Annonce Le FMI et la Banque mondiale effacent la dette des pays les plus pauvres Dans un geste qualifié d'historique, le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale ont tour à tour tiré un trait, samedi 24 et dimanche 25 septembre à Washington, sur la dette de dix-huit des pays les plus pauvres de la planète. Promesse a en outre été faite d'étendre ce dispositif à vingt autres Etats. L'ensemble de la dette de ces 38 pays représente, selon la Banque mondiale, près de 57 milliards de dollars (47,38 milliards d'euros). Réunis en assemblées annuelles, les 184 actionnaires du FMI et de la Banque mondiale, institutions qui fêtent leur 60e anniversaire cette année, ont donné suite à la décision du G8, adoptée en juillet au sommet de Gleneagles, en Ecosse, d'effacer cette dette, les divergences sur les modalités de cet accord ayant été aplanies. Certains pays européens craignaient que le projet grève les ressources du FMI et de la Banque mondiale, faute de financement. La Belgique et les Pays-Bas, notamment, qui consacrent déjà une bien plus grande partie de leur richesse que les pays du G8 à l'aide au développement, craignaient de devoir puiser encore davantage dans leurs budgets. Le G8, en réaffirmant vendredi assumer les coûts de cette annulation, a contribué à apaiser les dernières craintes. "DOLLAR POUR DOLLAR" Concrètement, les pays riches se sont engagés à assurer "dollar pour dollar" le coût de l'effacement de ces sommes dues pour 70 % à la Banque mondiale, le reste au FMI et à la Banque africaine de développement. Les pays riches ont également accepté d'augmenter leurs aides au développement et les aides bilatérales. La première vague d'effacement de dettes s'appliquera au Bénin, à la Bolivie, au Burkina Faso, à l'Ethiopie, au Ghana, à la Guyana, au Honduras, à Madagascar, au Mali, à la Mauritanie, au Mozambique, au Nicaragua, au Niger, au Rwanda, au Sénégal, à la Tanzanie, à l'Ouganda et à la Zambie. Les vingt autres pays sont le Burundi, le Cameroun, le Tchad, la République démocratique du Congo, la Gambie, la Guinée, la Guinée-Bissau, le Malawi, Sao Tomé et Principe, la Sierra Leone, la République centrafricaine, les Comores, le Congo-Brazzaville, la Côte d'Ivoire, le Laos, le Liberia, la Birmanie, la Somalie, le Soudan et le Togo. Les dix-huit premiers pays ont été sélectionnés par les pays riches du G8 car ils avaient déjà réussi un examen de passage pour bénéficier d'une initiative d'allégement de la dette mise au point en 1996 par la Banque mondiale et le FMI, appelé initiative PPTE (pays pauvres très endettés). Pour bénéficier du même dispositif, les vingt prochains pays devront avoir répondu à toutes les conditions dictées par ce processus. L'ENGAGEMENT DES PAYS BÉNÉFICIAIRES A l'origine, cette initiative visait à alléger le fardeau de la dette aux pays les plus démunis pour leur donner une chance d'un nouveau départ. Les bénéficiaires doivent cependant s'engager à consacrer les sommes ainsi dégagées à la santé et à l'éducation, et à mener des réformes économiques en faveur de la croissance et de la réduction de la pauvreté. Plusieurs stades sont prévus pour bénéficier pleinement du programme PPTE. Les dix-huit pays retenus sont ainsi déjà arrivés au "point d'achèvement", alors que les vingt en attente n'en sont qu'au "point de décision", un stade inférieur. Si, au bout de trois ans, le ratio d'endettement extérieur d'un pays candidat demeure "insoutenable", le pays est formellement éligible, il est considéré comme étant au "point de décision". Pour atteindre le prochain stade, les pays devront avoir achevé les réformes économiques. La communauté internationale s'engage alors à apporter une assistance suffisante en cas de chocs extérieurs. "En Afrique et dans le monde, les dirigeants de trente-huit pays n'auront plus à choisir entre dépenser pour leurs citoyens et rembourser des dettes impossibles, souvent héritées de gouvernements précédents", s'est réjoui M. Wolfowitz, le président de la Banque mondiale. Il reste maintenant aux conseils d'administration des deux institutions à mettre au point les derniers détails techniques et un système de surveillance du processus, ce qui devrait, selon M. Wolfowitz, être fait dans les prochaines semaines. SATISFACTION DES ONG Les organisations non gouvernementales (ONG) militant pour l'aide au développement se sont félicitées, dimanche, de l'accord sur l'annulation de la dette des pays les plus pauvres, tout en estimant qu'il s'agissait seulement d'un premier pas. Cette percée "va profiter à des dizaines de millions de gens parmi les plus pauvres au monde", s'est félicité le chanteur irlandais Bob Geldof, porte-drapeau de la lutte contre la pauvreté et créateur des concerts Live8. "Il s'agit seulement d'un début, comme nous l'avons toujours dit, mais de quel début !", a-t-il ajouté dans un communiqué. Mais "il faut que l'accord soit mis en œuvre sans délai", a poursuivi le chanteur. Même son de cloche du côté de la principale ONG militant pour l'aide au développement, l'association britannique Oxfam."Pour la première fois, les dirigeants mondiaux ont annulé 100 % de la dette dont sont redevables dix-huit pays au Fonds monétaire international et à la Banque mondiale", s'est réjouie Bernice Romero, l'une de ses responsables.