javier Gabaldon. Selon une source policière, près de 250 immigrants africains ont été laissés, lundi, par les autorités marocaines dans une zone désertique à la frontière avec l'Algérie, après une halte à Guelmim (700 km au sud-est de Rabat). Ils auraient été ensuite "déposés" à la frontière avec l'Algérie. Des centaines d'autres immigrants étaient attendus, lundi, à Guelmim, selon cette source, qui a précisé qu'ils devraient être laissés sur la frontière entre le Sahara occidental - administré depuis 1975 par le Maroc - et la Mauritanie. L'Association marocaine des droits humains (AMDH, indépendante) a condamné, lundi, "la violence barbare" exercée contre les immigrants africains par l'Espagne et le Maroc, et appelé à une manifestation de solidarité, le 13 octobre, à Rabat. L'AMDH s'élève également contre la "xénophobie" qui, selon elle, se développe au Maroc à l'encontre de "nos frères subsahariens", indique un communiqué de l'association. Sur le drame humanitaire des immigrants, le préfet de la ville d'Oujda, Mohamed Ibrahimi, souligne que "le Maroc ne pourra pas résoudre le problème tout seul" et il va jusqu'à dire que son pays "ne pourra pas non plus être la poubelle de l'Europe". "L'UE ne doit plus limiter le problème de l'immigration au seul cadre maroco-espagnol", a-t-il dit, ajoutant que "les pays subsahariens doivent être associés à la réflexion sur ce sujet".