Annonce Le gouvernement sort la grosse artillerie pour attirer les chômeurs dans les métiers du BTP. C'est l'été. La plage, les régimes dissociés et les tests des magazine féminins. Le BTP, qui a pensé à vous, en propose un. «Etes-vous méthodique, astucieux, adroit ?», demande le dépliant. Vous serez installateur de chaufferies et de climatisation. Plutôt «convivial, à l'écoute, solidaire» ? Vous vous rapprochez alors du profil de canalisateur ou de maçon. Après les jeunes, puis les femmes, le BTP drague les chômeurs dans sa nouvelle campagne de recrutement. Pour la première fois, quatre fédérations professionnelles se sont entendues autour d'un même slogan: «140 000 emplois par an, pourquoi pas vous ?» Derrière le coup des emplois non pourvus, on n'est pas surpris de retrouver le gouvernement : pas moins de deux ministres hier Dominique Perben et Jean-Louis Borloo pour lancer l'opération. Il y aurait en fait 47 000 offres d'emplois encore non satisfaites dans les registres de l'ANPE à la fin mars. Et le chiffre de 140 000 affiché dans la campagne serait en fait, selon le gouvernement, le nombre de personnes du secteur qui n'y travaillaient pas il y a encore un an.Courrier aux maires. Sur l'affiche, il y a deux hommes à casque, un jeune près d'un viaduc, une femme à la truelle. Tous souriants. Et tous blancs. Envie de fuir une image de métiers peu valorisés et réservés aux immigrés ? «On veut que les jeunes Français sachent qu'on crée des emplois, et qu'ils sont pour tout le monde», esquive l'un des conseillers de Dominique Perben. Le ministre himself signera donc un courrier à chacun des 33 489 maires de France pour les inciter à faire la pub du secteur. Et pour une fois, les fédérations patronales se sont engagées à transmettre aux employeurs une plaquette leur rappelant qu'il existe une foule de dispositifs pour faciliter la formation des chômeurs. Manière de rappeler la profession à ses responsabilités.«Tempérament gagnant». On est loin des campagnes de communication des années 80, quand la Fédération française du bâtiment lançait, en 1986, un tapageur : «Profession bâtiment, tempérament gagnant.» La crise de l'immobilier des années 90 est passée... Et dès 1999 la promotion a repris, avant tout vers les jeunes. Depuis 2003, l'opération «Les coulisses du bâtiment» ouvre les chantiers à 300 000 visiteurs chaque année. Avec «Un jeune, un jour, une entreprise», des employeurs adoptent pour une journée un écolier.Puis en 2004, c'est au tour des femmes de devenir des cibles de choix avec «Bâtir au féminin». Objectif : recruter 20 000 femmes sur les chantiers d'ici 2009. On en est à 6 000. La profession vante alors «les horaires fixes» aux ex-salariées de la grande distribution d'où vient une large partie des femmes reconverties ou les métiers « indélocalisables » aux anciennes de l'industrie textile. Mais c'est la Fédération des travaux publics qui décroche la palme du glamour. Avec «Ambition travaux publics» en mars 2006, Frédéric Taddeï (oui, celui qui filmait des stars du X, la nuit, dans Paris dernière ) donne la parole dans de miniclips diffusés à la télévision ou sur NRJ en noir et blanc à Jean-Paul, conducteur d'engin, ou Delphine, chef de chantier.«Fumisterie». Alors, le bâtiment et ses 140 000 emplois, pourquoi pas vous ? Peut-être parce qu'ils restent pénibles et dangereux. «Tout cela est une vaste fumisterie, dénonce Philippe Christmann, de la CGT bâtiment. Pendant ce temps, les négociations pour améliorer les conditions de travail n'avancent pas : à aucun moment les fédérations patronales ne nous ont contactés pour savoir comment attirer les gens dans nos métiers. L'espérance de vie moyenne d'un ouvrier du bâtiment, c'est 60 ans, sept ans de moins qu'un cadre.» Ce n'était pas marqué dans les plaquettes.
