Condamnation Le jury au procès de Zacarias Moussaoui s'est prononcé pour la prison à vie Le jury au procès de Zacarias Moussaoui, complice des attentats du 11 septembre 2001, a rendu, mercredi 3 mai, un verdict lui épargnant la peine capitale à l'issue du premier procès aux Etats-Unis sur ces attaques qui ont fait près de 3 000 morts. "Amérique, tu as perdu, j'ai gagné !", a crié le Français, âgé de 37 ans, en quittant la salle d'audience du tribunal fédéral d'Alexandria (Virginie), après avoir écouté, impassible, la lecture du verdict. La juge Leonie Brinkema, qui est liée par la décision du jury, doit prononcer, jeudi matin, la condamnation formelle de Moussaoui à la réclusion criminelle à perpétuité, la peine minimale dans la mesure où le Français, membre revendiqué d'Al-Qaida, a plaidé coupable l'année dernière. "Le jury a parlé, nous respectons et nous acceptons son verdict", a déclaré Paul McNulty, ministre de la justice adjoint. L'accusation ne peut pas faire appel de la condamnation, et Moussaoui devrait être transféré prochainement dans la prison de haute sécurité de Florence (Colorado), surnommée l'"Alcatraz des Rocheuses", où il sera maintenu à l'isolement jusqu'à la fin de ses jours. "UN PROCÈS ÉQUITABLE" Le président américain, George W. Bush, s'est contenté d'observer que l'accusé avait eu "un procès équitable". "Les jurés l'ont épargné, une chose qu'à l'évidence il n'était pas disposé à faire pour d'innocents citoyens américains", a-t-il déclaré M. Bush. "Justice a été rendue", a commenté, devant le tribunal, Abraham Scott, qui a perdu sa femme dans l'attentat contre le Pentagone."Je suis contente de voir que c'est le dernier jour où M. Moussaoui sera à la 'une'", a ajouté Carrie Lemack, dont la mère se trouvait dans l'un des avions détournés. L'ancien maire de New York, Rudolph Giuliani, a déclaré qu'il aurait préféré que Moussaoui soit exécuté, mais que la décision des jurés montrait au monde la valeur du système judiciaire américain. "L'Amérique a gagné ce soir", a-t-il estimé. A Paris, le ministre de la justice, Pascal Clément, a pris acte du verdict, rappelant "la position de la France contre la peine de mort". La mère de Zacarias Moussaoui, Aïcha El-Wafi, a confié, à la radio France-Inter, qu'elle se sentait "morte" après ce verdict imposant la perpétuité à son fils : "C'est la pire chose qui peut arriver à une mère." UNE "CONNAISSANCE LIMITÉE" DES PROJETS D'ATTENTATS A l'issue de trois mois de procès, les neuf hommes et trois femmes du jury, qui avaient estimé lors d'une première phase que Moussaoui était passible de l'injection mortelle pour avoir menti lors de son arrestation et permis ainsi les attentats, ont délibéré pendant près de 41 heures avant de rejeter la mort. Après sa condamnation formelle jeudi, Moussaoui deviendra le premier condamné aux Etats-Unis pour les attentats survenus il y a près de cinq ans. Son rôle n'a jamais été établi avec certitude : le jour des attaques, il était en prison dans le Minnesota pour un visa périmé. Trois jurés ont d'ailleurs estimé que ce rôle, s'il a existé, "était mineur". Trois jurés ont également retenu une circonstance atténuante qui ne faisait pas partie de la liste : le Français n'avait qu'une "connaissance limitée" des projets des terroristes. Aucun des membres du jury n'a retenu les principaux arguments de la défense : l'éventuelle schizophrénie du Français et son probable désir de mourir en martyr. Pour beaucoup d'experts, le défi de la défense semblait pourtant insurmontable, face au torrent d'émotion déversé par l'accusation pendant le procès et les dizaines de témoignages déchirants de certains proches de victimes. Surtout, Zacarias Moussaoui lui-même a semblé tout faire pour se rendre détestable, prenant la parole pour revendiquer un rôle dans le 11-Septembre, puis pour exprimer son dégoût des victimes.