Annonce Le FSB soupçonné dans la tentative d'empoisonnement d'un ex-esprion russe La police britannique a ouvert une enquête "sur un empoisonnement présumé" d'un ancien espion russe réfugié à Londres et actuellement hospitalisé dans un état "grave", a indiqué, dimanche 19 novembre, Scotland Yard. Avant son hospitalisation, Alexandre Litvinenko, un ex-lieutenant-colonel du FSB (ex-KGB) très critique à l'égard de Moscou, enquêtait sur le meurtre de la journaliste russe d'opposition Anna Politkovskaïa. Oleg Gordievski, chef espion en Grande-Bretagne pour le KGB (ex-FSB), dans les années 1980 et transfuge le plus gradé des services soviétiques en Occident, a affirmé qu'il soupçonnait que ce soit un ami russe, ancien collègue, dans un entretien au Times publié lundi. "Bien sûr que cela a été commandité par l'Etat [russe]", a affirmé M. Gordievski, proche d'Alexandre Litvinenko. "Il était un ennemi évident. Seul le KGB est capable de faire une telle chose. Le poison était très sophistiqué", a-t-il déclaré au quotidien britannique, se référant toujours à l'ancien nom des services d'espionnage russe. UN COCKTAIL DE PLUSIEURS SUBSTANCES Des médias britanniques et russes se faisaient, dimanche, l'écho d'amis de l'ex-espion, non identifiés, selon lesquels il serait entre la vie et la mort. Un porte-parole de Scotland Yard a pour sa part précisé qu'Alexandre Litvinenko, 43 ans, était actuellement "dans un état grave mais stationnaire". Selon le Sunday Times citant un rapport médical, l'ex-espion aurait été empoisonné au thallium, l'un des composants de la mort-aux-rats, recevant trois fois la dose potentiellement mortelle. Au vu de ses symptômes, les médecins évoqueraient un cocktail de plusieurs substances. Ses reins ont été endommagés, il vomit sans arrêt, souffre d'une perte quasi totale de globules blancs et n'a pas mangé depuis dix-huit jours, écrit le journal. Placé sous protection armée, il aurait des difficultés à parler et serait dans l'attente d'une greffe de moelle osseuse. Alexandre Litvinenko avait reçu l'asile politique en Grande-Bretagne en 2001 après avoir déjoué un complot présumé du FSB contre l'oligarque russe Boris Berezovski, résidant également au Royaume-Uni. L'ex-espion, qui serait citoyen britannique depuis cette année, s'intéressait de près au meurtre récent de la journaliste russe d'opposition Anna Politkovskaïa. "IL Y AURA D'AUTRES PERSONNES CIBLÉES" C'était l'objet de sa rencontre le 1er novembre avec "Mario", un "contact" italien, qui lui aurait assuré avoir des informations importantes à lui communiquer. Il s'agirait, selon le quotidien en ligne russe Gazeta.ru, de l'homme d'affaires italien Mario Scaramella. Toujours selon ce quotidien en ligne, M. Scaramella fréquentait la Loubianka, le siège du FSB à Moscou, et se serait rendu plusieurs fois dans le bureau du directeur adjoint des services secrets, Viktor Kolmogorov, chargé de suivre les dossiers des anciens du FSB. Avant que sa condition se détériore, Alexandre Litvinenko avait accordé une interview au journal britannique Sunday Times. "Mario a dit qu'il voulait s'asseoir", avait-il raconté dans cette interview. Les deux hommes se sont alors rendus dans un restaurant japonais de Piccadilly Circus, au centre de Londres, où seul M. Litvinenko aurait déjeuné. Ce dernier avait également rapporté au Sunday Times que son contact "avait l'air très nerveux". Il m'a donné une liste de noms de gens, précise-t-il, dont des agents du FSB, prétendument liés au meurtre [d'Anna Politkovskaïa]", ajoutant qu'il s'était senti mal dans les heures qui ont suivi. Pour Oleg Gordievski, Mario Scaramella ne peut être le coupable. En revanche, il a déclaré qu'il soupçonnait un ancien associé de l'oligarque russe Boris Berezovski, aujourd'hui en exil en Grande-Bretagne, mais refusé de livrer son nom au Times. Cet homme se serait présenté à Alexandre Litvinenko comme un homme d'affaires et un ami. Il l'aurait rencontré dans un hôtel et aurait alors versé le poison dans son thé. "Les personnes comme lui [Alexandre Litvinenko] et moi avons énormément aidé les Britanniques avec notre savoir, alors pourquoi les autorités britanniques permettraient-elles aux assassins d'entrer en Grande-Bretagne ?", s'est-il indigné. "Il y aura d'autres personnes ciblées, dont moi. Je suis condamné à mort depuis vingt et un ans", a-t-il ajouté.