Législation Le gouvernement veut réduire les inégalités salariales entre hommes et femmes Nicole Ameline, ministre de la parité et de l'égalité professionnelle, a présenté aux députés, mardi 10 mai, un projet de loi qui propose de réduire en cinq ans les écarts de salaires entre les femmes et les hommes. "Le temps est venu de faire progresser massivement et positivement les femmes au cœur de la dynamique économique. Faire progresser l'égalité, c'est faire avancer la société", a-t-elle insisté. Et de poursuivre : "A défaut d'être un modèle, la France contribuera avec ses collègues et amis européens à donner au monde l'exemple de sociétés réussissant à associer pleinement la compétitivité de leur économie au respect des valeurs et des droits fondamentaux". "Toutes les grandes dates qui ont jalonné l'histoire des femmes ont trouvé pour beaucoup d'entre elles leur origine dans la construction européenne", a aussi souligné la ministre. Et d'estimer : "Aujourd'hui, le projet de Constitution européenne nous fera passer un cap supplémentaire, puisque l'égalité - évoquée à neuf reprises dans le traité - devient une valeur et un objectif". Nicole Ameline s'exprimait en présence de ses 24 homologues européens conviés au Palais-Bourbon à l'invitation du président de l'Assemblée, Jean-Louis Debré. L'UMP votera le texte tandis que le groupe UDF a annoncé qu'il déterminerait son vote - pour ou abstention - à la fin des débats, en fonction du sort réservé à ses amendements. Les groupes PS et PCR ont décidé de s'abstenir. "C'est une avancée, mais très insuffisante, qui représente peu de contraintes. Nous avons décidé de nous abstenir", a expliqué Jean-Marc Ayrault, président du groupe socialiste. "Tout ce qui peut améliorer, on ne va pas s'y opposer, mais ce n'est pas à la hauteur de ce qu'attendent les femmes", a-t-il ajouté. "Le gouvernement fait un peu un effet d'annonce, une déclaration d'intention plutôt qu'une véritable action qui était nécessaire". "Votre projet manque d'envergure", a pour sa part estimé Jacques Desallangre, apparenté au groupe PCR. Ce texte fait suite à trois autres lois : la loi du 22 décembre 1972 relative à l'égalité de rémunérations entre les hommes et les femmes, la loi Roudy du 13 juillet 1983 et celle du 9 mai 2001 relative à l'égalité professionnellle entre les femmes et les hommes, dite loi Génisson. NÉGOCIATIONS "LOYALES" ET "SÉRIEUSES" Ces lois ont peiné à se concrétiser, malgré quelques initiatives d'entreprises pionnières comme PSA Peugeot-Citroën et Renault, où des accords salariaux ont été conclus respectivement en novembre 2003 et février 2004. Le projet de loi prévoit de renforcer les droits des femmes en congé de maternité, notamment en matière de salaires, de congés et de protection contre les discriminations. Il vise aussi à une représentation plus équilibrée des femmes et des hommes dans les conseils d'administration des entreprises publiques, ou bien encore au sein des instances prud'homales. La commission des affaires sociales de l'Assemblée a adopté une trentaine d'amendements prévoyant que des négociations "loyales et sérieuses" sur la parité devront "effectivement" être engagées tant au niveau de la branche qu'au niveau de l'entreprise. Un amendement UDF a également été retenu qui permet de bénéficier d'un congé parental au-delà des 3 ans de l'enfant et jusqu'à 16 ans, alors que jusqu'ici ce congé "tombe" dès que l'enfant a 3 ans même si la totalité du droit n'a pas été utilisée. Dans trois ans, une conférence nationale fera un bilan, et si les résultats ne sont pas satisfaisants, une taxe sur la masse salariale pourrait être instaurée. La CFTC a cependant jugé que la "portée" du projet de loi sur l'égalité salariale entre les femmes et les hommes est "réduite à une pédagogie", faute notamment de pouvoir recourir "à des experts financés par l'entreprise" dans les négociations avec le patronat. IMPORTANTS ÉCARTS SALARIAUX Selon l'Insee, l'écart moyen des rémunérations entre les hommes et les femmes varie aujourd'hui entre 10 et 25 %. Les femmes représentent 45 % de la population active française. Le rapport des salaires femmes/hommes est de 85 % dans la fonction publique et de 80 % dans le secteur privé. Quelque 80 % des 3,4 millions de salariés travaillant au SMIC ou en dessous en France sont des femmes. Même actives professionnellement, les femmes continuent d'assurer à 80 % les tâches domestiques. On ne compte que 26 % de femmes parmi les cadres du secteur privé, 11,5 % parmi les chefs d'entreprises de 50 salariés et plus, 7 % parmi les cadres dirigeants des 5 000 premières entreprises françaises et 5 % dans les conseils d'administration des entreprises du CAC 40. L'examen du projet de loi devrait s'achever mercredi soir. Le Sénat devrait en débattre à partir du 14 juin.